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Transmusicales

Rennes, du 30 novembre au 4 décembre 2011

Live-report rédigé par François Freundlich le 7 décembre 2011

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Les festivités commencent tôt dans l’après-midi pour ce second jour des Transmusicales de Rennes, mais un marathon de 14 heures de concerts, ça ne se manque pas.

C’est une salle de l’Ubu toujours aussi pleine à craquer et devant laquelle une longue file d’attente s’est formée qui se réveille vers 14h30. Il n’y en aura pas pour tout le monde. On pourrait mentionner que le premier groupe du jour, Juveniles, a plus de notoriété que tous les groupes qui jouaient la veille dans une salle dix fois plus grande, mais les jeunes pousses rennaises n’en sont qu’au stade de la hype grandissante dans les médias et se contentent pour le moment de petits lieux.

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On attend néanmoins ces juvéniles rennais impatiemment, suite à l’écoute de quelques titres ayant attiré notre attention. Le trio n’a pas l’air de se prendre la tête et tente d’être à la hauteur des attentes pesant sur lui. Pari plutôt réussi puisque Juveniles enchainent leurs titres, dont certains sont des tubes en puissance, avec concentration et justesse. On replonge avec eux dans le Manchester des 80s avec une voix profonde à la Ian Curtis et des synthés qui donnent envie de s’ébrouer joyeusement. On découvre par la même occasion que derrière leurs titres les plus connus, d’autres sont tous aussi attirants. L’enchainement de We Are Young et Night Nights est la combinaison parfaite pour s’étirer les muscles voire même s’enflammer tout en étant à peine réveillé. Après tout, ils nous ont bien dit bonsoir en arrivant sur scène. Voilà un groupe qui fonctionne aussi bien pour l’écoute que pour la danse, 2012 leur appartient.

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Les Transmusicales semblent parties sur de meilleures bases que la veille : pourvu que ça dure avec les Splash Wave qui prennent la relève. On continue dans la cure 80s avec ces Kraftwerk brestois munis de leurs synthés en bandoulière et de leur batterie électronique vraiment trop dansante pour cette heure. Malgré cela, on se laisse entrainer quitte à risquer l’entorse. Le duo le sait très bien et a prévu un remontant pour le goûter : les voilà qui jettent des BN au public !
Adeptes du vocoder en mode « j’arrive du futur, vous êtes en danger », les voix sont robotisées et la musique n’est pas sans rappeler la Bande Originale du récent Drive de Nicolas Winding. Qu’importent les références, Splash Wave nous offrent un très bon concert, marqué par les interventions vocales de deux invités, dont une demoiselle apportant une énergie supplémentaire dans ce goûter d’anniversaire des plus réussis.
Après ce début d’après-midi synthétique, retour à un son plus rock avec Wonderboy. Perdu entre des télévisions affichant de la neige, le jeune rennais commence seul sur scène armé de son unique guitare électrique. Il bascule ensuite vers un blues crade quand ses deux acolytes le rejoignent pour devenir un power trio énergisant. La voix est bien maîtrisée dans son style écorché. Wonderboy se teinte de psychédélisme complété par un harmonica s’accordant curieusement parfaitement avec leur son heavy. Quoique lassant sur la durée, leur set se sera malgré tout avéré percutant et incisif.

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Après une traversée de Rennes, retour dans la salle de la Cité ou la sensation écossaise Haight Ashbury est attendue. La salle affiche complet car les groupes qui vont se succéder sur la scène risquent fortement de faire parler d’eux dans les prochains mois. Le trio de Glasgow a plutôt l’air de débarquer d’un squat hippie si l'on en juge les robes longues et les vêtements champêtres des deux chanteuses Kirstie et Jenny. Scott Ashbury, frère de Kirstie, les accompagne de ses moult guitares dont il changera à chaque morceau. De cette fameuse Gibson blues à caisse de résonance ronde à un instrument rectangulaire sonnant quasi comme un banjo, il parvient presque à faire détourner les regards des deux belles par son jeu plutôt intéressant. Les voix féminines quand à elles, se mélangent dans leur ton monocorde à l'image de Three Little Birds.
Le son est fortement inspiré par le psychédélisme californien 60s, mais teinté d’un country folk plutôt entrainant. On pense même à ABBA sur certains chœurs plutôt surprenants, avec des guitares tentant de salir ces voix angéliques. Jenny remue son tambourin et tape sur sa petite batterie tandis que Kirstie, dans son costume de fille du Père Noël, s’empare de temps à autres d’une basse plutôt discrète. Les organes se font aigus sur la planante Favourite Song qui porte très bien son nom, totalement addictive. Le charme agit même entre les chansons lorsque les protagonistes font entendre leur accent venu des Highlands. Haight Ashbury nous a séduit, voilà la bonne petite découverte que l’on attendait.

