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Solidays

Paris, du 25 au 27 juin 2010

Live-report rédigé par Olivier Kalousdian le 6 juillet 2010

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Chaud, très chaud le soleil de cette fin juin : le goudron, comme le mascara des ados et des pré-ados ayant passé la nuit sous des tentes alignées comme à la parade et affichant surement des températures supérieures à 40°, fond à vue et coule en trainées noires sur les visages fatigués.

C'est le deuxième jour de marathon musical à Solidays et le moins qu'on puisse dire, c'est que le climat y est bouillant. Les lignes d'attente de la foule sur plusieurs centaines de mètres se sont un peu atténuées, maintenant que la majorité est installée soit sur le camping officielle soit directement dans le bois de Boulogne, et le sol crisse des milliers de canettes, bouteilles et autres flyers abandonnés durant ces week-end de relâche rock & roll, inévitablement. Inévitablement ? Pas si sûr...
Si le premier cordon de sécurité est facilement dépassé, un entonnoir se forme au niveau de la fouille et, en plein cagnard, nous sommes des milliers à avancer au pas d'une oie shootée aux opiacés, mêlant nos sueurs, nos anecdotes de la veille ou nos histoires des concerts de la veille.

Un nom pareil suffirait à faire écrire de mauvaises critiques, un jour d'humeur un peu massacrante ! Ne surtout pas se fier au visage angélique de T'Nealle Worsley, tête pensante des exceptionnels néo-zélandais de Bang Bang Eche : derrière le poupon vit un démon. Quand il explose avec ses camarades, cela donne une version TNT de Hadouken! ou des Klaxons, un électro-rock joué pied de plomb au plancher, des morceaux à danser la tête à l’envers, à slammer dans la sueur et à pogoter dans la bonne humeur. Du bonheur sous la tente Domino, par 45° sans aucune brise, à part celle des effluves d'herbes...
Surement pas la transition la plus facile à effectuer, nous arpentons les 500m qui séparent la tente des Bang Bang Eche jusqu'à celle sous laquele va se produire Vanessa Paradis, 37 ans affirmés. A ma grande surprise, une mixité de fans allant des rockers avec flasques de Jack Daniel's aux midinettes plus attendues se pressent sur la pelouse qui borde le chapiteau; lui-même plein à ras bord d'une foule curieuse de voir comment s'en sortira une pop singer au milieu de ce Solidays de plus en plus rock. Toujours habitée d'une grâce qui pourrait rendre jalouse plus d'une quasi-quadra, elle apparaît sur l'écran géant placé à l'extérieur, bien plus rapidement que sa voix, toujours fluette, nous atteint. Entourée d'une formation de cordes, de cuivres et de claviers, elle entonne quelques titres attendus dans des versions quasi acoustiques, telles qu'elle les affectionne dans sa tournée de l'année. Sensuelle, charmeuse et surtout proche de son public, de ses publics, Vanessa Paradis enchante même les plus durs et les moins réceptifs, pour quelques chansons au moins...

 

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Voici venu le tour de quatre (petits) garçons qui, il y a quelques années déjà, ont soufflé dans le sens du vent du renouveau rock de la scène Parisienne, et qu'on a du mal à distinguer du haut de leurs mètres soixante sur une des deux scènes les plus imposantes de Solidays. Sortis de l'anonymat avec d'autres formations d'ile de France (même s'ils sont d'Angers) comme les Plasticines ou les Naast, les BB Brunes ont accroché le wagon des nouveaux blousons noirs, plutot Zadig et Voltaire que Perfecto, et quelques hits comme Houna ou La La Love You. Rock candide pour certains, le style des BB Brunes n'a rien de contraignant et s'adresse à la majorité ; jeune et féminine de préférence ! Appuyant exagérément sur leur coté post-adolescents séducteurs aux regards noirs comme leurs lunettes de soleil, ils ont le mérite de rafraichir une pelouse défoncée et à la limite de la désertification où se mêlent les fans assis, un joint à la main ou ceux debout, les mains jointes en cœur. Trop attendus, trop sages scéniquement parlant, ils rodent leur tournée estivale des festivals qui va s'égrener tout autour de la France.

