Chronique Album
Date de sortie : 30.04.2007
Label : FatCat Records
Rédigé par
jOe, le 6 mai 2007
The Twilight Sad, c'est un groupe de types qui travaillent dans le bâtiment. Leur spécialité ? Les murs de son. Et comme si ce n'était pas suffisant, les bougres s'échinent, sur leur premier album, à construire un pont géant reliant musicalement l'Ecosse au Canada. En effet, cette formation originaire des environs de Glasgow TTS semble être le premier groupe capable de mélanger harmonieusement les couleurs du post-rock contemplatif (tendance Mogwaï) à celles du rock mélodramatique tel qu'on le pratique dans les environs de Montréal...
Ce qui frappe d'emblée dans Fourteen Autumns And Thirteen Winters, c'est l'aisance avec laquelle ces quatre jeunes écossais installent leur univers. Ils imposent une identité marquée et un son d'une puissance phénoménale. La présence de Paul Katis à la production n'y est sans doute pas pour rien (il a travaillé avec Mercury Rev, Interpol, Mice Parade, entre autres). Sa tendance à donner une dimension monumentale et une intensité aux limites du bruitiste à ses réalisations trouve ici un nouvel exemple (allez donc vous en convaincre en écoutant Talking With Fireworks... vous me donnerez des nouvelles de vos tympans). La composition des morceaux délaisse quelque peu les tergiversions expérimentales et va droit au but : une atmosphère mélancolique héritée du folk, des couplets montés en escalades soniques vers des refrains d'où se dégage une véritable fureur ainsi qu'une sensibilité à fleur de peau. La première fois que le refrain de That Summer, At Home I Became The Invisible Boy (pivot central de l'album et single impeccable) nous saute aux oreilles avec ses paroles désolées et ses guitares flamboyantes, on se dit qu'on a peut être là un des plus beaux hymnes rock depuis Wake Up des canadiens de Arcade Fire.
Si les paysages musicaux sont identifiables à la première écoute (c'est sûr, on est bien à Glasgow, l'autre pays du post-rock) les paroles sont plus sombres, plus mystérieuses. Le thème de l'adolescence, sujet à double tranchant par excellence, y est abordé de manière explicite sans pour autant laisser le chant se vautrer dans un ton lacrymal de mauvais goût. Au contraire, l'émotion du chanteur respire la sincérité. De là à penser qu'il se livre à une thérapie cathartique, il n'y a qu'un pas qu'on franchira sans trop de doute.
Avec ses concerts expérimentaux et ambitieux, The Twilight Sad représentait l'un des nouveaux espoirs du post rock. Aujourd'hui, avec ce premier album grandiose et décomplexé, le groupe s'impose comme l'un des plus fiers représentants d'un rock frondeur à la fois puissant et fragile, un rock qui semblait avoir quitté le vieux continent depuis War, le troisième album de U2. C'était en 1983, il était temps de s'y remettre.