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Le public semble s’être déplacé pour une autre attraction de ce vendredi à la salle de la Cité : l’américaine Sallie Ford & The Sound Outside. Cette brunette aux boucles frétillantes fait souffler comme un vent de fraicheur dans cette vieille salle en pierre. Le sourire aux lèvres, le rire communicatif et la bonne humeur de son groupe vont faire passer un excellent moment aux chanceux ayant pu accéder à la Cité. La guitare électrique bien en main sur ses solos ravageurs, la demoiselle de Portland libère sans complexe sa voix à la fois percutante et enivrante. Étant peu adepte du style rockabilly vintage habituellement, je m’en trouve agréablement surpris de voir mes jambes en redemander à chaque morceau, aussi entrainant les uns que les autres.
Peut-être est-ce dû au fait que Sallie Ford évite tous les clichés du genre pour incorporer une certaine modernité dans ses compositions, tout en les faisant sonner comme un bon vieux blues des 50’s. Il suffit d'écouter le titre Danger et sa contrebasse vibrante pour l’avoir en tête pendant des jours, empêchant tout bon chroniqueur d’écouter les autres groupes du festival. On swingue, on s’enflamme, le temps passe sans que l'on s'en aperçoive et Sallie Ford se paye finalement un rappel en solo sur une très bonne reprise de Wreckless Eric, Whole Wide World. Une étoile est née.

Une légère hésitation nous prend avant de nous diriger vers le Parc des Expositions. Les concerts de la Cité se terminent plus tard cette année et l’envie de voir Maylee Todd est grande. On lève malgré tout les voiles pour Saint-Jacques-de-la-lande et ses Halls chéris, tous frémissants sous les coups des infra basses. Cette année, pourtant, on trouvera moult barrières et autres passages bloqués freinant la circulation entre les salles. C’est un vrai chemin de croix pour se déplacer.
Il ne s’agissait pas pour autant de rater la prestation de Breton, groupe qui ne pouvait pas manquer les Transmusicales avec un tel pseudonyme. Bien que leur sympathique chanteur s’exprime parfaitement en français, ils arrivent bien d’outre-Manche avec leurs capuches relevées. Le sextet propose un concert plus électro-rock que ce à quoi l'on s’attendait, même si les arrières goûts dupstep et les lignes de basses sont présents. Le synthé se fait angoissant sur The Well ou reposant avec les variations trip-hop de Pace Maker. Roman Rappak oscille entre un chant à résonance magnétique et séquences plus parlées. Le single Edward The Confessor lance la danse down tempo avec ses synthés fulgurants et ses samples tout droit sortis d’une maltraitance extatique de MPC. On apprécie les quelques passages plus atmosphériques entre deux emballements rythmiques. Breton se lâche dans l’électronique sur la fin du set, nourrissant un style musical parfois trop enfermé sur lui même pour un public conquis. Le concert idéal pour lancer la soirée.

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Après ce moment tout en intensité, voici venu un vrai groupe de pop dans le Hall 3. On attendait ces norvégiens de Kakkmaddafakka au nom imprononçable comme le groupe qui allait passer de la hype médiatique au grand public pendant les Transmusicales, mais personne n'aurait osé imaginer que cela marcherait si bien pour eux : leur son live est fait pour faire bouger les foules avec une pop plongeant des deux mains dans le mainstream. Ils sont une dizaine sur scène et rendent le public complètement fou à chaque accord sortant de leurs guitares ou claviers, deux danseurs osant même chorégraphies improbables au second plan.
Ils commencent leur set par des titres simplistes comme Touching, dont on espère qu’elle ne durera pas trop longtemps, mais qui se répètent sans fin. Durant quelques rythmiques reggae, on croirait avoir retrouvé des Ace Of Base qui auraient juste traversé la frontière. L'impression se confirme avec une reprise de Put Your Hands Up In The Air! de Danzel pour bien chauffer les plus jeunes. Tout cela est difficilement supportable mais quelques chansons réussies se font entendre, comme ce Your Girl sous des airs de tube pop ensoleillé. Il y a fort à parier que les entertainers Kakkmaddafakka seront de tous les grands festivals de 2012, ils ont bien trop d’emprise sur une foule assoiffée.

