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Eurockéennes

Belfort, du 4 au 6 juillet 2014

Live-report rédigé par Mélissa Blanche le 16 juillet 2014

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dimanche 6
Cette édition 2014 des Eurockéennes de Belfort n'a pas encore dit son dernier mot puisqu'il nous reste encore à vivre aujourd'hui quelques petits moments de magie.

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La journée commence tôt avec les Britanniques de Uncle Acid And The Deadbeats. Du lourd. L'oncle acide n'est autre que le descendant direct du heavy métal des années 70. Le groupe a d'ailleurs assuré la première partie de Black Sabbath lors de leur dernière tournée européenne. Autant dire qu'on a là du bon gros son, avec ces morceaux quasiment instrumentaux portés par une guitare totalement jouissive. Néanmoins, les non-initiés auront du mal à se laisser emporter par ce mur du son à base de guitares saturées où les morceaux semblent se suivre et se ressembler.

Changement total d'ambiance avec l'entrée en scène de Patrice, fournisseur de bonne humeur depuis 1999. Le Germano-Sierra Léonais nous met le sourire aux lèvres dès les premières notes, aidé par un soleil radieux qui réchauffe le public de la Grande Scène. Aujourd'hui, la musique de Patrice – du reggae habillé de petites teintes de hip-hop et de soul – prend une tonalité très rock sous l'effet d'une batterie extrêmement forte et présente. L'inventeur de la « sweggae music » – assemblage des mots « reggae » et « swagga » – a ouvert la voie à des artistes comme Ayo ou Selah Sue qui avaient assuré ses premières parties. L'homme a surtout l'art de la communication avec le public, nous faisant chanter, danser et sauter à de multiples reprises.
Au paroxysme d'un de ces moments de communion, le chanteur grimpe sur l'un des piliers de la scène pour nous tendre le micro. Le bassiste est d'une humeur plus festive encore, se déhanchant sur la scène sans peur de faire bouger son postérieur. Nous avons bien du mal à quitter la scène pour rejoindre Biffy Clyro au moment où Patrice interprète son tube Soulstorm.

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A entendre les Écossais de Biffy Clyro, le regret est d'autant plus grand d'avoir dû quitter l'atmosphère de joie de la Grande Scène. Si le groupe rentre davantage dans les clous de Sound Of Violence, le concert n'en est pas plus intéressant pour autant. Biffy Clyro nous donnent aujourd'hui l'impression d'une musique un peu trop mainstream, à la frontière du hard rock FM que certains ont pu écouter dans leurs jeunes années. Pas de mouvement de foule extrêmement impressionnant dans la fosse non plus. Nous resterons largement sur notre faim. Une soudaine averse achève de nous faire fuir.

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La pluie bel et bien enterrée, nous voici maintenant dans les rangs du public de Foster The People. Après l'immense succès de leur premier album Torches, les Américains sont revenus cette année avec un second opus intitulé Supermodel dont ils joueront quelques morceaux aujourd'hui. Or le deuxième n'a pas exactement la puissance électro-pop et la conviction du premier. Nous avons initialement commis la grossière erreur de nous placer dans tous les premiers rangs pour nous rendre compte très vite qu'ils ont été envahis, comme c'est souvent le cas à un concert de Foster The People, par de très jeunes fans hystériques guère familières du concept de pogo. Fort heureusement, en reculant de quelques rangs, l'audience se fait plus éclectique et très vite, les pogos commencent à se mettre en place et certains festivaliers commencent à léviter au-dessus de la foule. Le concert est bien rythmé et la musique de Foster The People fait qu'il n'est pas bien difficile de danser. Le groupe a de l'énergie à revendre à l'image d'un Mark Foster bondissant. Seul hic : plus sa célébrité grandit et plus le chanteur a des allures de poseur, très conscient, trop conscient, de son charme.

