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Placebo

MTV Unplugged

Placebo - MTV Unplugged
Chronique Album
Date de sortie : 27.11.2015
Label : Universal
25
Rédigé par Hugues Saby, le 15 décembre 2015
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Ah, Placebo. Voilà un groupe très cher à mon cœur d'éternel adolescent, que j'ai vu peu à peu changer, se déliter, et, comme beaucoup d'autres de mes idoles, sombrer.

Bien sûr, on peut rire de Brian Molko, de son image androgyne et malsaine savamment entretenue, de sa voix nasillarde, de son public à fleur de peau, de bien d'autres choses encore, qui tendraient à faire croire que Placebo est une passade, un groupe mineur pour teenagers emo mal dans leur peau. Beaucoup de gens ne s'en sont d'ailleurs pas privés au cours des deux décennies d'existence de la formation britannique. C'est pourquoi, indépendamment et avant toute critique de ce MTV Unplugged, je tiens à mettre quelques points sur quelques i. D'abord, Placebo, le vrai Placebo, est mort avec le départ de Steve Hewitt en 2007. Ensuite, l'image, le public, on s'en fout, et si l'on devait compter le nombre de groupes au look ridicule ou qui parlent à une catégorie bien déterminée, et qui ont fait leur place au panthéon du rock'n roll, on ne serait pas sorti, et je suggère aux grincheux de se regarder quelques photos de Robert Smith pour s'en convaincre. Enfin, les deux voire trois premiers albums de Placebo ont laissé une trace indélébile dans l'histoire de le musique moderne. J'irai même jusqu'à dire que Without You I'm Nothing, sorti en 1998, un an à peine après OK Computer, s'est fait voler sa place par ce dernier, dont on nous a rebattu les oreilles jusque... Eh bien jusque maintenant. Le deuxième album de Placebo est un chef-d'œuvre absolu, une odyssée chimique et vicelarde dont on reconnaitra un jour l'influence considérable sur des générations entières, dans une époque lointaine et meilleure ou peut-être, aussi, on fera redescendre l'album de Radiohead de son intouchable piédestal. Plus encore, le titre éponyme, dont une version vertigineuse a été enregistrée avec David Bowie, est l'une des plus grandes chansons de rock'n roll jamais écrites, l'une des plus grandes chansons tout court. Poètes maudits de tous les pays, ce disque devrait figurer en première place sur vos étagères, juste à côté de votre édition originale des Fleurs du Mal.

Bien. Ceci étant dit, nous somme conséquemment face à un problème inchangé : il nous faut chroniquer un live acoustique d'un groupe un temps majeur dont la substance à péri voilà dix ans bientôt, et qui s'est depuis joyeusement vautré dans tout ce qu'on lui reprochait, oubliant au passage son incandescence romantique, sa rage viscérale et son génie tourmenté ; ne survivant que grâce à l'écriture ici et là de rares pépites, maigres soubresauts de l'étincelant génie passé. La hiérarchie des titres retenus pour ce live est d'ailleurs significative : un seul du premier album, deux du deuxième, un seul du troisième. Et pas moins de quatre du dernier, qui fait de la peine avant même de l'avoir écouté, dont l'horrible Too Many Friends, chanson moisie sur l'enfer de Facebook qui commence par cet hideux incipit : « My computer thinks I'm gay ». OMFG. N'enfonçons toutefois pas le clou plus loin qu'il ne l'est déjà : il y a aussi du bon sur cet album. Pourtant, la voix métallique si particulière de Brian Molko ne se prête pas toujours bien à l'exercice acoustique. Elle est même particulièrement désagréable lorsqu'elle se fait trop emphatique ou trop plaintive, comme sur la reprise d'ouverture Jackie, mais aussi sur Meds, Loud Like Love, Hold On To Me et enfin Bosco, qui interprètent malheureusement « débranché » comme signifiant « avec des tonnes de cordes et de pianos larmoyants ». Protect Me From What I Want (très beau duo tout en dissonances avec Joan As Police Woman), Slave To The Wage, Without You I'm Nothing (dont les arrangements sont sublimes de justesse et de tension) et la reprise de Where Is My Mind (de longue date l'un des meilleurs moments des sets de Placebo) ne tombent pourtant pas dans ce piège. À quoi tiennent les choses, je vous le demande. La réponse est simple : à la puissance des compositions. Quand elle est présente, comme c'est le cas sur ces derniers titres, le concert acoustique est une franche réussite, et ce MTV Unplugged offre de très beaux moments. C'est aussi le cas sur cette version lente mais très rythmique jouée à la guitare sèche de Every You Every Me, en duo avec la chanteuse danoise Majke Voss Romme (qui en fait un peu trop, mais bon). Les quelques tubes présents (Song To Say Goodbye, The Bitter End) sont eux joués dans des versions pop FM assez fidèles aux originaux. On regrette énormément l'absence de titres qui semblaient par essence destinés à ce concert, notamment My Sweet Prince et bien sûr Blue American et sa candeur pyromane.

C'est donc du 50/50 pour cet opus live, qui démontre presque mathématiquement que son succès ne tient ni à la qualité des arrangements ni au talent d'interprétation, mais bien à ce qui habite les musiciens présents sur scène. Parfois, Brian Molko semble retrouver son âme d'autrefois en jouant les anciens morceaux qu'il a composés sur une moitié de l'album. L'autre moitié est quant à elle à l'image de ce qui reste de Placebo : inintéressante, un peu pathétique, morte.
tracklisting
    01. Jackie
  • 02. For What It's Worth
  • 03. 36 Degrees
  • 04. Because I Want You
  • 05. Every You Every Me
  • 06. Song To Say Goodbye
  • 07. Meds
  • 08. Protect Me From What I Want
  • 09. Loud Like Love
  • 10. Too Many Friends
  • 11. Post Blue
  • 12. Slave To The Wage
  • 13. Without You I'm Nothing
  • 14. Hold On To Me
  • 15. Bosco
  • 16. Where Is My Mind
  • 17. The Bitter End
titres conseillés
    Protect Me From What I Want, Without You I'm Nothing, Where Is My Mind
notes des lecteurs
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