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Primavera Sound Festival

Barcelone, du 28 au 31 mai 2014

Live-report rédigé par François Freundlich le 11 juin 2014

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Le véritable Primavera Sound Festival, avec le soleil au beau fixe cette fois, commence en ce jeudi sur le Parc del Forum. La soirée s'annonce compliquée puisque d'excellents groupes vont se produire en même temps sur toutes les scènes du festival, nous obligeant à faire des choix cornéliens, voire à se couper en deux. On commence donc tout doucement en prenant les dilemmes les uns après les autres.

Asseyons nous tranquillement sous la petite tente de la scène Ray-Ban Unplugged pour un showcase de Caveman réjouissant au possible. Les légères guitares pop des New-Yorkais ouvrent idéalement la journée. La voix rocailleuse du leader se mélange aux harmonies des chœurs de ses acolytes sur des compositions enjouées et dansantes. Le coté planant de leurs morceaux est laissé de coté pour des versions brutes et bluesy avec un soupçon d'americana : la classe incarnée.

Déplaçons nous vers les grandes scènes, ou nous avons choisi de nous installer pour les futurs concerts des têtes d'affiches de cette journée. Real Estate font scintiller leur pop légère et bucolique sous un soleil qui tape fort : voilà ce qu'on appelle un groupe idéal pour un début de Primavera. Les rêveries mélancoliques du chanteur aux allures de geek Martin Courtney transparaissent dans des compositions à la reverb sautillante qui fleure bon l'été. On a bien vite l'impression d'être dans un monde parallèle avec cette vue sur la skyline de Barcelone et ce concert brodé dans la dentelle. La guitare twee pop chevauche quelques saturations psyché masquées mais forçant le mouvement de tête permanent. Le ciel bleu et Real Estate, quoi de mieux ?

Nous continuons dans la pop somptueuse avec Midlake. La guitare se fait plus acoustique, accompagnée par ce piano mélancolique torturé qui fait le charme du groupe. Entre ballades profondes et déchirement électriques intenses, la voix du nouveau chanteur Eric Pulido fait plaisir à entendre. Plus délicate, elle les rapproche davantage des Fleet Foxes, même si les solos de guitare électrique distordue 60s sont de la partie, rendant les instrumentations bien plus rock qu'à l'accoutumée. Midlake s'évadent dans des instrumentaux ravageurs à faire s'écarquiller les yeux. Le groupe n'hésite pas à enchainer les meilleurs titres où l'ancien frontmen Tim Smith se produisait, signe de la confiance en ces nouvelles prestations très réussies. Midlake montrent une nouvelle facette psychédélique avec ces échauffourées excitée mais n'oublient pas la subtilité comme sur la très belle Roscoe. La part belle est néanmoins laissée aux morceaux du dernier album Antiphon. Midlake ont changé mais reste dans nos tablettes.

Retournons sur la grande scène pour assister à l'adaptation live de l'un (du ?) des albums les plus réussis de ce début d'année : celui des Californiennes de Warpaint. Le quatuor va délivrer l'une des meilleures prestations du festival sous le soleil couchant. Les voix évaporées des demoiselles se répondent tandis que les guitares s'y glissent dans une quiétude écorchée. On entre en extase dès le premier titre Keep It Healthy, même si le combo cheveux rose/combinaison zébrée suscite quelques interrogations. C'est l'enchainement de ces deux compositions magistrales : l'enlevée Undertow et la dissonante Love Is To Die, qui débutera notre lente lévitation ne s'achevant qu'à la fin de la prestation des charismatiques demoiselles. Habitées par leur coolitude infinie, les filles déploient leurs voix monocordes nonchalamment, du bout des lèvres. Elles ont largement gagné en prestance et la timidité qui transparaissait de leurs précédentes prestations a quasiment disparu. Elle déchainent leurs morceaux et ne s'en cachent pas. La surprise de fin de set viendra de cette reprise de David Bowie : Ashes To Ashes tout au bord du précipice, comme des Warpaint en pleine rupture savent le faire. L'enchainement avec l'entêtante Elephants, issu de leur premier EP sonnera comme la perfection absolue. On repart de ce concert ensorcelé et avec l'envie de revoir les filles dans une salle de concert plus intimiste.

