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Big Deal

Lights Out

Big Deal - Lights Out
Chronique Album
Date de sortie : 05.09.2011
Label : Mute
3
Rédigé par Fantin, le 9 novembre 2011
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Seuls quelques titres auront suffi à Big Deal pour s'imposer parmi les (trop) nombreuses formations sur le point d'éclore. Découvert il y a tout juste quelques mois grâce au prometteur Homework et à son songwriting touchant, le duo mixte aux compositions mélancoliques sortira, en janvier en France, un premier effort intitulé Lights Out.

Après un EP intitulé Chair le mois dernier, les deux londoniens livrent douze compositions folk aux accents pop et aux sonorités nineties. Correctement assemblées sous une même ligne directrice, celle d'une tristesse musicale contagieuse, ces œuvres personnelles parviennent à émouvoir et à faire jaillir en chacun des grands enfants qui les écoutent les symptômes d'une nostalgie pour une époque bénite, bien que souvent baignée dans la mélancolie : l'adolescence.
Avec des textes accessibles à toute personne ayant fait de l'anglais ne serait-ce qu'au collège, la voix de la belle Alice Costelloe nous conte des aventures émotionnelles adolescentes si touchantes par leur naïveté que l'on aimerait ne jamais avoir grandi. Ouvert sur la pop électrique de Distant Neighbourhood qui allie le son saturé du grunge à une composition folk qui serait toute aussi plaisante en acoustique, Lights Out emprunte aux années 90s et au minimalisme américain qui s'est vu proliférer durant cette décennie. Pas de batterie, pas de basse comme le veut la convention rock. Seules les guitares, bien que multiples, ainsi qu'une voix féminine séduisante et mélancolique, souvent supportée par un chant masculin qui sonne comme le réconfort d'une peine passagère.

Puisant dans des souvenirs profonds et dans un passé sentimental chargé, le duo revisite les frustrations amoureuses adolescentes non-oubliées de sa chanteuse. Armé d'une référence immuable et à jamais parlante (Nirvana ne sera certainement pas oublié une fois les vingt ans de son grand œuvre Nevermind célébré), Cool Like Kurt conte le chagrin d'un jour d'une jeune fille trop sensible et dont l'amour éprouvé pour un garçon « génial comme Kurt » semble à sens unique. D'autant plus touchant et à la limite du dépressif, Swoon perpétue cette difficulté émotionnelle ne serait-ce qu'à travers sa musique sombre et dénuée. C'est avec une boule dans le ventre que l'on jouit de ce morceau aussi sublime que bouleversant.
Ne venant pas guérir les tristesses acquises depuis le début du disque, c'est tout de même avec joie que l'on retrouve Homework : un titre d'une finesse exquise, épuré de la saturation qui a ouvert l'album. On retrouve la naïveté de Cool Like Kurt dans un thème que l'on pourrait moquer avec dédain et snobisme mal venus. On préfèrera se taire et en jouir, se demander pourquoi des paroles paraissant si évidentes et sonnant si parfaitement n'avaient pas été pensées auparavant : « Can't do my homework, can't concentrate...»

L'album pourrait se terminer ici, dignement, dans la subtile naïveté qui l'avait ouvert. Le duo londonien a malheureusement choisi de le poursuivre, choisi de transformer cette subtilité en clichés. « All I wanna do is talk » scande-t-elle à répétition sur le trop décevant Talk. Jouer à l'adolescent était ambitieux et bien-pensé. L'avoir fait tout en finesse est un fait d'arme remarquable. Il est dommage que Lights Out n'accomplisse pas cet exploit jusqu'à sa fin. Au lieu de cela, Big Deal tombe dans le dérisoire et se répète. Le refrain dispensable de With The World At My Feet et son riff trop facile sont de ceux-là, viennent casser la douce et correcte mélancolie qui avait plutôt bien débuté le titre.
Si Locked Up rattrape un peu la chose, il n'en est pas pour autant renversant et semble avoir déjà été entendu parmi les sept titres qui l'ont précédé. Un remake de Chair ? De Cool Like Kurt ? On y trouve un peu des deux mais malheureusement pas leur capacité à rester en tête après écoute. C'est ce pourquoi on peut remercier Summer Cold de sauver la mise avec sa pop envoûtante et majestueuse. Mais encore une fois, il est navrant de constater que ce songwriting plaisant et réussi est éphémère dans la désolante seconde partie d'un disque qui avait pourtant très bien commencé. À sa suite on retrouve le dispensable Visions qui pourrait bien être le fruit d'improvisation tant il est simpliste et paraît relever de l'amateurisme.

Si les deux derniers titres parviennent tant bien que mal à terminer l'album en beauté et si le talent du duo n'est pas à remettre en question, on est en droit de se demander si Lights Out n'a pas été fait dans la précipitation. Entre titres sublimes et chansonnettes dérisoires (pour ne pas dire pathétiques), c'est un disque bien inégal que livre Big Deal en guise de présentations. Heureusement, des compositions comme Homework, Swoon et Seraphine rendent compte d'une grande maîtrise dans l'écriture, et, surtout, d'idées judicieuses. A ceux qui cherchaient une définition au néo-folk, on peut aujourd'hui affirmer qu'il s'agit d'un songwriting folk classique à l'aspect simple mais juste, habillé avec les moyens d'aujourd'hui et brassé avec différentes influences. La pop bruyante américaine des années 90 et les sonorités californiennes n'avaient pas encore pas été mélangées de la sorte à des compositions intimistes. Voilà pourquoi l'on peut tout de même remercier Big Deal, malgré ce premier effort assez loin de la perfection. S'il faut se consoler de cette (petite) déception, on pourra aller écouter sur la page Myspace du groupe la jolie reprise de Thirteen, une délicate chanson enfantine écrite par le regretté Elliott Smith.
tracklisting
    01. Distant Neighbourhood
  • 02. Chair
  • 03. Cool Like Kurt
  • 04. Swoon
  • 05. Homework
  • 06. Talk
  • 07. With The World At My Feet
  • 08. Locked Up
  • 09. Summer Cold
  • 10. Visions
  • 11. Seraphine
  • 12. Pi
titres conseillés
    Swoon - Homework - Summer Cold - Seraphine
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