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Après cette ambiance folle, il faut bien le reconnaître, il est plus compliqué d’aborder le concert de Robin Foster. Le public est bien plus calme et attentif dans le Hall 4. Il faut un temps d’adaptation. On aperçoit David Penney, chanteur d'Archive depuis le départ de Craig Walker. Il accompagne au chant Robin, qui s’occupe de la guitare et de quelques passages chantés, parfois en duo. L’atmosphère se veut calme, avec des chansons débutant par quelques notes de guitares aiguës derrière une voix grave et intense. On pense évidemment à Archive ; ce moment fatidique où tout explose en un défoulement électrique sombre s'en rapproche également.
L’anglais installé à Brest depuis des années est venu présenter son nouvel album moins instrumental que le précédent, son adaptation live se fait tout en puissance. Dave apporte une profondeur mystique sur ses passages chantés, accentués par le rock progressif déployé par Robin et son groupe. Les libérations vocales déclamées sont jouissives, tandis que les titres où Robin Foster chante restent dans la retenue. Ils n’en sont pas moins réussis, comme des oasis d’air frais au milieu d’un concert très classe.

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On s’offre alors une tournée des halls afin d’enchainer plusieurs prestations. Hollie Cook a déjà commencé son show dans le grand Hall 9. La fille de Paul Cook (Sex Pistols) apporte un peu de soleil sur la Bretagne qui en a bien besoin ce soir. Son reggae est divertissant, mais cela reste du reggae et on s’ennuie donc rapidement. Elle est accompagnée par une section de cuivres et le rasta Horseman actif sur les refrains du Prince Fatty Band.

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Tout cela est sympathique mais il ne s’agit pas de s’endormir avant l’heure. Un petit détour par le concert d'Orchestra Of Spheres : ces néo-zélandais foufous en tenue de cosmonaute disco futuriste proposent unmélange de synthés new wave et de mandoline électrique psychédélique au son hindou mais peinent à convaincre de passer un long moment en leur compagnie. Ce n’est pas grave, Colin Stetson a également commencé son concert un peu plus loin. Seul sur scène, le canadien empoigne un saxophone baryton et s’offre une pose de saxo hero. Il est difficile de faire le lien entre ce que l’on voit sur scène, Colin Stetson s’essoufflant en remuant, et ce que l’on entend, un mélange de voix plaintive, de rythmes cachés et d’instruments à vent virevoltant. Cette musique très particulière est créée grâce à sa technique de respiration lui permettant, pour résumer, de tout faire en même temps, y compris chanter. Bien entendu, c’est impressionnant, bien entendu, c’est un génie (incompris ?), mais sa musique n'est pas des plus passionnantes. Il aurait fallu s’y plonger pleinement, mais peut-être est-il déjà trop tard...

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On décide de retourner vers le Hall 3 où les espagnols de Fuel Fandango s’élancent tels des taureaux dans l’arène. On tombe immédiatement sous le charme de la robe rouge de la pétillante Nita et ses pas de flamenco en talons aiguilles sans oublier son porté d’éventail también. Ne nous y trompons pas, les Fuel Fandango sont rock’n’roll et la guitare d'Ale Acosta s’embarque dans des riffs aussi puissants que dansants. Le chant de Nita trouve toute sa sensualité dans la langue espagnole même si la majorité des titres sont chantés en anglais. Sa présence scénique est vertigineuse et ses mouvements de poignets renversants.
Le titre Shiny Soul qui sert également au teaser vidéo du festival enflamme une audience conquise. Lorsque la guitare flamenco ou les percussions s’invitent dans la danse, la voix devient aérienne et les Fuel Fandango s’embrasent. Olé. On quitte le rayon de soleil de la soirée pour le grand hall ou SBTRKT sont en plein set. On s’en trouve clairement refroidi, aussi bien physiquement que dans la texture froide de leur dubstep. Les puissantes basses agressives envahissent nos tympans tandis que le chant plaintif se perd dans un contre temps qui fait remuer les amateurs du genre. Le duo s’enflamme entre un clavier psychédélique et une batterie en boucle.