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Nous avons déjà vu bien des groupes durant ces trois jours, nous avons déjà bien pataugé dans la boue, bien chanté, bien sauté et bien dansé ; mais nous n'avons pas encore connu cet instant sublime, ce soupçon de légende, ce moment d'éternité qui se présente à présent devant nous en la personne de Robert Plant. L'ancien chanteur de Led Zeppelin entre en scène et c'est un fragment de l'histoire du rock qui se tient devant nous. Et cependant la nostalgie ne fait pas tout et nous aurions pu nous ennuyer à mourir si Robert Plant n'avait fait que reprendre ses vieilles chansons sans enthousiasme, la jeunesse en moins. Il n'en sera rien. Sa formation solo, The Sensational Space Shifters, propose quelque chose de tout à fait nouveau et intéressant : du rock psychédélique aux influences orientales et africaines avec une touche électronique apportée par une référence du trip-hop dénommée John Baggott.
Dès les toutes premières notes, la formule séduit, la musique se fait totalement planante. L'effet produit ne peut être que magnifié par la beauté du coucher de soleil qui s'étale devant nous. Non seulement Robert Plant innove musicalement mais il maitrise également totalement l'exercice du live et du jeu avec le public. C'est un bavard, il nous parle des origines du rock, nous raconte des histoires. Lorsqu'il reprend certains morceaux mythiques de Led Zeppelin, il se réinvente au lieu de se répéter. La touche orientale et africaine est toujours là, grâce à la contribution de Juldeh Camara. Le concert atteint son paroxysme lorsque le groupe interprète Whole Lotta Love, un vrai moment de bonheur. Et parce que cela ne suffisait pas, les musiciens clôturent leur set sur Rock'n'roll avant de saluer humblement le public. Sans conteste l'un des meilleurs concerts de ce festival, talonné par la performance des Pixies.

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Last but not least, The Black Keys. Les génies du blues rock n'ont musicalement plus rien à prouver. Il y a cependant comme un petit goût de déception devant ce concert tant attendu. L'interprétation n'a pas toujours l'urgence et la puissance que l'on aurait été en droit d'attendre. Les musiciens jouent la montre et laissent passer du temps entre chaque morceau, faisant relâcher la pression un peu trop régulièrement.
Dan Auerbach et Patrick Carney sont accompagnés de musiciens à la guitare et basse, ce qui, selon les plus anciens, n'a pas la force des vieux concerts où ils n'étaient que deux. Qui plus est, l'interprétation est un peu trop lisse et monochrome quand elle aurait pu être plus variée et plus viscérale. Un exemple parmi d'autres : leur dernier album Turn Blue perd totalement de son côté disco, ce qui a le triste effet d'uniformiser la setlist. Quitte à réaliser un album plus pop et moins blues que les précédents, autant en assumer la différence. Ainsi, sur le single furieusement dansant, Fever, les synthés, peu audibles, semblent gommés, tant et si bien que le morceau apparait beaucoup plus rock qu'il ne l'est en studio. Il faut dire que la balance n'est pas toujours idéale, avec des basses globalement trop présentes. Cela étant dit, le concert des Black Keys n'en reste pas moins l'un des moments les plus excitants et les plus électrisants de ce festival. La fosse n'est pas aussi mouvante qu'elle pourrait l'être, mais aux endroits où elle se déchaine, il faut dire que ça se sent et que ça fait mal. Le public est tout entier acquis à la cause de nos Américains qui ne manquent pas de tubes à interpréter, entre Lonely Boy, Gold On The Ceiling, Next Girl ou encore Tighten Up.

C'est ainsi que s'achève pour nous cette 26ème édition des Eurockéennes de Belfort alors que les feux d'artifice éclatent dans le ciel et que les intermittents viennent une dernière fois prendre la parole sur scène. Le festival a connu cette année un nouveau record d'affluence : 102 000 personnes sur trois jours et des pass écoulés plusieurs mois à l'avance. La programmation éclectique n'aura pas manqué de faire le bonheur des amateurs de rock indé et notamment britannique. Après trois jours d'une météo complètement folle – alternant la canicule et la pluie, le chaud et le froid – nous rentrons chez nous en ayant bien mérité une bonne nuit de sommeil.
artistes
    The Black Keys
    Robert Plant and the Sensational Space Shifters
    Fauve
    Patrice
    Volbeat
    Biffy Clyro
    Foster the People
    Schoolboy Q
    SBTRKT
    Dakhabrakha
    Nathalie Natiembé
    Ghost
    Crew Peligrosos
    A Tribe Called Red
    I Am Legion
    Goat
    Uncle Acid and the Deadbeats
    Catfish
    Jonwayne
photos du festival