Afin de rester dans les musiques atmosphériques, nous nous rendons ensuite devant The Phantom Band. Dès le début de leur set, nous sommes subjugués par la construction intelligente de leurs morceaux : tous les instruments, aussi atypiques soient-ils (clavier à souffleries, bâtons en bois...), s'ajoutent progressivement à chaque morceau. On sent que les six écossais sont des perfectionnistes. Aucune sonorité ne vient en perturber aucune, tout étant calculé au millimètre, pour nous donner une pop progressive influencée par de nombreux courants (folk, grunge, post-rock...). La scène de Glasgow émane de leur musique, mais avec une pointe plus personnelle. Malheureusement pour eux, le public amateur de musique simple et efficace présent ce soir là n'adhère pas à leur complexité et la fosse se vide petit à petit. Les musiciens semblent désabusés par cette désaffection du public, mais ils tiennent leur poste jusqu'au bout. Il est vrai qu'il manque peut-être de la puissance à leur musique pour qu'ils puissent s'imposer en festival, mais malgré tout, ces gaillards, qui ne font que dans la simplicité, méritent une scène plus taillée à leur talent, pour prouver à tous que leur musique technique vaut le détour.
Grâce à la présence (dispensable) de « Renan Luce » sur la scène principale, une pause nous est enfin offerte pour reprendre des forces avant la dernière ligne droite nous attend, notamment avec The Jim Jones Revue. C'est en effet un réel plaisir de revoir les CINQ anglais sur les planches. Dès les premières notes de leur fameux « rock'n'roll old school », le public entre en transe. Leur rockabilly teinté de punk, des plus efficaces, fait mouche auprès de toutes les générations de festivaliers. Pour la première fois du week-end, l'ensemble du public prend un plaisir partagé. Le groupe le lui rend bien en enchainant les morceaux à une vitesse folle. Rupert Orton, à la guitare, en profite allègrement en nous gratifiant de nombreuses poses épiques, contribuant largement à faire monter la température d'un cran. Rarement un concert se sera écoulé si vite. Les principaux détracteurs du groupe leur reprochent de copier Little Richards, et s'il est vrai que Jim Jones et ses compères n'ont rien inventé, ils le font extrêmement bien. Réussir à faire revivre une musique que tout le monde croyait morte, et faire danser dessus des milliers de personnes de tous les âges est déjà une belle performance en soit.
Pas le temps de se remettre de cette performance de haut niveau que The Black Keys attaquent leur set, attendus de pied ferme par une assistance compacte. Après avoir pris successivement une leçon de grunge et de rock'n'roll avec Chokebore et The Jim Jones Revue, il est temps à présent de se plonger dans le blues. Les deux américains proposent en effet un set accrocheur nous rappellant les White Stripes, et pas uniquement en raison de la formation batteur/guitariste-chanteur . Si leur show n'est entaché d'aucune fausse note, il manque cependant un brin de folie et d'improvisation pour nous scotcher vraiment. La configuration festival avec une grande scène en plein air ne leur convient pas forcément, peut-être serait-il préférable de pouvoir les découvrir vraiment dans une ambiance plus intimiste.
Nous délaissons la fin de leur set pour découvrir Invasion et leur rock heavy made in UK. Premier constat difficile pour les trois anglais : pour leur entrée sur scène, nous ne sommes pas une dizaine pour les accueillir. Pas l'idéal pour se mettre dans le bain, d'autant plus que le son est tellement mal réglé qu'il est impossible de découvrir la voix pourtant prometteuse de la charismatique chanteuse Chan. Cette dernière, cachée sous une tunique rouge, se donne du mal pour se faire entendre, mais la puissance de la guitare couvre ses cordes vocales. Leur musique semble pourtant plutôt originale mais, agacé par cette frustration de ne pouvoir l'entendre, j'abandonne la scène après deux titres, espérant pouvoir les revoir prochainement dans de meilleures conditions pour confirmer ce potentiel prometteur.
C'est sur cette dernière folie que s'achève cette 27ème édition du Rock Dans Tous Ses Etats. Grâce à une météo parfaite et une programmation de bon goût, le festival confirme sa position dans le peloton de tête en France en conservant sa ligne de conduite et sans tomber dans la facilité d'un line-up commercialement rentable mais sans aucune originalité. Espérons que la présence de Renan Luce sur l'affiche ne soit pas un signe annonciateur des années à venir !