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Difficile d'entrer dans le concert et se réchauffer, direction le Hall 4 ou Alexander Tucker est en scène. Seul derrière ses machines, l’anglais délivre un son noise composé d’un hardcore plaintif voire rébarbatif. On ne s’attendait pas à cela en écoutant ses titres studio comme His Arm Has Grown Long. Ce soir, il lorgne plutôt vers les Fuck Buttons, à l'exception de morceaux calmes durant lesquels le son se fait subitement limpide et bercé par un violoncelle tout en douceur. La grosse artillerie repart ensuite et les oreilles en reprennent un coup. On garde ses distances, instinct de survie auriculaire, et l'on repart même vers de nouvelles aventures.
Retrouvons un groupe français dans le Hall 3, Stuck In The Sound, curieusement programmé à cet horaire avancé (3h15). Complètement déchainés, ils ont décidé de lâcher un son lourd et féroce sur les Transmusicales. Ils alternent entre leurs anciens tubes comme les très bons ToyBoy et Shoot Shoot et la présentation de leur nouvel album. L’homme à la capuche et à la guitare, qui n’a d’acoustique que le nom, est déchainé sur le récent single Pursuit au son proche de My Vitriol. Récemment portés par le succès d'un vidéo clip où ils s’incrustent dans de vieux films, les parisiens s’imposent un peu plus dans le paysage rock français. Ça s’énerve des deux cotés des barrières et les Stuck in the Sound obtiennent ce qu’ils ont demandé : le bordel.

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Dernier concert de cette journée mouvementée, l’anglais Totally Enormous Extinct Dinosaurs. Débutant seul derrière ses platines dans son costume de hipsteratop, Orlando Higginbottom prend l’électronique du coté pop et fait danser les courageux répondant encore présent. La fatigue se fait clairement sentir mais le DJ parvient à faire remuer les quelques os de dinosaures encore capables se déplacer. Des danseuses tribales costumées elles aussi viendront l’accompagner pour une fin de set chaotique.

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C’en est terminé du vendredi des Transmusicales 2011 dont on ressort bien plus satisfait que la veille, avec la sensation d’avoir assisté à des concerts d’exception. On retiendra la chaleur synthétique de l’Ubu, les Haight Ashbury ainsi que la joyeuse Sallie Ford à la Cité. Coté Parc des Expositions, si l'on a succombé à Breton ou à Robin Foster, on a également dansé sur Fuel Fandango et Totally Enormous Extinct Dinosaurs. Et bien sûr, dans quelques heures, débutera l’après-midi du samedi : les Transmusicales, un festival où l'on ne sait quand débutent et s'achèvent les journées.

Cliquez ici pour retrouver plus de photos des Transmusicales 2011.
Merci à Philippe Remon pour sa photo de We Are Standard.
artistes
    Juveniles
    Splash Wave
    Wonderboy
    Shiko Shiko
    Garciaphone
    Evening Hymns
    Kutu Folk Records, The Band
    Haight Ashbury
    Sallie Ford & The Sound Outside
    Maylee Todd
    Janice Graham Band
    Galaxie
    Pockemon Crew
    Hanni El Khatib
    Isbells
    Moss
    Kakkmaddafakka
    Orchestra of Spheres
    Fuel Fandango
    Stuck In The Sound
    Za!
    Robin Foster
    Colin Stetson
    Alexander Tucker
    Motor City Drum Ensemble
    Totally Enormous Extinct Dinosaurs
    Dellarge
    Nekochan
    Childrum
    Black Ham
    Niveau Zero
    Souleance
    Breton
    Souleance
    Hollie Cook
    Todd Terje
    SBTRKT
    Silverio
    Factory Floor