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Baxter Dury

It's A Pleasure

Baxter Dury - It's A Pleasure
Chronique Album
Date de sortie : 20.10.2014
Label : [PIAS] Le Label
35
Rédigé par Olivier Kalousdian, le 13 octobre 2014
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« Je connais mes limites, c'est pourquoi je vais au-delà » . Serge Gainsbourg. Cette maxime, si on peut la qualifier ainsi, tirée des meilleures réflexions du maître du genre (et dont Baxter Dury est un fan reconnu), sied comme un gant au fils de Ian Dury. Un fils qui, depuis ses premiers albums et, notamment, le dernier en date, Happy Soup, se défait lentement mais sûrement de son héritage pour dépasser, ou presque, l'aura de feu l'ex leader des Blockheads.

Fort du succès indéniable de Happy Soup, précédent disque dont pas moins de trois singles se sont ironiquement glissés dans autant de publicités nationales ou internationales, Baxter Dury remet le couvert, trois ans plus tard, avec dix nouveaux titres. Nommé, avec une simplicité déconcertante, It's A Pleasure, cet album est un nouvel objet musical non identifié, tout droit venu de cette Angleterre sarcastique et pisse-froid ; l'Angleterre dans laquelle a grandi Baxter, entouré de ses plus célèbres représentants et qu'il affectionne au plus haut point.
Ce pince-sans-rire, roi du titre surréaliste à tiroir, nous offre un nouveau cru de sa belle cave, en cette fin d'année 2014. It's A Pleasure n'est pas encore officiellement sorti et fait déjà le buzz avec son artwork et sa photo mettant en scène Baxter Dury sortant de l'eau en compagnie d'un cygne ; le cygne, seul regardant l'acheteur dans le blanc des yeux. Et, déjà, des jeux sur les réseaux sociaux proposent aux fans de se mettre en scène à côté du cygne et de prendre la place du chanteur. Comme quoi, sur cette pochette n'est pas l'intrus qui l'on croit !

Séparé de de Madelaine Hart (partie en maternité après la tournée ayant suivi la publication de Happy Soup) qui officiait dans la réalisation et les chœurs du précédent album, Baxter Dury n'a pas pour autant abandonné l'idée du duo homme-femme qui fonctionne si bien dans la (dé)construction de ses titres. C'est avec de Fabienne Debarre, une parisienne issue du groupe We Were Evergreen, que Baxter applique aujourd'hui cette parité qu'il affectionne tant dans son univers musical.
Signé sur une nouvelle maison de disques, PIAS Le Label, Baxter Dury explique ce choix par la revente de Parlophone, après la sortie de Happy Soup. Plus qu'un choix artistique au sens propre, il s'agit là d'un choix de cœur après la rencontre de la branche française de PIAS qui a immédiatement montré un grand intérêt aux premiers titres envoyés à Paris, par l'artiste.

Un album épileptique, composé de dix titres enregistrés dans de nombreux endroits, dont l'Angleterre, la Belgique et un mix à New York (qui n'a pas donné le résultat attendu, selon l'intéressé). Le tout, pour un univers pop acide indéfinissable, teinté de sonorités électroniques répétitives et enfantines (Pleasure) qui impose une architecture musicale quasi-berlinoise à ce titre et à beaucoup d'autres. Sur ce premier morceau, Baxter Dury affiche un ton narquois et marque définitivement l'histoire des auteurs rock en inventant le terme « Ferrero Rocher Prostitutes ». Selon Baxter, un homme ou une femme jouant la mascarade de la superficialité et que l'on croise, généralement, aux soirées de l'Ambassadeur. Il avoue en faire lui-même partie, quelquefois...
La nostalgie du titre suivant, Palm Trees, dont la basse en avant (une marque de fabrique) remet le fils prodigue sur les rails d'une pop Anglaise faussement sucrée vaut, notamment, pour son beau refrain doublé de la voix de Fabienne Debarre : « Pense-t-elle vraiment être si spéciale que cela ? (assise sur son palmier) ? ». Un des titres les plus excitants de l'album, grâce, également au ton totalement désespéré dans la voix d'un Baxter Dury qui, comme à son habitude, déclame plus qu'il ne chante. Sur Other Men's Girls, on imagine aisément le plaisir coupable que prend Baxter Dury à inventer des titres aussi provocateurs. Bienheureux celle ou celui qui déchiffrera les paroles de ce titre, tout en douceur, où le seul gimmick de fin occupe le tiers du temps d'écoute. Petit frère du précédent dans sa construction, une touche de cordes californiennes en plus.

Il faut attendre Police pour retrouver un peu d'agitation. Une agitation réellement vécue par son auteur alors que sa voisine de palier a pris la sale habitude de lui envoyer la police quand la musique s'échappe, avec force de son appartement de Londres. Il faut dire que, jouer une partition d'Elton John à la batterie dans un appartement au centre ville... Du Baxter Dury, tout craché ! Mais, le titre qui élève l'album au niveau des meilleures pistes de Happy Soup est sans nul doute Whispered. A contre-courant des autres titres de It's A Pleasure et proche d'un Trellic par son côté dansant et entêtant, Baxter Dury livre une composition hypnotique aux sonorités bouclées empruntées à Giorgo Moroder, époque Midnight Express. L'apport de Fabienne Debarre aux claviers est essentiel et procure à ce titre une nouvelle dimension : le morceau s'envole à partir de la deuxième minute pour entamer un italo disco agrémenté de chœurs féminins et d'onomatopées susurrées par Baxter Dury. Les textes sont non linéaires car leur utilisation est plus mélodique que littéraire chez Baxter Dury.
Si les boîtes à rythmes (ainsi que la partie basse), souvent simplistes sont ici omniprésentes, ce n'est pas par radinerie ou complaisance. Elles sont à l'image du flow de l'artiste : comme lui, elles se programment pour aller à l'essentiel en tapant là où ça fait mal ; en répétant, jusqu'à plus soif un tempo, parfois facile, mais qui fait briller la déconstruction savante d'une pop Anglaise qui se réinvente au fil des productions de Baxter Dury. Ce ne sont justement pas les constructions ou les débauches de talent individuel qui font les succès de ses titres et de ses disques, mais bien cette alchimie corrosive qu'il met en branle, avec ses musiciens, pour porter loin au-dessus de la mêlée, cette poésie très personnelle et provocatrice pour un récital, que certains disent lo-fi, aussi déconcertant que réussi. Pour preuve, le premier vidéo-clip issu du titre Pleasure mettant douteusement en scène un Baxter échappé de l'hôpital psychiatrique, une blouse blanche maculée de jaune devant et marron derrière, courant dans les rues de Londres tel un fou en liberté. Lui même l'avoue en interview : « Il faudra, un jour, que j'aille m'allonger sur le divan du psychiatre pour faire le lien entre tous les conneries qui passent par ma tête ! ».

L'occasion, sûrement d'en tirer un bilan personnel saugrenu et un nouvel album de choix.
tracklisting
    01. Pleasure
  • 02. Palm Trees
  • 03. Other Men's Girls
  • 04. Police
  • 05. Lips
  • 06. Whispered
  • 07. Petals
  • 08. White Men
  • 09. Wintery Kisses
  • 10. Babies
titres conseillés
    Whispered - Pleasure - Palm Trees - Winter Kisses
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