Le premier dilemme de la soirée approche mais nous décidons de ne pas choisir et de suivre une partie des deux concerts. On se rend sur la scène ATP pour la reformation des Neutral Milk Hotel ou une foule immense s'est retrouvée pour écouter des adaptations d'un de leurs albums cultes : In The Aeroplane Over The Sea. La joyeuse bande est en forme, faisant raisonner un folk acoustique à la fois bancal et maîtrisé tout en sautillant sur place. Les accordéons, bandonéons et cuivres héroïques sont portés par une rythmique un brin punk. Le tout est animé par la voix reconnaissable entre mille de Jeff Mangum, caché derrière une toison impressionnante qui ne laisse transparaître que ses oreilles.
Ce timbre nasillard qui dévie souvent de sa trajectoire sur de grandes envolées lyriques peut inspirer autant qu'il peut agacer sur la longueur. Le leader n'aura besoin que de sa simple guitare acoustique pour interpréter en solo l'hymne Two Headed Boy repris par l'ensemble de l'assistance dans un moment de communion, avant d'être rejoint par ses acolytes sur The Fool. Neutral Milk Hotel, ou comment transformer un « I love you Jesus Christ » en pop de stade : King Of Carrot Flowers Part 2 & 3 étant repris par plusieurs milliers de personnes, puis énervé par un banjo joué à l'archet ou encore un biniou. Nous quittons néanmoins ce concert déjanté au possible pour rejoindre la belle Annie Clark sur la scène Sony.

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St Vincent a déjà débuté un show que nous ne voulions pas manquer puisque l'américaine a la réputation de livrer des prestations endiablées. La tigresse se pose en show girl avec sa crinière peroxydée, ses talons aiguilles et ses danses lascives. A l'avant de boucles synthétiques pointilleuses, Annie Clark se saisit subitement de sa guitare électrique pour en sortir des crissements tout en distorsion telle une guitare héroïne d'une classe absolue, se penchant et se tordant sur son instrument.
Le concert sera tout en puissance, avec cette pointe de délicatesse dans la voix lorsqu'elle atteint des aigus inspirés. On gardera longtemps en tête ce moment ou la chanteuse escaladera les cubes surplombant l'arrière de la scène pour interpréter une version ralentie et cosmique de Cheerleader avant de s'y coucher langoureusement et de s'effondrer la tête en bas. Ses solos électriques sombres sur fond de synthés délurés auront marqué cette journée. On espère revoir la belle Annie très bientôt dans nos contrées.

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Les têtes d'affiches s'enchainent et après Annie Clark, c'est le cœur des filles qui s'apprête à chavirer puisque le grand Josh Homme apparaît sur la scène Heineken. Les Queens Of The Stone Age sont partis sur les chapeaux de roue puisqu'ils ont directement enchainé les deux premiers titres de leur album culte Songs For The Deaf avec une No One Knows épuisant nos réserves vitales. Josh Homme se dresse fièrement au centre, énervant sa voix en constante tension jusque dans ces fameux aigus sur fond de refrains accrocheurs. Le son est d'une ampleur rarement atteinte, entre saccades rythmiques et infrabasses terrifiantes. Les titres semblent être de plus en plus rapide et les mouvements de foule s'intensifient à l'avant. Josh harangue la foule sur Feel Good Hit Of The Summer avant de calmer le jeu sur une superbe version solo en piano voix de ...Like Clockwork. Queens of the Stone Age livrent un concert d'une rare cohérence, sans vouloir enchainer tout leurs tubes mais en piochant dans un répertoire qui commence à peser autant qu'un annuaire du désert. Bien sûr, Little Sister, Make It Wit Chu et Go With The Flow vont parfaire l'entrainement sportif subit par nos chevilles depuis le début de la soirée. La machine de guerre des
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Restons dans le rythme puisque la tête d'affiche du festival s'apprête à dégainer : la troupe Montréalaise d'Arcade Fire est bien en place. Les conditions sont plus compliquées que lors de leur dernière pré-tournée avec énormément de festivaliers au mètre carré et une avant-scène malheureusement réservée à ceux ayant payé leur pass VIP. On essaye tant bien que mal d'assister à la performance d'un groupe dont on a pu apprécier les qualités dans des lieux plus intimistes. Un « homme-Reflektor » couvert de miroirs apparaît au milieu de la foule pour lancer le concert et c'est le premier single du dernier album qui s'élève dans la nuit Barcelonaise. Le marathon discoïde Reflektor est enchainée avec la haïtienne Flashbulb Eyes, accompagnée de percussions dub laid-back. Les ambiances haïtiennes vont planer sur une grande partie de la prestation d'Arcade Fire, même si les anciens titres sont préservés, restant dans le défoulement sauvage à l'image de l'épique enchainement Power Out – Rebellion (Lies). L'excitation y est déjà à son paroxysme.
Joan Of Arc se plonge dans le Rococo pour des adaptations plutôt surprenantes. Mais les extraits de leur album Funeral resteront les plus riches en émotions, comme sur l'exquise Tunnels qui parviendra à faire tomber la Neige sur le Parc del Forum. Le dernier single We Exist voit apparaître son fameux clip dansant sur les écrans, tandis qu'une version douteuse de My Body Is A Cage introduit la jouissive Afterlife. Alors que les quatre mirroirs surplombant la scène réfléchissent le public, Régine Chassagne rejoint le milieu de la fosse pour interpréter It's Never Over (Oh Orpheus) en face à face lointain avec Win Butler. La belle enchainera ensuite sur son fameux Sprawl II (Mountains Beyond Mountains) qui dérivera sur une reprise du morceau espagnol « Tequila », le groupe ayant pris l'habitude de reprendre des chansons du pays sur cette tournée. On imaginait davantage Régine sur Porque Te Vas mais Arcade Fire nous ont encore pris de court. Les confettis exploseront dans la folie générale de Here Comes The Night Time avant la communion finale d'un Wake Up repris par l'ensemble du festival. Nous n'avons pas assisté à la meilleure prestation d'Arcade Fire mais celle-ci restait de très haut vol.

