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The Teenagers

Reality Check

The Teenagers - Reality Check
Chronique Album
Date de sortie : 17.03.2008
Label : XL Recordings/Beggars Banquet France
2
Rédigé par Kris, le 21 mars 2008
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A la sortie des singles "Homecoming" et "Starlett Johansson" l’année passée, The Teenagers semblaient être l'un des nouveaux groupes à suivre, peut-être même une nouvelle sensation, bien que trois minutes ne suffisaient pas à en juger. Les trois français avaient alors réussi à nous faire miroiter ce spectre de la new-wave au travers de compositions modernes, un brin surannés, mais à l’attraction naïve. Les Teenagers véhiculaient cette fraîcheur enivrante de la jeunesse relatée, avec ces mots à elle, mais avec un recul et une justesse saisissante. "Homecoming" est la décadence délicate d’une jeunesse insouciante et hédoniste, "Starlett Johansson" est un témoignage soigné et décalé des obsessions idéalistes et surréalistes de l’adolescence épicurienne. Mais ce qui fascinait était la véracité de leurs auteurs, les Teenagers, qui pourtant, sont loin d’être des teenagers. Michael Szpiner, Dorian Dumont et Quentin Delafon relatent avec justesse cette période d’entre-deux, de désorientation profonde, où les notions de temps et les références sont incertaines et se juxtaposent jusqu’à l’incertitude. Avec cette capacité virtuose à mettre en perspective cette adolescence à laquelle on n’appartient plus, à la manière d’un Bret Easton Ellis ou d’un J.D. Salinger, les Teenagers semblaient avoir su épouser un point de vue à la fois pertinent et parcimonieux, qui en faisaient des artistes que l’on espérait à part…

Ironie du sort, les protagonistes de leurs chansons ne sont pas les seuls candides et naïfs de l’histoire. Il y a également le reste du monde ayant écouté Reality Check. Car, ce premier album des Teenagers est une magnifique escroquerie. A l’emballage clinquante et tape-à-l’oeil (culture DIY, identitaire indie, signature chez les anglais de XL Recordings) mais au bonbon amer, les Teenagers racolent sans assurer le coup d’un soir. Quarante-deux minutes d’ennui et autant de faux clins d’œil pour laisser place à de véritables clichés. "Feeling Better" est un concentré de tout ce qui finalement ne va pas dans ce premier album des Teenagers. Avec une formule pop-rock assénée tout au long de l’album, un refrain choral formaté, des synthés kitsch, The Teenagers tentent de raviver des souvenirs et des terrains communs. Ils ratissent large pour tenter de rassembler pêle-mêle des réminiscences collectives : de la power-pop nineties pour le chorus, deux lignes pour rappeler le demi-dieu pop Michael Jackson (« We want to heal the world / To make it a better place »), un riff piqué à "Ceremony" de New Order pour faire persistance sonore… En rassemblant tous ces ingrédients aguicheurs, les Teenagers veulent jouer la carte de la mémoire collégiale pour faire adhérer.

Le revival, pourquoi pas ? Les Strokes ou les White Stripes ont bien bâti leurs succès sur cet archétype. Ce qui est plus gênant, c’est lorsque ce revival est une conséquence et non une cause ; soit user du revival non par nécessité inhérente, mais par choix volontaire. Ce qui saute aux yeux est que tout, dans ce premier album, est calculé comme un pur produit mercantile. En soi, Reality Check est un modèle de produit marketing : toutes les chansons sont formatées entre 2’30 et 4’00, ni plus, ni moins ; tout est étiqueté indie à outrance, du revival new-wave, au bouche-à-oreille (via Myspace), en passant par l’adoubement de Kitsuné ; et enfin, le phrasé frenchy, so hot, d’expatriés en Grande-Bretagne, so hype. Ceci dit, en enlevant quelques éléments, on se retrouve avec les Arctic Monkeys ou les Klaxons sur les bras. Mais que reste-t-il de nos amours ? Que reste-t-il de la fraîcheur des premiers émois ? Un album de remplissage, quelques cimes culminant au-dessus de vides abyssaux. Des thèmes aussi aguicheurs que médiocres ("Streets Of Paris", "French Kiss"). Des sous-productions lacunaires passant sous la convenance du sacro-saint DIY ("Make It Happen", "Sunset Beach").

Le seul moyen de pleinement apprécier ce Reality Check, serait de n’avoir écouté du rock qu’à partir de 1999, sans savoir ce qui a été fait avant. Sans savoir que les années 80 et les années 90 ont existé, sans savoir que les années 2000 ne font finalement que continuer dans cette lancée, sans savoir que Phoenix avait déjà rendu les français sexy dans le monde de la pop-rock anglophone. Sinon, mieux vaut se contenter de "Homecoming" et de "Starlett Johansson". En calculant de manière si indécente leur ascension, les Teenagers nous ont tout bonnement pris pour des cons. En négligeant toutefois un élément ne rentrant dans aucune stratégie marketing, mais à ne jamais sous-estimer : l’intégrité.
tracklisting
    01. Homecoming
  • 02. Love No
  • 03. Feeling Better
  • 04. Starlett Johansson
  • 05. Streets Of Paris
  • 06. Make It Happen
  • 07. Wheel Of Fortune
  • 08. Fuck Nicole
  • 09. Sunset Beach
  • 10. III
  • 11. End Of The Road
titres conseillés
    Homecoming, Starlett Johansson, Fuck Nicole
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