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Paléo Festival

Nyon, du 20 au 25 juillet 2010

Live-report rédigé par Aurélien le 24 juillet 2010

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Grand soleil, encore, pour la deuxième journée passée au Paléo Festival. Nous sommes mercredi et le mercure affichera, jusqu’à une heure avancée, des niveaux caniculaires, dépassant facilement les 30°c. L’effet chaleur est bien sûr à mettre sur le dos de la météo, mais pas seulement, car la programmation d’aujourd’hui nous réservera d’excellents moments, vécus dans une ambiance torride. La faute à qui ? Plusieurs suspects ont été approchés, à nous de refaire le fil de la soirée pour en dévoiler les coupables.

Il est 18h00 sur la plaine de l’Asse, lieu des festivité. Les premiers suspects sont approchés sous le chapiteau où un public tout juste arrivé continue d’affluer pour découvrir ou redécouvrir Stevans, groupe certifié genevois, à qui on promettait déjà un bel avenir depuis un certain temps. D’abord programmés sur la scène du camping il y a quelques années, les trois membres ont enfin pu fouler les planches du Détour l’année passée, scène réservée aux espoirs suisses, et marquer les esprits d’un public curieux, par la même occasion. Auréolé d’un troisième et nouvel album intitulé Fake, superbement produit par le magicien Will Jackson qui a pu travailler entre autres dans la passé avec les Kaiser Chiefs, le trio power pop s’envole vers le succès. Les membres de Stevans, derniers modèles Ray-Ban sur le nez et look vestimentaire très classe façon britannique, ont toutes les cartes en main pour exporter leur musique déterminée au-delà des frontières.
A l’aise sur scène, les trois musiciens délivrent avec facilité un mélange de mélodies pop et de guitares énergiques rock tout au long de leur concert. Chantés exclusivement en anglais, leurs titres n’auraient presque rien à envier à ceux de leurs pas si lointain voisins britanniques, chez qui Stevans s’est inspiré sans vergogne. On pense à The Kinks, on continuera sans doute de la faire. Des suisses travestis en britanniques ? Peu importe, le public adore et nous aussi, comme on peut le confirmer à l’écoute de leur tube en puissance que représente Vodka Red Girls et du Battle Of Brains et son piano. Le groupe joue dans un chapiteau bien rempli et sait mettre l’ambiance, mais pas assez pour faire d’eux les heureux coupables de notre soirée.

Alors peut-être devrions-nous nous tourner vers Olivia Ruiz, sur le grande scène, devant une foule excitée aux trois quarts féminine ? La charmante française, débarquant au Paléo avec la ferme intention de nous plonger dans son univers féérique, a de grandes chances d’être la coupable, vu les moyens mis en place et la joie des festivaliers. Accompagnée par pas moins de huit musiciens expérimentés et d’un décor merveilleux, à l’image de son miroir géant et de ses quelques papillons colorés postés sur scène, la demoiselle démarre en trombe avec son titre le plus récent, Les Crêpes Aux Champignons, repris timidement en chœur par des milliers de voix féminines. Puis, la noiraude continue avec un titre hispanique plus anonyme et moins accrocheur, avant de relancer la machine grâce à l’une de ses nombreuses étoiles sonores formées sur son dernier album Miss Météores et dont les fans semblent avoir bien appris les paroles. Ce sera ainsi jusqu’à la fin de sa prestation, une alternance de bon et de moins bon, ne permettant pas à la chanteuse de faire partie de nos artistes suspectés d’avoir mis le feu sur scène.
Même topo pour le dandy lyonnais Benjamin Biolay qui, quinze minutes plus tard, entame un concert musicalement intéressant et très attendu par ses fans, sous le chapiteau. C’est également l’occasion pour Monsieur Tout-le-monde de découvrir sur scène cet artiste au passé tourmenté, récemment reconnu par ses pairs pour la justesse de son dernier disque, La Superbe, récoltant au passage les honneurs médiatisés que représentent deux Victoires de la Musique. Ce crooner talentueux nous offre sous la scène couverte du chapiteau, bien remplie pour le coup, une variété intelligente à l’instrumentalisation presque parfaite. Soutenu par de bons musiciens, à l’instar de la belle harpiste aux doigts de fée dont la belle robe blanche de princesse marquera agréablement notre mémoire visuelle, Benjamin Biolay séduit les citoyens du Paléo Festival le temps d’une heure et quart, sans pour autant enflammer son monde. Le point fort de ce concert ? Cette petite envie de regoûter à son répertoire tranquillement chez soi, ce qui n’est pas rien comme compliment, mais qui ne constitue pas pour autant un mobile assez sérieux pour faire de l’artiste le coupable de notre grand mercredi soir passé à Nyon.

Après 23h00, les suspects seront de plus en plus évidents. En effet, premièrement, après le concert de Charlie Winston, on est déjà capable de mieux cerner les coupables de notre enquête. Autant le dire tout de suite, l’anglais n’en fait pas partie. Il faut admettre que ce constat est un peu sévère, mais juste. Quiconque ayant vécu sa venue remarquée et remarquable un an plus tôt sous un chapiteau torride peut confirmer que la prestation de l’artiste ne tient pas la comparaison cette année. Faute au basculement sur la grande scène et à un certain ennui d’entendre inlassablement ses tubes sur toutes les ondes au cours de l’année ? Faute à une liste de morceaux mous, composée principalement de ballades au détriment de titres plus ébouriffants, qui ne correspondent pas forcément aux critères de la scène ultime ? Les causes du relatif échec sont complexes et dures à cibler, pour un artiste qui a su quand même séduire une partie de son auditoire à coups de human beatbox, de pas de danse décalés et de maîtrise artistique. Peut-être également qu’une partie de la foule s’est sentie moins concernée par les quelques titres inédits distillés lors du show? Qu’importe, Charlie Winston reste un grand artiste, même si il va devoir laisser la vedette ce soir au groupe suivant.

