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Pitchfork Music Festival

Paris, du 1er au 3 novembre 2012

Live-report rédigé par Amandine le 6 novembre 2012

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vendredi 2
Sortez les moustaches, les imprimés chevaux courant dans le pré mais également votre portefeuille : la seconde journée de l'événement de la musique indépendante a bel et bien débuté en ce vendredi pluvieux ! Arrivés devant la Grande Halle de La Villette, c'est en effet une horde de jeunes hipsters lookés jusqu'au bout des ongles qui commence à prendre possession du lieu pour cette deuxième édition du Pitchfork Music Festival.

Nous passerons rapidement sur les tenues vestimentaires plus ou moins discutables des aficionados du célèbre webzine musical, même si un article ne suffirait probablement pas ; en effet, pendant ces deux jours, le festival va prendre des allures de marathon : deux scènes placées aux extrémités de la salle pour réussir à tenir le pari fou d'enchaîner les concerts avec seulement quelques minutes de pause entre chaque artiste, autant dire qu'il va falloir avoir les nerfs bien accrochés.

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Tout commence donc vers 17h avec les Anglais d'Outfit. S'il est toujours difficile de jouer en ouverture, devant un public clairsemé et parfois peu attentif, ces petits inconvénients ne semblent pas perturber le groupe qui profite d'un son incroyablement bon pour prendre possession du lieu. Les anglais déroulent alors leur pop teintée d'électro avec une classe et une finesse toute britannique. Tout de noir vêtus, ils détonent avec les jeux de lumières chatoyants et semblent se réjouir de pouvoir profiter de conditions si optimales afin de convaincre un public éclectique et curieux, certes, mais pas encore acquis à leur cause. Ils débutent sur des rythmes lents, lancinants, pour ensuite accélérer la cadence. Puisant à la fois dans la pop, la new wave et les sonorités 80's, ils proposent une setlist cohérente, allant crescendo, pour atteindre des sommets de raffinement sur Vehicles. Ici, la voix rappelle un certain Mark Hollis et ses grands moments au sein de Talk Talk. Malheureusement, les trente minutes qui leur sont allouées filent bien trop vite et nous laissent un peu sur notre faim, ce qui est indubitablement le signe d'un concert réussi.

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La suite est quant à elle bien moins réjouissante. Qui dit Pitchfork dit, il faut bien l'avouer, hip-hop, et la douloureuse arrive rapidement avec Ratking. Deux chanteurs et deux DJs ; probablement trop néophytes pour apprécier, nous préférons laisser le spectacle aux spécialistes, le temps pour nous de venir un peu plus renflouer les poches déjà bien pleines de la marque de bière à l'étoile rouge qui semble désormais avoir la main mise sur tous les festivals d'Europe.

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C'est ensuite au tour de Jessie Ware, et la Londonienne peine à convaincre. Un manque flagrant d'inspiration, des airs de « déjà entendu » à tout-va, nous ne serons jamais convaincus et le doute nous assaille lorsque nous pensons la même chose pour Wild Nothing dans la foulée. Que se passe-t-il ? On peut reprocher beaucoup de choses à Pitchfork : les choix parfois élitistes, leurs délires électro hip-hop parfois de mauvais goût mais leur plus grand atout reste tout de même la volonté de jouer la carte de la découverte et ce début de journée serait plutôt à l'opposé : entre ersatz de Florence And The Machine et sous Smiths, nous attendons un peu mieux.

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Heureusement, The Tallest Man On Earth va venir radoucir notre humeur quelque peu entamée. Alors oui, il est vrai qu'un singer-songwriter avec sa guitare, on a vu plus original, mais quand résonne la voix de Kristian Matsson, on ne peut objectivement qu'être subjugué. Un timbre rocailleux, des paroles dignes des plus grands folkeux, le set du Suédois sera un moment de douceur, le seul et unique de cette journée.

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La soirée va ensuite s'enchaîner à un rythme effréné avec The Walkmen, toujours aussi classy mais franchement décevants, une belle prestation des Chromatics et là, le grincement de dents annoncé. S'il est un point sur lequel la grande majorité des spectateurs semblait se rejoindre en ce vendredi (on vous voit venir, ce n'est pas (seulement) le goût pour le vintage et la mode Kleenex), c'est bien Robyn.

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Adorée de Pitchfork, encensée par l'intelligentsia, elle nous fait aujourd'hui revivre les pires moments de notre adolescence. De grâce ! Nous avons la chance de ne plus être dans les 90's, période ultime de la dance ! Ne nous faîtes pas revivre cette infamie ! Nous tairons cependant ce point de vue, de peur de se faire lyncher à coups de tote bags Rough Trade. Il faut avouer que le reste de la soirée nous fera très vite oublier ce dur moment.

SOV Comme prévu, les choses sérieuses ont été gardées pour la fin. Entre Fuck Buttons et Animal Collective, notre cœur balance : l'intensité d'un côté, le psychédélisme de l'autre, nous ne serons pas déçus.
Fuck Buttons remportent sans conteste le concours de décibels, mais pas seulement. Le duo, placé face à face, avec une boule à facettes géante au centre de la scène ne gagne il est vrai pas le prix de la scénographie (remporté haut la main par Animal Collective) mais peu importe car l'essentiel chez eux, réside en leur capacité à faire de la musique électronique la plus chaleureuse et la plus émouvante qui soit. A coups de beats et d'effets, ils réussissent à installer un set parfait, avec une émotion et une intensité palpables, sur la lame du couteau. Après une telle leçon, on imagine mal entendre quiconque ayant assisté à la démonstration encore affirmer que la musique électronique n'a pas d'âme, n'est qu'un assemblage de bruits et de sons. Si toutefois elle devait l'être, Fuck Buttons seront alors maîtres ès assemblages.

SOV Aux alentours de 0h15, la scène multicolore faite de modules gonflables et de dents géantes semble être entièrement dédiée au nouvel album d'Animal Collective, Centipede Hz, sorti quelques semaines auparavant. Le psychédélisme des Américains avait été plus que mis à mal lors de leur dernier passage parisien dans la même Grande Halle de la Villette, la faute à un son épouvantable, et c'est donc fébriles que nous attendons, il faut l'avouer, nos petits chouchous de ce vendredi. Si la part belle est laissée aux nouvelles compositions (une version presque punk de Today's Supernatural et une interprétation mémorable de Wide Eyed), ils n'oublient tout de même pas les albums précédents (nous aurons enfin la chance de ré-entendre My Girls, boudée à la Villette Sonique l'an dernier). Comme à leur habitude, les transitions, longues, folles et faites de diverses improvisations sonores et bruitistes, sont mises à l'honneur et la pureté du son nous permet de jouir d'un Panda Bear en très grande forme.

Les festivités dureront ce soir jusqu'à près de deux heures du matin et nous en sortirons en retenant l'énorme claque infligée par Fuck Buttons et notre réconciliation dansante avec Animal Collective. Désormais, il est temps de profiter de quelques heures de sommeil avant le jour le plus long qui nous attend.
artistes
    Outfit
    Ratking
    Jessie Ware
    Wild Nothing
    The Tallest Man On Earth
    The Walkmen
    Chromatics
    Robyn
    Fuck Buttons
    Animal Collective