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La Route du Rock

Saint-Malo, du 13 au 16 août 2014

Live-report rédigé par François Freundlich le 26 août 2014

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Après plusieurs années de beau temps et de chaleur sur La Route du Rock, le vent a tourné sur cette 24ème édition puisque les conditions météorologiques sont loin d'être optimales. Les travaux sur le site du Fort de Saint-Père, toujours en attente de validation par les collectivités locales, n'auront lieu qu'en fin d'année et des lacs d'eau de pluie s'y sont déjà formés. Heureusement, la jolie Angel Olsen débarque pour nous remonter le moral.

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Les pieds dans l'eau, on s'approche de l'américaine à frange pour se lancer dans le bain bouillonnant du festival Malouin au son de sa folk pop défaillante. Armée nonchalamment de sa guitare électrique, l'ange humide articule à peine ses textes, conservant un air détaché et frondeur. Angel Olsen n'hésite néanmoins pas à afficher un large sourire en apercevant quelques K-Ways originaux ou autres regards priant les dieux de la pluie. Et cela fonctionne, puisque après avoir placé une serviette sur sa tête comme si elle sortait de la douche, la pluie s'arrête miraculeusement. Sa voix s'envole dans les airs, emportée par les assauts d'une guitare aux élans indie-rock persistants et dissonants. Insaisissable et énigmatique, Angel Olsen s'amuse dans un slow-grunge saisissant même si souvent redondant. La soirée est bien lancée.

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Après cette ouverture sur la petite scène-sirène des remparts, celle du fort accueille les américains de The War On Drugs. C'est devant un ciel irréel que le sextet des rues de Philadelphie fait raisonner les géniaux extraits de leur dernier album Lost In The Dream, mélangeant solos électriques intenses, effluves de saxophone baryton et expérimentations synthétiques. Un arc-en-ciel apparaîtra même au dessus de la scène, mais aussi à l'intérieur juste au dessus du groupe. Le chanteur ne s'appelle pas Adam Granduciel pour des prunes. Sa voix juvénile possède une fraicheur parvenant à faire vibrer les pores. Les compositions s'étalent, semblant ne jamais suivre un chemin prédéfini mais se modifier en permanence. Les jam de guitares lourds et psychédéliques s'élèvent dans des crescendos permanents lorsqu'un rythme tranchant transforme subitement le tout en d'aguicheuses pop songs. Entre un shoegaze transcendant et des influences Floydiennes, The War On Drugs nous ont fait plaisir, proposant le set le plus abouti de la soirée.

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L'ancien leader du groupe précédent, désormais occupé par sa carrière solo, s'apprête à leur succéder. Kurt Vile & The Violators ou le gang des chevelus, va prolonger l'ambiance rock'n'roll à souhait. Le son se fait bien plus lourd et les trois guitares envahissent l'espace de leurs assauts infinis. Kurt Vile envoie des chapes de plomb pesantes qui nous arrivent sur les épaules comme des enclumes de granit. Sa voix grave et monocorde se mêle aux riffs magnétiques s'évadant dans des solos crades réglés en mode old school. Avec cette lenteur en répétition, le temps s'étire de plus en plus et on commence sévèrement à s'ennuyer au milieu de cette fosse boueuse qui s'étend de l'autre coté du rideau de cheveux du chanteur. On aurait aimé que quelque chose s'échappe de la masse distordue et informe de guitares mais malgré la présence de Adam Granduciel sur scène, on ne retrouvera pas l'éclat des War On Drugs.

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Après cette dose de testostérone bien injectée, retour à la pop guillerette avec Real Estate. Voilà un groupe dont l'ambiance colle davantage à un après-midi ensoleillé avec une indie pop dreamy bercée par une voix lissée et enjôleuse. On secoue volontiers la tête à l'écoute de ces mélopées tranquilles mais possédant des reflets mélancoliques les rendant attachantes. Toutes ne parviendront pas à nous passionner mais les extraits de l'album Days comme It's Real restent des valeurs sures. La qualité du son de la scène aura peut-être diminué l'attrait pour une prestation qui nous aura paru meilleure à d'autres occasions. Reste la sensation de voguer avec cette légère guitare aiguë et lénifiante pour un moment barbapapa de free hugging.

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Mais les séismes électriques sont de retour sur la grande scène avec les foufous de Thee Oh Sees. Le joyeux zinzin en short John Dwyer est déjà en train de haranguer la foule avant même le concert, pressé de commencer qu'il est. Le tempo prend une sérieuse dose d'accélération avec des morceaux d'une durée minimale. En mode power trio, le batteur blond s'excite alors que le chanteur grogne de sa voix crispée avec ce style caractéristique de porté sautillant de guitare en hauteur. Il quitte son poste pour ajouter quelques effets virevoltants de synthé vintage ou de thérémine. Le lo-fi en suspension des californiens enflamme la Route du Rock même si la prestation n'est pas à la hauteur de leurs précédentes apparitions encore plus folles. Cela est peut-être du au changement de line-up récent, le groupe n'étant pas encore rodé. Thee Oh Sees quitteront d'ailleurs la scène après une quarantaine de minutes seulement, aussi pressés de repartir que de jouer.

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Des anglais foulent finalement le sol du fort de Saint-Père : le sextet Fat White Family continue sa tournée générale des festivals. Le braillard et charismatique chanteur au caleçon porté très bas n'hésite pas à donner de sa personne pour le bonheur de la gente féminine. Leur son part en vrille à tout moment, la chaine du vélo n'est jamais sur ses gonds et nous crispe les orteils dans les bottes. Ce joyeux bordel est diablement jubilatoire, reprenant tout ce que la perfide Albion a de plus sale. Fat White Family ne se prennent jamais au sérieux, entonnant avec ardeur leur garage salace sur des chants à tue-tête allant du faux au tréfonds. Un set amusant qui aura eu le mérite de nous énerver.

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La tête d'affiche électro de la soirée a installé son matériel sur la grande scène. Les canadiens de Caribou font leur retour à Saint-Malo après des Route du Rock Hiver 2008 et Été 2010 qui ont marqué les esprits. Nos esprits semblent ici légèrement perdus puisque Daniel V. Smith va avant tout présenter des extraits de son futur album. Nous découvrons donc la majorité des titres sur scène mais nous n'avons du coup que peu de repère sur lesquels nous accrocher. Les Melody Day et autres anciens morceaux sont oubliés, jusqu'à un final tonitruant où les tubes Odessa et Sun seront remixés sous un déluge de lasers et de stroboscopes. La voix claire et lumineuse du chanteur nous transporte alors que de subtiles beats s'accordent dans un electronica sibyllin. Après les chutes d'eau, les torrents de lumière.

Le duo américain Darkside, porté par Nicolas Jaar et Dave Harrington sera chargé de terminer la soirée au son des beats sourds et expérimentaux. Leur house psychédélique et sombre parvient à faire danser les quelques festivaliers récalcitrants mais le retour de la pluie aura raison de nos dernières forces. Cette première soirée mouvementée s'achève ainsi avec les souvenirs de bons moments comme The War On Drugs ou Caribou. On attendra néanmoins un peu pour s'enfiévrer davantage.
artistes
    Angel Olsen
    Caribou
    Darkside
    Johnny Hawaii
    Kurt Vile & The Violators
    Magnetic Friends
    Real Estate
    Thee Oh Sees
    Fat White Family
    The War on Drugs
photos du festival