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Transmusicales

Rennes, du 5 au 9 décembre 2012

Live-report rédigé par François Freundlich le 18 décembre 2012

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Nous débutons ce samedi des Transmusicales de Rennes dans la petite salle du 4bis, rassemblant chaque année des groupes à fort potentiel venus de toute l’Europe.

Ce sont des représentants d’un rock espagnol toujours très actif qui ouvrent la journée : Hola a Todo Del Mundo. Le quatuor au look de hippies barbus propose une musique pourtant éloignée de ce mouvement puisque basée sur les synthés de la claviériste. La synth-pop des madrilènes est avant tout faite pour danser puisque la batterie est placée à l’avant au milieu de la scène, déployant une rythmique rapide et entêtante. Les deux voix masculines et féminines se mélangent dans des harmonies claires et joyeuses pour des influences brit-pop entrecoupées par de longues envolées instrumentales. Entre mélodies ensoleillées et boucles électroniques débridées, nous entamons ce dernier jour par une très bonne découverte.

Direction la salle de la Cité pour le meilleur concert de cette journée : les américains de Zammuto, groupe formé sur les cendres de The Books. Voilà un concert dont il est difficile de décrire la musique tant elle est foisonnante, empruntant plusieurs directions allant d’un math-rock hypra rapide à des boucles électroniques futuristes en passant par des ballades aériennes et paisibles. On pense autant à Battles pour la rythmique omniprésente, qu’à Phoenix pour la voix classieuse toute en légèreté. Les instrumentaux laissent place à l’expérimentation, parfois improvisée par le quatuor, mais nous laissant sous le choc d’une puissance et d’une maîtrise de textures sonores bizarres et torturées. Des laptops changeant répondent aux décharges électriques de guitares tandis que la voix aiguë que l’on avait presque oubliée reprend le dessus. Les vidéos qui défilent à l’arrière plan collent parfaitement aux rythmes des chansons comme si un VJay se cachait derrière la scène. Mais Zammuto maîtrisent simplement chaque dixième de seconde, comme sur cette chanson sur le mal de dos qui voit défiler des images de personnes en souffrance sur un tempo rapide. Ces vidéos déclenchent souvent un rire nerveux comme lorsqu’un vieil homme apparaît pour jouer The Battle Hymn Of The Republic, cette vieille chanson de la guerre de Sécession américaine. Il s’agit en réalité d’un solo d’autoharp (ou cithare) pour The Greatest Autoharp Solo Of All Time, remixé par Zammuto en un génial instrumental complètement fou. Le public est en délire : c’est la première fois depuis que nous assistons aux Transmusicales qu’il continue de réclamer un autre rappel alors que lumières et sono sont rallumées. Bluffant.

Le producteur londonien Kwes prend le relai pour un changement d’ambiance radical avec un concert bien plus posé. Accompagné par une claviériste et une batteuse, toutes deux vêtues de magnifiques pull-overs, le bassiste Kwes propose une musique bien plus calme et indolente. Après une introduction instrumentale quelque peu psychédélique, il fait entendre sa voix flirtant parfois avec des aiguës fragiles s’échappant à peine de quelques nappes de synthé volontiers minimalistes. La batterie sonne quand à elle comme si elle vivait son propre concert, s’énervant de temps en temps en dehors du propos majoritairement laid back. Tout comme Zammuto, il est difficile de définir un style entre synth-pop, électronica, dubstep ou hip hop. Kwes se joue de ces sonorités pour en extraire sa propre mixture basée avant tout sur la pop. La salle se vide néanmoins car les longueurs de certains morceaux en drum’n’bass instrumentale ont du en ennuyer plus d’un. Il semblerait qu’après les sprinteurs de Zammuto, le marathonien Kwes ait plus de mal à séduire. On retiendra le single Bashful sans être totalement conquis par un concert en dents de scie.

La dernière nuit au Parc des Expositions débute avec le concert d’une française dont le disque, enregistré en collaboration avec Kevin Parker de Tame Impala, fait beaucoup parler en cette fin d’année : Melody’s Echo Chamber. On a dès les premières notes l’impression d’assister à un concert de la formation australienne, au point de pouvoir chanter Solitude Is Bliss sur les variations psychédéliques de la première chanson. La voix s’inspire quand à elle de Kazu Makino mais en bien plus faux. Après des débuts chaotiques où les fausses notes sont difficilement rattrapées, Melody’s Echo Chamber se chauffe un peu plus en offrant les quelques bons passages de son album, comme le single I Follow You. Melody Prochet tente d’accrocher sa voix à quelque chose en maintenant ses mains en l’air au-dessus de son clavier mais cela semble difficile. Si les compositions sont bonnes, leur adaptation live ne fera pas date. Les morceaux en français sont légèrement mieux assurés, comme la jolie Bisou Magique faisant penser à Melody de Blonde Redhead. Après quelques énervements instrumentaux, le groupe nous gratifie d’une reprise mal assurée de Jane B de Serge Gainsbourg. Si l’album a marqué les esprits, les adaptations live sont encore très loin du compte et manquent encore d’expérience et de répétitions malgré le bon moment passé en leur compagnie.