 

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Pour ceux qui considéreraient Vanessa Paradis comme le summum du kitsch sur le Festival Solidays, que dire de l'invitation faite à Yvan le Bolloch et son ensemble de cordes flamencos, Ma Guitare S'appelle Reviens !? Dans l'esprit d'Yvan, personnage mythique et intègre dans une production télévisuelle française moribonde, se bouscule des adages; « à cœur vaillant rien d'impossible » et « quand j'ai une idée dans la tête, je l'ai pas ailleurs » ! C'est un peu de la sorte qu'est né ce projet totalement insoupçonnable de voir un animateur, comédien, auteur... à certain succès prendre le risque, inconsidéré de monter un groupe de flamenco sur une rencontre d'un soir d'été.
Remontant d'un tournage dans le midi, Yvan et sa femme se reposent dans une pizzéria douteuse sur la N45 quand il entend jouer deux musiciens Flamencos extrêmement talentueux, dont l'un est le cousin des Gypsy Kings. Il n'en fallait pas plus pour qu'Yvan mette en route son projet, lui qui pratique et affectionne l'instrument et la communauté gitane depuis des années. Entrecoupé de ses interventions qui lui ont valu sa réputation de gai luron à la TV, le concert est à l'image du climat de ce week-end de festival, chaud comme une nuit Sévillane en plein mois d'aout...

 

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Que dire sur Toots & The Maytals, ce groupe trentenaire, qui n'aurait pas encore été dit ? Présente depuis 1960 (!), la formation de musique Gospel, Ska, Soul, Reggae et Rock issue de Jamaïque a connu toutes les époques et les groupes légendaires depuis quarante ans ! Produits en 1966 par le mythique Prince Buster (oui, celui que chante Madness), leur plus gros succès restera surement l'incontournable Pressure Drop, repris maintes fois, y compris par The Clash, c'est dire le respect que peuvent susciter les Toots & The Maytals auprès d'une foule nombreuse et hétérogène âgée de sept à soixante dix sept ans !
Le meilleur hommage est là, devant nos yeux, dansant et chantant sous le soleil finissant mais encore brulant, du bord de la scène jusqu'à l'extrême limite de portée des murs d'enceintes; jeunes, moins jeunes, parents trentenaires accompagnés de leurs deux enfants de dix et douze ans sautant pieds nus au son des chœurs gospel... la communion est totale, notamment sur un Monkey Man affichant plus de six minutes au chronomètre du régisseur inquiet pour le prochain groupe !

 

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« La nuit promet d'être belle, car voici qu'au fond du ciel, apparaît la lune rousse... ». Il est 23h, la lune est haut dans le ciel et affiche, effectivement, des reflets roux au dessus de la scène Paris... A l'instar de Toots & The Maytals, mais sur un plan national, difficile de parler de Jacques Higelin sans risquer de répéter et de paraphraser quelques talentueux critiques musicaux...
A soixante-dix ans au compteur, Frère Jacques, comme l'appelle la foule qui trépigne de ne pas voir arriver son idole et chante à tue tête la comptine enfantine, pensant le faire débouler plus vite, Jacques Higelin est un phénomène Français, à l'instar de sa sœur spirituelle, Brigitte Fontaine. Anarchiste, révolutionnaire, anti-conformiste, Higelin l'a toujours été et ce n'est pas son age canonique qui va y changer quoi que ce soit. N'entrant sur scène qu'à l'arrêt de la comptine s'élevant d'un public qu'il va faire attendre plus de quinze minutes après l'heure prévue, il engage le combat sur un tirade anti-gouvernementale, citant, sans le nommer, le personnage installé au sommet de l'état qu'il vilipende sur les thèmes du capitalisme et du cynisme, portés, selon lui, à leurs paroxysmes depuis deux ans. Il en appelle à la Révolution et au redressement des minorités, chauffant à blanc, si besoin en était, une foule complétement acquise, toutes générations confondues.
Un Champagne mémorable joué seul au piano pendant huit minutes sur un tempo constamment décalé, aidé uniquement en cela par son double mystique, le percussionniste Dominique Mahut, dit « sa sainteté », il étonne encore et toujours par son aisance à l'improvisation et pour redéfinir sans cesse les limites de ses propres succès, repris en chœur par un public connaisseur et aimant.
Comment ne pas aimer cet artiste engagé en ces temps d'égoïsme ? Rattrapant son retard de belle manière en osant les rappels là où les festivals ne le permettent guère, nous aurons encore droit à une leçon de courage, discourant nerveusement sur scène et appelant à ne pas laisser progresser les idées nauséabondes qu'il a combattues toute sa vie.

« Pars, et surtout ne te retourne pas », nous chante-t-il avant de se retirer définitivement; ma voisine trentenaire écrase une larme en reprenant ce refrain parachevant un autre concert historique du plus vieux descendant de la bande à Bonnot !
artistes
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