Nous basculons dans une ambiance plus électronique à partir de deux heures avec les Berlinois de Moderat, composé des membres de Modeselektor et Apparat. Les basses frétillantes se déploient à l'avant de nappes synthétiques envoutantes et de quelques samples angoissants. La voix de Sascha Ring apporte une face pop à une musique restant dans l'introspection et le mystère. Le trio évolue dans l'ombre des visuels abstraits qui apparaissent à l'arrière de la scène, ce qui n'en fait pas un show visuellement attractif. Malgré tout, Moderat conserve l'énergie brut de Modeselektor en y insufflant le lyrisme écorché d'Apparat pour des compositions poussant davantage à l'extase qu'à la danse. Les beats minimalistes et sombres noués de boucles cathartiques nous secoue de l'intérieur, le tout restant dans un tempo assez lent. L'expérience Moderat est réussie.

Pour terminer dans la fête et la danse, les anglais de Metronomy sont l'ultime des nombreuses têtes d'affiche de la soirée. Invité à se produire sur la scène Rayban, toujours la meilleure du festival, le quintet aux synthés a installé ses nuages roses à l'arrière de ses claviers blancs. La boule à facettes est de sortie et le public est prêt à remuer sur les tubes répétitifs du groupe du Devon, à commencer par un Love Letters enchainé avec The Look. Tout cela reste néanmoins assez convenu, avec ces gimmicks de synthé qui reviennent sans cesse, restant en surface pour ne jamais s'enflammer. Visuellement, la simplicité et l'efficacité font mouche : nos regards sont posés sur le sautillant bassiste et l'énergique batteuse. Mais le seul moment qui parviendra à nous déchainer sera une version entêtante au possible de Corinne, excitée dans des riffs de guitares saturées et des boucles de claviers hypnotisant. Le concert a stagné dans le cheap mais, heureusement, il y avait Corinne !

Voilà une première journée marathon de Primavera Sound Festival comme on les aime avec des têtes d'affiches grouillantes. Enchainer Midlake, Warpaint, Neutral Milk Hotel, St Vincent, Queens Of The Stone Age et Arcade Fire ne nous arrivera pas de sitôt et il fallait savoir en profiter !
artistes
    Sean Carlson (FYF /USA)
    Él Mató A Un Policía Motorizado
    Fuckin' Bollocks
    Colin Stetson
    Volcano Choir
    Wind Atlas
    Girl Band
    Barcelona 82
    Lost Fills
    Julian Cope
    Föllakzoid
    Grupo de Expertos Solynieve
    El Petit de Cal Eril
    Real Estate
    Caveman
    Glasser
    Rodrigo Amarante
    Tórtel
    El Último Vecino
    The Ex
    Nacho Vegas
    Joan Colomo
    Girl Band
    Pond
    A Winged Victory For The Sullen
    Midlake
    Sun Ra Arkestra
    Majical Cloudz
    Aries
    Antibalas
    Caveman
    Los Ganglios
    Warpaint
    Jamie xx
    Svper
    St. Vincent
    Neutral Milk Hotel
    Peter Hook & The Light
    Föllakzoid
    Chrome
    Kosmos
    Future Islands
    Standstill
    El Último Vecino
    Shelby Grey
    Queens of the Stone Age
    CHVRCHES
    Bo Ningen
    Shellac
    Fort Romeau
    Arcade Fire
    The Range
    Touché Amoré
    Andy Stott
    Charles Bradley
    Disclosure
    William Dafoe
    Moderat
    Lasers
    Julio Bashmore
    Lunice
    Metronomy
    Jamie XX