Tout d'abord Elbow, groupe vu trop peu souvent en France, qui s'émerveillent devant le cadre d'exception de la Citadelle, et sont accompagnés pour l'occasion d'un quatuor à cordes. On ne peut pas dire que le public arrageois leur fasse un accueil de stars, ce qu'ils sont désormais en Angleterre, mais Guy Garvey s'applique à interagir avec la foule, lui faire lever les bras, lui faire chanter un refrain. Il n'est pas vraiment un showman né donc la démarche mérite d'être appréciée. Les ballades d'Elbow réussissent l'exploit d'être à la fois lyriques et modestes, et d'une beauté fulgurante, une beauté qui ne se révèle qu'aux oreilles initiées, ce qui n'est pas vraiment l'idéal dans le cadre d'un festival. Un jour viendra, où la France succombera au culte du Coude.
Après cela, l'un des moments forts du festival arrive, avec l'entrée en scène de la prêtresse PJ Harvey. Revêtue d'une longue robe blanche et d'une coiffe à plumes démesurée, elle apparaît accompagnée de trois musiciens, sans décor de fond, aucune autre fioriture que son costume de prêtresse des bois. Elle commence ses incantations avec Let England Shake et pendant une heure, le public est subjugué. Munie tantôt d'une guitare acoustique, tantôt d'une guitare électrique, mais surtout de sa fameuse autoharpe, elle célèbre sa messe païenne dans une atmosphère solennelle de bout en bout. Très peu de bla-bla entre les morceaux, et pourtant la communication avec le public n'est pas inexistante, son sourire diaphane irradiant la foule d'une sérénité bienveillante. Un moment suspendu dans le temps.
Comme si cela ne suffisait pas, juste après PJ Harvey sont programmés les Portishead. Dans un effet de contraste total, Beth Gibbons fait son entrée vêtue d'une parka et d'un jean, et se fond au milieu de ses musiciens. Ici, pas d'ego surdimensionné ni de charisme à couper le souffle, uniquement le confort des mélopées cotonneuses des Brightoniens. Les milliers de festivaliers assistant au récital retiennent leur souffle de peur de briser ces mélodies fines comme du cristal qui se répandent dans l'atmosphère. Celle-ci se rafraîchit au fur et à mesure que le soleil disparaît derrière les arbres. Un dimanche soir comme il en arrive trop peu.
Pour le bouquet final, Live Nation ont dégainé leur plus gros missile : Coldplay. Dans la plus droite lignée des Flaming Lips, énorme influence de Chris Martin s'il en est, des ballons de baudruche démesurés, immenses et multicolores, sont balancés dans la foule. Les ballons rebondissent dans la joie et la bonne humeur. Ils sont remplis de confettis qui se répandent lorsqu'ils éclatent. Avant même l'entrée en scène, il règne dans la Citadelle une atmosphère de carnaval. Puis, c'est le moment de fébrilité : les lumières s'éteignent, et les multiples décors de scène s'illuminent : ils arrivent.