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Vieilles Charrues

Carhaix, du 18 au 21 juillet 2013

Live-report rédigé par Clémentine Barraban le 13 août 2013

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Ultime journée de l’édition 2013 du festival des Vieilles Charrues et non des moindres. Le dernier concert est synonyme d’apothéose, la dernière nuit met les bouchées doubles dans l’art de faire la fête. L’objectif étant de revenir à Paris un peu moins parisien et avec une dose suffisante de breizh dans les veines pour tenir jusqu’à l’année prochaine.

La fine pluie tombée la veille a été très appréciée durant la prestation de Neil Young mais n’a pas réussi à rafraichir totalement l’atmosphère et les rayons brulants du soleil sont toujours présents aux festivités. Idée souveraine : aller chercher l’ombre des scènes. L’air y est plus respirable et les agents de sécurité viennent régulièrement soulager les corps transpirants à coups généreux de jets d’eau.
A l’ombre de Kerouac, The Vaccines sont là pour réveiller ceux qui somnoleraient encore. Entre pop candide et punk façon Ramones, le rock du quatuor sonne d’avantage californien que londonien, mais le style est assumé avec entrain et la sauce prend. Les guitares font les belles, les rythmiques balancent ce qu’il faut d’énergie pour que s’y pose gracieusement la voix charismatique du leader barbu Justin Young qui n’a plus qu’à laisser agir le naturel pour faire crier la festivalière. La plongée indie rock est finalement dansante à souhait et les premiers rangs s’agitent frénétiquement en reprenant les refrains par cœur. Pour les néophytes qui n’ont pas leurs tubes en tête, la prestation pleine d’humilité aura été une mise en jambe idéale à défaut d’être un concert inoubliable.

La moyenne d’âge du public de The Vaccines n’était déjà pas bien élevée, mais dès que ces derniers ont déserté la scène voilà que la barrière se retrouve investie par une troupe d’adolescents pas franchement frais et largement braillants, barbouillés de peinture aux couleurs du groupe annoncé sur Kerouac après l’intermède d’installation. Difficile d’imaginer une formation comme Alt-J inspirer un comportement de fanatique de bas étage, et pourtant... il y a bien là de quoi gâcher le plaisir ou, au minimum, donner l’envie de s’éloigner des premiers rangs et tenter d’en profiter de loin. Les quatre anglais font leur entrée, déchainant une hystérie déplacée chez les jeunes imbibés. Agaçant. Mais l’atmosphère enchanteresse d’Alt-J est bien là, glissée dans les morceaux délicats de An Awesome Wave, presque tous joués. Les morceaux phares – Matilda et Breezeblocks – reçoivent une ovation grandiose, surtout lorsque que l’on pense que le groupe était inconnu du grand public il y a encore un an. A présent, le show comme la musique sont à la hauteur de grandes scènes de festival, mais ce qu’il en résulte est que la communion qu’inspire Alt-J ne doit pleinement se vivre que de façon plus intimiste.

Il est temps d’aller chercher refuge à la scène Glenmore mais pour y trouver cette fois une ambiance « muy caliente » authentique importée tout droit du Mexique par l’icône de rock latino, Monsieur Carlos Santana. Son public est également venu de loin et en nombre pour assister à l’événement. Du vieux briscard de festival qui étrenne fièrement son t-shirt Santana datant des années 60 à l’ado apprenti musicien dopé à la discographie de ses parents, plusieurs générations de fans s’agglutinent devant la scène pour prendre leur leçon de gratte d’excellence par l’un des meilleurs guitariste de tous les temps.
Nostalgie semble être le maître mot car l’écran géant du fond de scène projette des images de Santana lors de concerts passés aux environs des années Woodstock, alors que la partie chant est assurée par deux jeunes latinos qui donnent un bel élan de fraicheur et de dynamisme à la musique de Carlos, en particulier sur Sunshine Of Your Love qui s’offre sous un nouveau jour. Mais bien loin de crouler sous le poids de l’âge, ce dernier présente, avec une fierté non dissimulée, sa charmante épouse Cindy Blackman, laquelle se dévoile déesse à la batterie avec une démonstration à couper le souffle. Alors que la température en fosse se calcule en déhanchés et en mouvements de salsa, celle-ci grimpe encore de quelques degrés quand Carlos et la belle Cindy se réunissent derrière le micro et se montrent peu avares en baisers. C’est aussi l’occasion de faire le discours sans lequel un live de Santana ne serait pas complet, celui qui parle du pouvoir de l’amour sur la paix mondiale, ce si vieux message à la portée si intemporelle. La messe est dite et l’euphorie reprend de plus belle jusqu’à la fin des deux heures de show au cour desquelles Santana passe solennellement d’une guitare à l’autre et laisse agir la magie de l’instrument d’une maîtrise effleurant le génie. La fête est belle, chaleureuse et endiablée. En un mot : perfecto !

