Malgré des conditions météorologiques apocalyptiques, le programme de cette deuxième journée fut plutôt chargé. Inutile d’en dire plus, on vous laisse découvrir !
Ah qu’il était beau ce deuxième jour à Dour – hormis l’interminable rideau de pluie bien entendu. Excusez-nous d’avance si ce propos vous semble mièvre ou nostalgique, mais il est toujours bon de voir à quel point un festival peut défendre la fraîcheur des musiques actuelles dans toute leur diversité.
On commence avec
Klub Des Loosers et leurs punchlines qui claquent jusqu’au plus profond des neurones. L’inconvénient, avec ce genre d’artistes, c’est quand les paroles deviennent difficilement compréhensibles, comme ce fut le cas pour celles de Fuzati, engluées sous les basses. Cet inconvénient mis de côté, on reste convaincu que Le Klub Des Loosers (ne vous fiez pas au nom, il est trompeur) reste l'une des plus belles surprises du hip-hop français du cru 2012. Toutefois, méfions-nous. Car si le rap français et américain ont souvent été les meilleurs ambassadeurs mondiaux de l’esprit hip-hop, ces deux derniers risquent de perdre leur place face aux sons hybrides concoctés par des cerveaux dingos d’outre-manche.
Pourtant, du grime énervé des mancuniens de
Murkage au message ouvertement politique de
Speech Debelle (et sa fabuleuse reprise de
Changes de 2Pac), il n'y a rien en commun, mais c'est justement ce qui fait la force de ce hip-hop anglais, biberonné au brassage des cultures. Comme quoi nos voisins britons ne font pas que suivre aveuglements leurs amis d’outre-Atlantique : avec comme ultime démonstration, la prestation toute crescendo du patriarche
Roots Manuva, de plus en plus proche de ses racines jamaïcaines.
Sans transition : il temps de se rendre à La Petite Maison Dans La Prairie où
Fanfarlo déroulent un folk à la retenue explosive. A la première écoute, rien de franchement innovant, mais rien de redondant pour autant, loin de là. Au contraire, si on leur laisse une chance, les fanfarons de Fanfarlo se révèlent même nettement plus convaincants sur scène que sur album.
Ce qui n’est pas le cas de
St. Vincent – qui n’a de sainte que le nom - puisque la complice de Sufjan Stevens excelle partout, qu’importe ce qu’elle entreprend. L’américaine, sous ses pas de poupée, est à la fois belle et malsaine, libre et pervertie : le genre de beauté, suave et savante, qu'on aimerait croiser plus souvent dans l’industrie musicale.
C'est donc avec la plus grande peine du monde (il faut dire que c'est un de nos coups de cœur du festival) que l'on quitte la Petite Maison Dans La Prairie pour allez s'immerger aux coups de beats lugubres des
Mount Kimbie à la De Red Bull Elektropedia Balzaal (le concours du plus long nom de salle est lancé). Preuve que Londres ne s'est pas complétement transformée en une immense ville touristique, ses usines désaffectées et ses égouts débordent de créativité. Un sentiment que James Blake, présent en DJ Set, ne fait qu’amplifier. Pour le dire autrement, il fait monter la sauce. On l’a même vu, miracle du 21ème siècle ou magie du spectacle, mixer sur des platines vinyles. Grand dieu.
On quitte James Blake parce qu’il est minuit, et qu’à minuit, tout est permis. Plus sérieusement, à Dour, l’entre-deux jours est terrible. Imaginez un peu : Blackstar, Actress, Foreign Beggars et Jack Beats à 50 mètres à peine l’un de l’autre. C’est finalement pour
Blackstar que notre cœur penche. Formé par Mos Def (qui désormais se nomme Yassin Bey) et Talib Kweli, Blackstar défend mordicus l’esprit d’un hip-hop original et originel, où les mots comptent autant que les coups de beat, où le flow se mue en expression purement poétique : exactement ce que ne seront jamais Jays-Z et Kanye West. Car on a bien observé le trône et c'est Talib Kweli et Mos Def qui s'y trouvaient. En résumé, on ne peut pas test.
Bien que l’on soit triste de quitter les deux comparses avant la fin – d’autant que leur set, homogène comme jamais, navigue très largement au-dessus du lot - on ne souhaitait pas manquer la venue des
Foreign Beggars. Ne serait-ce que pour les observer quinze minutes, mais quand même. Ce laps de temps nous laisse une bonne dose de ritournelles jouissives, de vibrations généreuses et d’arrangements en cascade dans la tête : idéal pour bien terminer la soirée.
Avec tout ce grand déballage d’instants flamboyants, on aurait presque oublié de mentionner la présence de
Dinosaur Jr et de
Pantha Du Prince au programme de la journée. Heureusement, il n’est jamais trop tard. Pour ne pas s’être trop attardé sur la douce transe et les rythmes alanguis du second, on n’évoquera que la performance des premiers. C’est indéniable, les membres de Dinosaur Jr ont vieilli. Leurs longs cheveux blancs en témoignent : ils ont vécu plusieurs vies, déstructuré des riffs entiers de guitares sans défense, mais il n’empêche qu’ils sont toujours là, prêts à défier n'importe quelle équipée sauvage. Respect international.
Une fois n’est pas coutume, la soirée se termine dans les basses groovy d’
Araabmuzik et des DJs Set fleurissant un peu partout sur le site de Dour. Comme la veille, nous n’irons pas jusqu’au bout de la nuit. Après tout, l’important, c’est de participer.