logo SOV

The Big Pink

A Brief History Of Love

The Big Pink - A Brief History Of Love
Chronique Album
Date de sortie : 14.09.2009
Label : 4AD
3
Rédigé par Kris, le 22 septembre 2009
Bookmark and Share
Il aura fallu plus de quinze ans au shoegazing pour s’extirper de la confortable tombe que la musique populaire anglaise lui avait creusé. Il était fini le temps de l’abstrait, de l’expérimentation, et pourtant le genre s’était éteint en toute noblesse, en tant que précurseurs – désormais obsolètes – d’une frange musicale destinée à mourir. My Bloody Valentine, Ride ou Slowdive érigés comme monuments du patrimoine britannique, pour mieux les figer dans un passé révolu, semblaient pourtant être destinés à n’être qu’un épisode fulgurant de l’histoire de la musique. La reformation récente du plus chamanique d’entre eux, My Bloody Valentine, ne sera finalement qu’une cause directe d’un chamboulement des fondations de la création à l’anglaise.

The Big Pink, aujourd’hui, est en quelque sorte une synthèse parfaite et bien orchestrée de cette résurrection du shoegaze dans les garages et studios d’Outre-Manche. Ce qui a fait de ce duo londonien le candidat idéal à ce regain d’intérêt – les autres candidats sérieux ayant été les Ecossais de Glasvegas – est notamment cet aura qui entoure le groupe. Signés sur le prestigieux label 4AD, The Big Pink en adoptait également l’impact atmosphérique au vu de cette somptueuse pochette rappelant celles de This Mortal Coil ou Cocteau Twins, datant des premières glorieuses heures de la maison britannique. Mais surtout, A Brief History Of Love présentait le potentiel pour faire évoluer ce revival, aujourd’hui innocent, vers un genre transcendant et inconditionné.
A Brief History Of Love repose sur un paradoxe important. Tentant d’allier la dimension concrète du chant, alors utilisé comme instrument complémentaire dans le shoegaze, et la nébulosité du bruitisme inhérent au genre, The Big Pink s’aventure dans des contrées souvent hostiles et difficilement atteignables. Car Robbie Furze et Milo Cordell, les deux protagonistes du groupe, font partie de cette nouvelle génération redécouvrant un genre inconnu, à travers une subjectivité pop commune à nombre de leurs congénères (The Pains Of Being Pure At Heart, The Joy Formidable). Cette relecture contemporaine s’avère être un exercice périlleux, et plus important encore, demeure un antagonisme de l’esprit originel du shoegazing, censé se poser en opposition d’une pop pompière gangrènant les années 80 ; et qui, ironie du sort, aura finalement raison de ce mouvement avec l’avènement de la brit-pop.

Porté à bout de bras par les formidables et incontournables singles Velvet et Dominos, ce premier album des Big Pink est un melting pot audacieux, néanmoins pas toujours consistant. Les ambiances des différents épisodes proposés par A Brief History Of Love relèvent d’un assombrissement typique, cependant posés en oppositions à des mélodies rêches agrémentées d’instrumentalisations courbes et mordant (Dominos, Too Young To Love), inspirés des sonorités du XTRMNTR de Primal Scream. On atteindra même un point d’équilibre sensé, dénué d’effets envahissants, aux réminiscences Boo Radleys, sur la plaisante At War With The Sun. La seconde moitié de l’album sera nettement moins réussie avec des pastiches surchargés comme Golden Pendulum ou Frisk rappelant Kasabian, ou encore l’horrible Tonight dont on ne comprend toujours pas pourquoi elle figure sur le disque.
Sur le fond, A Brief History Of Love aurait pu être un album-jalon. Peut-être l’est-il. Mais dans sa forme, le manque de consistance dans les mélodies, les coups de génies d’un Dominos mesurant le gap avec le reste de l’album, font de celui-ci une déception à la hauteur du piédestal où on les avait placé. Pas même les effluves des guitares ne pourront venir pallier certaines carence mélodiques d’un groupe. Cette relecture pop, aussi impactante soit-elle, d’une mouvance passéiste manque de consistance, et surtout d’une plume. De celle qui véhicule des émotions pures. De celle qui vous happe, vous étouffe.

Le rock anglais expérimente de nouveau. Très bien. Laissons la pop s'insinuer dans les veines de cet ordre empirique. Démocratisons le diktat intellectualiste opaque sur le shoegaze. Oui. Mais avec grâce.
tracklisting
    01. Crystal Visions
  • 02. Too Young To Love
  • 03. Dominos
  • 04. Love In Vain
  • 05. At War With The Sun
  • 06. Velvet
  • 07. Golden Pendulum
  • 08. Frisk
  • 09. A Brief History Of Love
  • 10. Tonight
  • 11. Count Backwards From Ten
titres conseillés
    Velvet, Dominos, At War With The Sun
notes des lecteurs
notes des rédacteurs
Du même artiste