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On se dirige vers le Hall 9 dont le timing a pris une bonne demi-heure de retard puisque Black Strobe est encore en scène. Le groupe composé d’Arnaud Rebotini et du DJ Ivan Smagghe propose un électro rock basé sur des boucles de guitares électriques saturées. Rebotini est au chant Elvisien quelque peu monocorde, alors que l’on a l’impression que les guitares n’utilisent qu’une seule corde. La musique est extrêmement répétitive et la même rythmique revient sur chaque chanson. On comprend pourquoi le groupe a besoin de flammes qui jaillissent à l’avant de la scène comme à un concert de Rammstein pour nous divertir un peu. Bien sûr, il s’agit de musique électronique mais un peu de variété n’a jamais fait de mal, surtout sur des morceaux en boucle pendant douze minutes comme durant I’m a Man. Si l'on ajoute à cela une acoustique mauvaise, nous obtenons un concert des plus crispant dont on ne demande qu’à s’éloigner.

Le Hall 3 sera celui du rock ce soir : The 1969 Club est déjà en scène pour tenter d’enflammer un peu la soirée. Ce power trio local, que l’on avait découvert dans des bars rennais, attend de faire les Transmusicales depuis presque un an maintenant. Le groupe a-t-il évolué entre temps ? A part la chanteuse devenue blonde, il s’agit toujours d’un groupe de bar qui aurait pu échanger sa place avec plusieurs formations qui jouaient aux Bars en Trans’ le soir même (comme Peter Kernel). The 1969 Club emploient une guitare grasse et bluesy en reprenant certains codes des White Stripes, comme ce phrasé parlé adopté par la chanteuse. Malgré tout, cela ne va pas très loin et les quelques riffs et solos sont assez classiques, bien loin de ce qu’il faudrait pour nous exciter un peu.

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Les aller-retours continuent pour assister à ce qui doit être la surprise de la soirée : le DJ ƱZ (prononcer UZI, comme l'arme). On ne connaissait que peu de choses sur l’identité du monsieur, si ce n’est quelques remixes de Foreign Beggars et Alex Metric postés sur la toile. Et si c’était Skrillex disent les plus blagueurs ? Non, même si on ne le voit pas derrière son costume de ninja. Son électro hip-hop hésite entre des beats supra rapides et des basses dubstep lancinantes. C’est strident et lourd alors que le DJ s’amuse à placer le rire méchant de Thriller un peu partout dans ses mixes. La jeunesse se régale en tout cas, mais on admet son impuissance face au phénomène, ayant pratiqué trop de soirées dubstep à public fou en 2012 pour continuer. Un seuil a été atteint.

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Un bon groupe de rock anglais, voilà ce qu’il nous fallait pour peut-être voir quelque chose d’intéressant ! The Struts arrivent déchainés devant le public, pour le concert de cette année durant lequel nous nous serons le plus souvent retrouvés la tête dans la paume de la main. A croire que le groupe a lu “faire un concert de rock pour les nuls“ avant d’entrer en scène. Toute la caricature y est : riffs gras connus et reconnus, chanteur imitateur de Mick Jagger, chœurs faciles à reprendre et à retenir, look androgyne... Si la voix de Luke Spiller est plutôt entrainante, on croirait qu’il a le jeu vidéo “Dance Dance Mick Jagger“ face à lui.
Allant jusqu'à conclure une des chansons par Twist and Shout des Beatles, le groupe de Derby propose ensuite une deuxième reprise, Jumpin’ Jack Flash des Rolling Stones. Alors bien sûr, tout le monde doit se baisser en même temps et se relever quand la musique reprend : ça s’est fait. Ce que l’on n'avait jamais vu : donner l’URL complète de sa page facebook et demander au public d’aimer la page entre deux chansons. Ces anglais sont imbattables. Comment en est-on arrivé à un tel simulacre et à l’assumer ? On en reste médusé.

