De retour à l’entrée du site, l’odeur est presque insupportable. Le soleil fait ressortir les relents de détritus divers entassés dans les poubelles, les toilettes sont dans un tel état qu’on s’amuse à disserter sur la déchéance humaine, mais heureusement lorsque l’on arrive près des scènes, l’odeur nous quitte et les diverses hôtesses de Coca-Cola nous aspergent avec leurs arrosoirs. Un geste salutaire, et un réveil plutôt efficace pour attaquer cette journée qui débute véritablement pour moi aux alentours de 15h, avec le concert de Fucked Up. Sans réellement connaître le groupe, je reçois une véritable claque lorsque je vois débarquer ce chanteur aux allures de bûcheron canadien possédé, qui dès le milieu de la première chanson descend de la scène, se mêle à la foule et partage la sueur dégoulinant de son ventre plutôt imposant avec un public complètement en transe. Un concert fou, presque apocalyptique, le chanteur ne se décidant pas à quitter la foule, se faisant des cornes de diable avec des gobelets de bières et se lamentant sur l’absence de son enfant avec un câlin gorgé de chaleur humaine et un pauvre festivalier qui en ressort trempé de sueur. Le tout est véritablement bon enfant, et les pogos sont plus joyeux que violent. On a presque de la peine pour les musiciens sur scène, talentueux mais que personne ou presque ne regarde, obnubilés que nous sommes par ce leader sorti de je-ne-sais-où. La journée s’annonçait plutôt calme, pourtant le début est plus qu’énergique. Une vraie bouffée d’air frais, et une découverte de plus dans cette 22ème édition.
Difficile dès lors d’apprécier en face, dans le Dance Hall, le set mollasson et manquant clairement de fougue de Little Dragon, autre groupe qui m’intéressait de par sa collaboration merveilleuse avec Gorillaz, mais qui, lors de ce concert, m’aura plus que déçu. On s’ennuie, la sauce ne prend pas et l’on reste désespérément sur sa faim. Vraiment dommage. Je repars donc un peu amer sans avoir vraiment fait honneur au nom équivoque du chapiteau.
Histoire de me remettre un peu de cette journée qui avait bien démarré mais qui s’est ensuite détériorée, je pars voir un groupe dont j’ai beaucoup entendu parler, mais auquel je ne me suis jamais vraiment consacré. Pony Pony Run Run, formation d’electro-rock française, nous livre ce samedi un set très énergique, même si sur le fond, on a l’impression que c’est le groupe d’un tube, avec beaucoup de remplissages et d’errances autour. J’ai irrémédiablement pensé à Delphic. qui dans le genre, entre guillemets, s’en sort nettement mieux avec un album de haut niveau. Sympathique donc, mais pas franchement renversant.
Et là, ce fût l’un des moments les plus réjouissants du festival, avec ce concert plein de fraîcheur, soutenu par une folle ambiance. Esau Mwamwaya parvient à attirer une énorme foule sous la Magic Tent, venu voir une scène où ont poussé des palmiers et quelques danseuses. Le set est intense, avec beaucoup de tubes en puissance, et si le chant sonne parfois un peu faux, on pardonne très vite à un groupe qui va convaincre le public en ce début de soirée. A noter le final très féminin, avec une scène remplie de filles du public dansant pour le plaisir de nombreux hommes célibataires…
La suite des événements est un peu étrange. Je me demande même un instant si le NME peut avoir une forte influence vu le manque d’ambiance flagrant lors du concert de la chanteuse electro-pop Uffie. Pour ceux qui ne seraient pas au courant, il faut rappeler que la protégée d’Ed Banger, label de Justice entre autres, a reçu par les journalistes anglais la note équivoque de 0/10 pour son premier album Sex Dreams & Denim Jeans. Une note que je ne partage pas vraiment, ayant toujours aimé le son mainstream mais efficace de l’américaine. Je m'y rendais en pensant trouver un public déjà conquis, pourtant le concert n’a jamais vraiment décollé. Pensant trouver une Uffie capricieuse et peu communicative, je suis étonné de voir la chanteuse constater le manque d’énergie dans la salle et essayer de réveiller le public avec plusieurs interventions, celle-ci se décidant même à aller dans le public pour réveiller l’assistance. Pourtant, jamais son set ne décollera, la chanteuse baissant les bras à quelques instants, laissant même ses musiciens seuls sur scène pour jouer quelques titres du groupe qu’ils forment lorsqu’ils n’assistent pas Uffie. Un concert étrange donc, que j’aurais aimé plus intense, contrairement au public.
Sur les conseils d’un ami, nous nous hâtons d’aller voir Emalkay, tout en nous reposant. Nous sommes donc éloignés, mais le public semble conquis et le set envoie vraiment « du lourd ». Mais nous devons nous dépêcher. J’en profite pour parler de ce qui est à mon goût le plus grand défaut de cette édition, la programmation de ce samedi soir. Dour a réussi à inviter de nombreux DJs et groupes de talents pour cette soirée, mais l’erreur fût de les faire jouer simultanément ou presque. Le public doit donc choisir sur la même tranche horaire entre Emalkay, The Subs et Breakbot. Je choisis une solution satisfaisante, même si assez contrariante, celle d’assister à de petits extraits des concerts par-ci par-là. Je me hâte donc d’aller vers The Subs, pour l’un des concerts les plus explosifs du festival : au programme, une énergie démoniaque, un chanteur qui grimpe sur la structure du chapiteau quitte à tomber, un public qui danse jusqu’à l’épuisement et un concert qui restera assurément dans les mémoires. Malheureusement, nous partons avant la fin pour rejoindre Breakbot, et assister à un DJ set plus qu’efficace. Découvert lors d’un concert à Douai, c'est avec plaisir que je retrouve l’electro parfois simpliste mais diablement enivrante de cette artiste qui mérite d’être un peu plus connu.