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The View

Ropewalk

The View - Ropewalk
Chronique Album
Date de sortie : 11.09.2015
Label : Cooking Vinyl
5
Rédigé par Xavier Turlot, le 7 septembre 2015
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Fidèles à leur productivité, The View sortent déjà leur cinquième album en ce mois de septembre. Cet opus produit par Albert Hammond Jr, le guitariste des Strokes, s'intitule Ropewalk et explore des voies plus minimalistes et soignées que ce à quoi les quatre Écossais nous avaient habitués. Après le formidable Cheeky For A Reason, du pur rock british brillant et inspiré, la barre avait été mise à un niveau impressionnant...

Dès le premier single, Marriage, on sera étonné par le choix esthétique épuré à l'extrême. La voix si typée de Kyle Falconer est d'un calme frappant qui lui permet de descendre sur des notes inhabituellement basses. Une batterie au son synthétique, une basse toute en finesse et une ligne de guitare enlevée viennent construire ce morceau d'une subtilité inattendue. La présence de Justin Gerrish, l'ingénieur du son de Vampire Weekend, n'y est probablement pas pour rien. L'importance des chœurs et de la guitare acoustique est marquante, et sera tout aussi vraie sur Under The Rug, le second single un tantinet plus rock et plus classique mais quand même très éloigné d'un How Long ou d'un Superstar Tradesman...

Pour autant l'écriture de tubes ne s'est pas affaiblie, le sens du refrain accrocheur et des transitions naturelles est intact, The View ont juste voulu quelque chose de plus moelleux et de moins garage, un disque où il sera plus facile d'apprécier les subtilités instrumentales et vocales. Des morceaux comme Talk About Two ou House Of Queue's sont des chefs d'œuvre indescriptibles qui s'inscrivent complètement dans cette démarche. Les parties vocales en sont la moelle épinière et jaillissent du mixage sans timidité, avec un travail remarquable sur les polyphonies et la pertinence des instruments employés (synthétiseurs, violons...). La voix lumineuse du leader est toujours aussi originale et bluffante, adoptant des textures et des intensités diverses jusqu'à se perdre dans des vocalises suraiguës...

Les nostalgiques de côté garage rock du quatuor n'auront pas grand-chose à se mettre sous la dent. Tenement Light en adopte beaucoup les codes mais prend le temps de passer par un intermède folk très Oasis/Pink Floyd ; Living a aussi un grain très british mais son tempo reste très limité et les variations mélodiques du chant sont encore une fois extrêmement soignées. On remarquera d'une manière générale que les synthétiseurs sont à la fois discrets et omniprésents sur Ropewalk, alors que jusqu'ici le groupe s'était toujours passé de la moindre électronique. Ainsi une soyeuse basse ronronnante vient servir de matelas à l'entêtante Psychotic et comme sur l'ensemble des morceaux cette innovation trouve tout son sens par sa subtilité. A aucun moment le son du groupe n'est dénaturé ou dévoyé, les guitares ont toujours la part belle et mènent à presque tous les moments. Sur l'étonnante et géniale Cracks, Falconer décide de scander les couplets plutôt que de les chanter, avant d'arriver sur un refrain fantastique soutenu par un déluge de saturation parfaitement maîtrisé : la bonne dose de folie au meilleur passage de l'album, on pense à une sorte de Big Sky des Kinks en accéléré... Même relâchement sur Penny, un beau bordel blues joué au piano et qui part dans un énorme boucan où tous les membres du groupe partent très loin dans leur délire.

Voodoo Doll, la conclusion du disque, est un tube en puissance et l'une des meilleures pistes. Évoquant Slade avec cet aspect folk rock et ce léger delay dans le chant, son refrain est anthologique dès la première écoute. C'est le genre de morceau inattendu qu'on relance immédiatement pour être sûr qu'on ne s'est pas fait abuser par nos sens. C'est là un hommage vibrant aux années 1970, superbement construit et sans aucun détours. Le solo de guitare complètement délirant est affublé d'un effet non identifiable qui se déverse des enceintes comme un coulis de décibels mielleux.
The View signe ici un album parfait, à la fois ancré dans son histoire et opérant un léger changement d'esthétique bienvenu. L'écriture toujours aussi impeccable s'est encore un peu plus étoffée grâce à un minimalisme dans la production qui permet aux instruments de plus respirer. Le groupe de Dundee nous donne déjà implicitement rendez-vous dans deux ans pour la poursuite d'une des carrières les plus intéressantes du rock anglais contemporain.
tracklisting
    01. Under The Rug
  • 02. Marriage
  • 03. Living
  • 04. Talk About Two
  • 05. Psychotic
  • 06. Cracks
  • 07. Tenement Light
  • 08. House of Queue's
  • 09. Penny
  • 10. Voodoo Doll
titres conseillés
    Talk About Two, Marriage, Voodoo Doll
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