En effet, l’information est enfin dévoilée, les coupables enfin révélés. Ces derniers sont anglais et débarquent sous le chapiteau devant une foule compacte de curieux et d’adeptes, heureux de découvrir le groupe sur scène, mais encore inconscients de ce qui va les attendre. Il faut dire que les cinq jeunes hommes, originaires d’Oxford, ne payent pas de mine. Cheveux en bataille, barbes de plusieurs jours, sous leurs airs angéliques un peu négligés, il se cache pourtant un vrai démon musical prêt à bondir aux oreilles des festivaliers et mettre le feu au chapiteau. Répondant au nom de Foals, celui-ci ne se laissera pas facilement dompter. En effet, n’étant pas forcément accessible à tout le monde, celui-ci nécessite l’oreille aguerrie et expérimentée d’un mélomane chevronné pour pouvoir en tirer tous les plaisirs et secrets possibles. Cependant, une fois dressée, la bête se montre très agréable musicalement parlant. Et à la vue de la chaude ambiance en ce mercredi soir dans les premiers rangs du chapiteau, lorsque les cinq anglais débarquent sur scène, en délivrant sous une lumière bleue Total Life Forever, titre éponyme de leur second album, on peut indiscutablement affirmer que les dompteurs mélomanes sont venus en masse au Paléo.
Puis, luminosité rouge feu, les premiers riffs math-rock de l’excellent Cassius, titre rageur et représentatif de l’univers de leur premier album, retentissent devant des festivaliers survoltés. La salle est chaude bouillante, le pogo est immédiat. Un Yannis Philippakis des grands soirs, vêtu d’une chemise rouge lignée pour l’occasion, enchaîne avec Olympic Airways, autre morceau connu depuis la sortie de leur premier effort, ravissant les fans. Ensuite, la scène plongée dans le vert, c’est au tour de l’étonnant Miami, suivi sous des lumières jaunes par l’incontournable Ballons, donnant un prétexte au chanteur pour descendre de la scène afin de toucher les premiers rangs de festivaliers ravis. Le temps d’accorder sa guitare, d’interagir avec la foule et le barbu de chanteur est reparti avec After Glow, chanson puissante et rêveuse, avant d’offrir le show sur Alabaster, frappant avec fougue un tambour doré. L’atmosphère est électrique, le concert de Foals étant une vraie réussite jusqu’à maintenant. Et là, attendu comme le messie, la démonstration qu’est Spanish Sahara déroule progressivement sa douce hargne, d’une violence émotionnelle rare, offrant le moment extatique clé de la soirée, voire même du Paléo selon nos pronostics. Le morceau est repris en chœur par une foule incollable, communiant spirituellement l’espace d’un bel instant sonore. Le groupe est en nage, l’assemblée aux anges. Le groupe se donne corps et âme. Cet effort scénique visible est même démultiplié lorsqu’à la fin de Electric Bloom, après avoir tapé frénétiquement sur son désormais célèbre tambour, et avant de conclure avec Two Steps, Twice, le chanteur s’offre un spectaculaire plongeon dans une marée consentante de festivaliers. Dernier souvenir d’un concert extrêmement généreux, porté tout haut par un groupe éminemment talentueux, qui marquera d’une pierre blanche la mémoire du Paléo Festival.

Après la claque Foals, la venue de -M- sur la grande scène ne représente plus qu’une gentille anecdote. On assiste à la défense de son dernier album, Mister Mystère, saupoudrée ici et là de quelques tubes anciens, d’une mise en scène amusante de la mort du personnage M faisant place à l’artiste Matthieu Chedid. Et finalement, on subit l’invitation sur scène, décidément à la mode cette année, des premiers rangs de son public et de plusieurs artistes présents ce soir (Charlie Winston, Olivia Ruiz, le chanteur de Stevans) pour clôturer ce concert grand public, autour d’un bœuf musical sans valeur.
Tandis que la foule quitte gentiment la grande scène, on se dirige au pas de course vers le Club Tent pour finir la soirée avec la venue des anglais de Baddies. Découverts il y a un an de cela au Gurten Festival, ces derniers ont dans l’intervalle sorti un premier effort studio intitulé Do The Job. Les quatre membres du groupe sont donc là pour faire le travail. Mais à cause d’une programmation que l’on qualifiera de malheureuse, en même temps que deux autres pointures que sont Laurent Garnier et The Very Best, les jumeaux Webster et leur groupe n’attirent pas les masses. Cependant, la centaine de têtes présente devant la petite scène couverte semble être constituée de connaisseurs, appréciant la prestation rageuse des anglais. Quand aux simples badauds, ils passent rapidement leur chemin, car ayant du mal à apprécier la musique du quatuor à sa juste valeur, entre autres à cause d’une voix effacée sous des réglages sonores approximatifs.

Quoi qu’il en soit, même si on est malheureux pour ce groupe que l’on suit et affectionne depuis un an déjà, rien ne saura nous affecter, après le fantastique moment passé en compagnie des Foals en ce mercredi soir torride, dans le cadre de la 35ème édition du Paléo Festival.
artistes
    -M-
    Olivia Ruiz
    Benjamin Biolay
    Charlie Winston
    Laurent Garnier
    Foals
    Baddies
    Asaf Avidan & The Mojos
    The Experimental Tropic Blues Band
    Stevans
    Mark Berube
    My Heart Belongs To Cecilia Winter
    Rectangle
    Fai Baba
    The Very Best
    Mahotella Queens
    EJ von LYRIK