Neon Neon

L’efficacité du parti pris réside dans son occultation volontaire de toute rationalité artistique, faisant le choix de la transversalité que celui de la profondeur. En choisissant ainsi le thème des années 80, ses déviances, ses codes, son histoire et son héritage, le duo Bryan Hollon aka Boom Bip et Gruff Rhys des Super Furry Animals ont voulu dépeindre cette atmosphère si particulière de cette décennie décadente et ouvertes aux excès culturels en tout genre, période qui encore aujourd’hui trouve toute sa résonance. Selon leurs dires, Hollon et Rhys se seraient inspirés de la vie du playboy John Zachary DeLorean, créateur de la fameuse voiture du même nom, popularisée par la franchise des Retour Vers Le Futur de Zemeckis.

Dans ce Stainless Style, ainsi, tout est cliché assumé et tentatives de reconstitution d’un état d’esprit, d’effluves musicales d’une esthétique démodée mais loin d’être usée. Tout est ainsi mis en œuvre par les deux acolytes nostalgiques pour réinstaurer un monde aux prémices du mécanique et aux ambiances métalliques. Les chansons de Neon Neon sentent bon le road-trip sur une autoroute suspendue, dans une décapotable tunée, les lunettes sur le nez, les cheveux brushés volant au vent, avec comme bande sonore passant sur l’autoradio "Neon Theme" ou "I Told Her On Alderaan", aux influences branchées orientés vers "Rubicon" des parisiens d’Alan Braxe et Fred Falke ou de "Testarossa Autodrive" de Kavinsky.

Au sein de cet album, deux tendances nettes ressortent lorsqu’il s’agit soit de Boom Bip, soit de Gruff Rhys, aux commandes. Avec Boom Bip, la virée dévie vers le hip-hop et notamment vers du crunk endiablé et frénétique. L’Américain convie donc Naeem Juwan de Spank Rock et Sean Tilman pour un "Trick For Treat" ardent, tandis que Yo Majesty, sur "Sweat Shop", et Fatlip, sur "Luxury Pool", jouent avec les fétiches du rap gangsta et sudiste. En revanche, lorsque la main revient à Rhys, les mélodies sonnent plus pop, les envolées plus new-wave. On lorgne ainsi sur des rythmiques italo-disco sur les plus posées "Raquel" ou "I Lust You", où la voix désincarnée du chanteur des Super Furry Animals se superpose judicieusement.

Composé à quatre mains (aidées de plusieurs autres), ce Stainless Style permet aux deux de Neon Neon de composer la musique telle qu’ils auraient souhaité l’avoir entendue dans leur jeunesse, bande sonore sublimée dans leurs esprits, et qui les aura accompagné tout le long de leur carrière. Bien que réalisé avec réussite, cet album n’aura pas l’impact des influences qu’il est censé évoquer, et pour cause, évoluant en dehors du contexte auquel il se rapporte. Comme rire en repensant à une situation révolue, ou danser sur une musique jouant dans notre esprit, Stainless Style brille par sa fulgurance, mais également par son autisme. Les années 80 auraient probablement déchiré avec Neon Neon, (mal)heureusement, nous sommes en 2008.