L’approche du dernier concert du dimanche soir a toujours un goût doux-amer. On sait qu’on va en prendre plein les yeux et les oreilles pendant deux bonnes heures, mais on sait aussi que pour retrouver la saveur de l’expérience il faudra dès le lendemain revenir à la vie quotidienne et patienter les 365 jours suivants. La mission de l’ultime groupe de l’édition est par conséquent de la jouer assez magistral pour poser un voile sur le cafard. Cette année la tâche incombe à un groupe de versaillais qui a déjà fait plusieurs fois le tour du monde et propagé la french touch, dont ils sont les ambassadeurs. Les fans sont bien évidemment au rendez-vous pour ambiancer les premiers rangs avec une excitation communicative. La scène s’illumine d’une myriade de faisceaux pour accueillir Phoenix.
Une musique classique comme introduction et Thomas Mars et sa bande éblouissent déjà en se jetant sans élan dans les morceaux synth-rock de leur dernier album Bankrupt!. Les lumières s’impriment dans les rétines et l’image de ces musiciens aussi bourrés d’humilité que de charisme se fait persistante et accompagne leur musique électrisante à souhait. Si l’efficacité des titres bien connus comme Lisztomania n’est plus à démontrer, constater et vivre leurs effets à grande échelle sur une foule de 60 000 personnes a quelque chose d’hypnotique et d’euphorisant. Le champ plein à craquer ne semble pas impressionner Phoenix, lesquels livrent un live rodé et puissant, fort de précisions et d’une élégante simplicité. Pour achever en apothéose, le chanteur s’est lancé le périlleux défi de se frayer un chemin dans la fosse jusqu’à son extrémité pour parcourir la totalité de sa longueur dans l’autre sens... porté par la foule. Le moment est intense et l’exploit est salué. Les versaillais ont insufflé à la plaine une douce et pénétrante ivresse, clôturant ces quatre journée folles par un show éclatant, brillamment soutenu à la mesure du festival.

Retour à la réalité. Les camarades de la région parisienne se retirent et laissent la place aux organisateurs des Vieilles Charrues qui, en bonne coutume, nous octroient le discours de clôture de l’édition. Bilan, remerciements et une pensée encore pour Jean-Philippe Quignon, co-président du festival décédé l’année dernière. Les programmateurs annoncent avec enthousiasme le report de la venue d’Elton John à l’année suivante. Connaître une tête d’affiche un an à l’avance est bien rare alors tout le monde se délecte de la nouvelle en marchant vers la sortie. Au-dessus des têtes, une immense toile affiche « 17, 18, 19, 20 juillet 2014, à l’année prochaine ! ».

Le rendez-vous est pris.
artistes
    Alt-J
    Barzaz
    Busy P Ed Banger Megamix
    Carlos Santana
    Charles Bradley and His Extraordinaires
    Dead Sailors
    Eostiged Ar Stangala
    Goldwave
    Jack Danielle's String Band
    La Femme
    La Gale
    La Mal Coiffée
    Lou Doillon
    Marc Lavoine
    Marie-Pierre Arthur
    Mermonte
    Mesparrow
    Phoenix
    Skip&Die
    The 1969 Club
    The Vaccines
    Turbo Sans Visa