Chronique Album
Date de sortie : 11.08.2014
Label : Popping Candy
Rédigé par
Emmanuel Stranadica, le 2 septembre 2014
A l'annonce de la sortie du premier album solo de Grant Nicholas, on pouvait se demander vers quelle direction le leader de Feeder allait s'engager. En effet, les deux derniers albums du groupe londonien s'apparentaient davantage à une boue métal lourdingue plutôt qu'à une power pop de standing. Ce qui est en soit bien dommage quand on connait le talent de songwriter du bonhomme.
Cependant, c'est une tangente bien plus mélodieuse et délicate que notre homme a eu la bonne inspiration de prendre. Dès les premières notes de Soul Mates, on retrouve un Grant Nicholas apaisé. Clin d'œil possible à Taka Hirose, compère de toujours de leur groupe culte en Angleterre, la plage d'ouverture s'avère toutefois comme une bouffée d'oxygène pour le chanteur en solo. L'acoustique est de mise et la voix du gallois vient se poser en douceur sur les arpèges déployés pendant les trois minutes vingt de la chanson. Dans la très grande discographie de Feeder, on trouve déjà bon nombre de versions acoustiques sur les faces b de leurs nombreux singles. Si celles-ci pouvaient dépareiller avec le côté punchy de la plupart des compositions du groupe, force est de constater qu'elles font particulièrement sens aujourd'hui et démontrent le talent de celui dont le groupe n'a malheureusement jamais réussi à percer en France.
Après un début d'album délicieusement calme, Grant Nicholas renoue avec des mélodies aux sonorités davantage pop/rock, le temps d'un Robots et d'un Vampires, sans toutefois jamais sombrer dans les excès d'antan, et cela pour notre plus grand plaisir. On croit même entendre le fantôme de Nick Drake traverser Yorktown heights le temps d'un Good Fortunes Lies Ahead. La jolie Joan Of Arc évoque quant à elle le souvenir de Comfort In Sound, l'album le plus populaire du groupe. Le fait que celle-ci se situe au beau milieu du disque n'est probablement pas le fruit du hasard, et s'apparente bien au contraire comme un moment clé dénotant un désir d'expulsion de la noirceur profondément enfouie chez le compositeur. Le Hope qui lui fait suite en est d'ailleurs vraisemblablement une conséquence, consciente ou non.
La seconde moitié de Yorktown heights voit naviguer le quadragénaire entre moments intimistes (Silent In Space, Counting Steps), poignants (Father To Son) ou enjoués (Time Stood Still). Le disque se termine avec deux chansons complémentaires aux titres particulièrement évocateurs Silent In Space et Safe In Space. De là à dire que cet opus a eu des vertus thérapeutiques pour Grant Nicholas, il n'y a qu'un pas, même si en définitive seul l'artiste pourrait en répondre. Nous nous contenterons donc d'apprécier ses chansons à leur juste titre car elles ont le mérite de nous apporter un peu de soleil dans la grisaille décidément bien désespérante de cet été 2014.