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The False Foundation

Archive - The False Foundation
Chronique Album
Date de sortie : 07.10.2016
Label : Dangervisit Records
4
Rédigé par Olivier Kalousdian, le 14 octobre 2016
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En ces temps là, il n'y avait rien, ou plus grand chose. Le rock se faisait hara-kiri en ovationnant des groupes comme Guns'n Roses et la synthpop anglaise finissait de déverser ses barils de glucose sur les murs réfractaires de l'Haçienda d'où le futur résonnait déjà de manière stupéfiante. Et puis, bang ! Venu de Bristol et des sous-sols de Londres, le trip-hop accouchait dans la douleur d'un monde poisseux aux odeurs d'urine et de cataclysme social post-Thatcher, non digéré. A l'ombre de ses cousins du sud, le jeune Darius Keeler, vite rejoint par Danny Griffiths et Rosko John, va commettre l'imparable (20 ans après, c'est toujours une référence) Londinium, premier album du collectif que deviendra bientôt Archive.

Depuis vingt ans (le groupe les a fêtés cette année), les douze membres, passés ou présents d'Archive ont effleuré de nombreux courants rock, passant du krautrock au rock progressif pour se perdre, parfois, dans de lumineuses contrées pop rock, plus abordables, mais toujours recherchées et sans jamais perdre cette autorité qu'imposent les compositions torturées et les textes au cordeau de la bande à Darius Keeler et Danny Griffiths.
Stakhanovistes de la musique s'il en est et après le très rock, Restriction (l'album bi-annuel du groupe) et la tournée qui s'ensuivit en 2015, Darius Keeler nous avait laissés entendre qu'il était temps pour lui de renverser la table et de revenir se balader autour des sources chaudes et toxiques qui l'avaient vu naître, artistiquement parlant. La page blanche. Un piano et une voix. C'est dans un style totalement dépouillé que démarre The False Foundation sur le fragile Blue Faces. On est sans voix à l'écoute de cette complainte quasi acoustique, Darius Keeler seul au piano et ses harmonies (et, finalement, quoi de plus normal pour un amoureux de la musique classique) accompagné de la voix de Pollard Berrier, jusqu'à ce qu'à la cinquième minute les machines électroniques et leurs sonorités plus inventives que jamais entament leur travail de sape et enclenchent un escalier mécanique de type berlinois. Elles ne s'arrêteront qu'à la fin du tracklisting de l'album qui comporte dix titres dont beaucoup, comme souvent, dépassent les sept minutes de liturgie errante, entre, pop rock et trip-hop, trance et électro industrielle.

Le titre Driving In Nails avait squatté nos réseaux Internet dès la fin de l'été en guise de teaser et on y découvrait un Archive nouvelle ère, en line-up très restreint et dans une veine électro torturée sans paroles ou presque, qui renvoyait aisément à du Trentemøller et à l'âge d'or de l'électro industrielle. Et on redoutait, finalement, un album totalement voué aux beats lourds et aux compositions instrumentales.
La surprise fut douce, lorsque pendant la soirée de lancement de l'album du 6 octobre dernier aux Studios Ferber à Paris, l'écoute complète de The False Foundation laissait découvrir des titres aussi diversifié et réussis que The False Foundation, l'éponyme mêlant le tempo effréné du titre The Chairman (du duo Birdpen) agrémenté de sonorités que l'on jurerait issues de la B.O de Tron Legacy ou A Thousand Thoughts et ses choeurs à la Beatles version Abbey Road. Puis, Stay Trible renverse à nouveau la tendance et impose un rythme syncopé et des sonorités recherchées et remuantes qui ne déplairont surement pas à Karl Hyde et son acolyte de Rick Smith.
Fermant la marche, The Weight Of The World, qui rassure, si besoin était, sur la qualité, le réalisme et la noirceur toujours progressifs des textes de Dave Pen et Pollard Berrier, est sûrement le plus surprenant et le moins attendu des titres de part l'empreinte qu'il impacte dans l'inconscient avec sa mélodie plus facile et son refrain chorale. Avec un pont en mode ragtime, The Weight Of The World s'imposera, pour les fans les plus chagrins, comme la comptine d'Halloween pour enfants sous Deroxat.

Alternant avec grâce les chrominances de la sombre ruelle d'un soir de brume à la lumière crue d'un matin d'hiver d'un Londinium des années 90, The False Foundation, dans une formation très resserrée renoue avec l'ambition du clair obscur et cette légère folie créatrice, sans jamais sombrer dans le « fourre- tout », que Darius Keeler avait su mettre en branle dès 1996 en offrant un premier album resté culte dans le courant trip-hop. A l'instar de ce dernier, le doute subsiste quant aux interprétations live des titres de The False Foundation et on comprend mieux le choix de Darius Keeler et Danny Griffiths, comme à l'époque d'Axiom, d'organiser une tournée 2016/2017 qui, majoritairement, se jouera en salles assises et en version studieuse. Le pari était osé mais il faut parfois savoir renverser l'ordre établi pour retrouver en soi le feu qui anime cette passion qui consume et relie Archive et son public depuis plus de vingt ans.
tracklisting
    01. Blue Faces
  • 02. Driving In Nails
  • 03. The Pull Out
  • 04. The False Foundation
  • 05. Bright Lights
  • 06. A Thousand Thoughts
  • 07. Splinters
  • 08. Sell Out
  • 09. Stay Tribal
  • 10. The Weight of The World
titres conseillés
    The False Foundation - The Weight Of The World - Stay Tribal
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