Retour à l’électro avec les canado-écossais de TNGHT. On va toujours plus loin dans l’accélération du tempo alors que les festivaliers s’élèvent du sol sur Higher Ground et son sample de voix féminine répété à l’infini. Le duo sait aussi se faire planant sur Chimes et ses imposantes basses en phase terminale. Des formes géométriques lumineuses en LED apparaissent à l’arrière du promontoire de machines faisant apparaître et disparaître une foule les bras levés au son des breaks hip-hop ou crunk du duo. Il y a comme un vrai contraste d’ambiance entre les halls du Parc des Expositions !

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Qui va sauver cette soirée ? On a enfin trouvé la réponse au concert de Hot Panda. Ce trio canadien, forcément, propose une pop malicieuse et entrainante portée par la voix débridée de Chris Connely, par la jolie bassiste Catherine Hiltz... et par un batteur à tête de cheval. Malgré des compositions plutôt joyeuses, le groupe de Vancouver n’oublie pas d’y insuffler un indie rock où la voix hurlée de Connely est adoucie par les chœurs féminins comme sur Cold Hands/Chapped Lips dont l’adaptation live a pris une forte dose de grunge. On comprend mieux l’influence lorsque Hot Panda décide de reprendre spécialement pour les Transmusicales les deux premières chansons que le leader a appris à la guitare à Bourges : Breed et Territorial Pissings de Nirvana. On vous passe les sauts en l’air de votre serviteur, forcément associés à ces chansons dans un festival à 3h du matin. Après ces moments débridés, les voilà qui enchainent leur tube See You All Around dans une version des plus dansantes. Les anciens ou nouveaux morceaux sont prolongés dans des passages instrumentaux diaboliques. Le moment où Catherine Hiltz joue de la basse et de la trompette en même temps en aura charmé plus d'un. La pop gentillette à laquelle on s’attendait en écoutant les livraisons studio du groupe se transforme en un rock fougueux et incisif se terminant par un slam du chanteur (le premier de sa vie) dans une ambiance de feu. Sans nul doute, l’un des grands moments de ces Transmusicales.

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Nous entrons finalement dans le Hall 4 pour terminer la soirée avec tout d’abord les Sud-Africains et Hollandais de Skip&Die. Né d’une collaboration entre la chanteuse Catarina Pirata, le producteur Crypto Jori et des artistes sud-africains, ce projet déploie un hip-hop dansant mêlé à des sons électroniques planant et des percussions plus traditionnelles. La rappeuse s’essouffle dans un flow décoiffant ultra-rapide, ponctué de pas de danses sautillants. Les DJs de Cuir! Moustache leur succèdent pour terminer la soirée au son d’un électro lo-fi assez dur à digérer. Portés par la vidéo Youtube de leur tube Cuir Cuir Cuir Moustache, les 2 DJs mixent leur hip-hop agressif devant un écran diffusant en permanence les deux mots. On ne résistera pas longtemps à l’envie d’en finir.

C’est dans la chaleur du cuir que s’achèvent ces 34ème Transmusicales qui furent un réel succès au niveau des entrées puisque les soirées du vendredi et du samedi ont affiché complet alors que celle du jeudi a tout de même attiré 4500 festivaliers. S'il ne fallait retenir qu’un groupe par soir, on citerait volontiers Team Ghost, Phoebe Jean & The Air Force ainsi que les fabuleux Zammuto. A cette liste, nous pouvons ajouter Hot Panda, Doldrums ou Paul Thomas Saunders alors que nous espérons en oublier certains assez rapidement. Nous n’oublierons néanmoins pas que le festival rennais fêtera sa 35ème année l’an prochain pour une édition que nous attendons avec impatience !
artistes
    Alphabet
    Attaque
    Avondale Airforce
    Baloji
    Black Strobe
    Compuphonic
    Crane Angels
    Cuir! Moustache
    Darko
    Get a Room!
    Get Your Gun
    Gomina
    Hola a Todo Del Mundo
    Hot Panda
    How We Tried... Olivier Mellano
    JC Satàn
    Kölsch
    Kosmo Pilot
    Kwes
    La Gale
    Licornia
    Lonely Walk
    Melody's Echo Chamber
    Red Sunrise
    Shazzula
    Sinkane
    Skip&Die
    Spitzer
    St. Lô
    Superpoze
    TNGHT
    The 1969 Club
    The Octopus
    The Struts
    ƱZ
    Wanted Posse
    Zammuto
    Zam Rock
    Zeds Dead