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Eurockéennes

Belfort, du 1er au 3 juillet 2016

Live-report rédigé par Simon Cordat le 11 juillet 2016

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vendredi 1er
On plante le décor. Les Eurockéennes de Belfort est un vaste champ à l'herbe cramée où le soleil tape sacrément. C'est sous les rayons solaires que les festivaliers aux chapeaux oranges accourent vers la première scène (certains qui ont déjà trop chaud ont quitté le haut en commandant leur première pinte). Pas de doute, il fait bon vivre à Belfort : la relaxe est à son paroxysme.

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La tâche d'ouvrir le festival revient aux anglais du groupe Pumarosa. Direction la scène Club Loggia, et autant vous dire que nous n'avons pas été déçus. 18h45, ils montent sur scène ! L'irrésistible et pas moins charmante Isabel Henry affiche une robe grise et un large sourire tout au long du set, et ce dernier va se révéler très efficace. La musique rock atmosphérique, avec un soupçon de noisy, met tout le monde d'accord ; on découvre alors une énergie de jeu et une prestance du groupe à faire pâlir les mauvaises langues. Avec beaucoup d'arrangements de synthétiseurs et des notes de saxophone, Pumarosa bousculent dans un trip qui secoue rythmiquement : pas de ballades ni de pause, puisque la jeune femme est très communicative avec nous, d'où le public qui lui crie « I LOOOVE YOU » (admettons, ce sont les garçons qui l'on surtout dit). En outre, il est évident que le groupe propose des chansons qui fonctionnent sacrément bien pour le live, un paramètre confirmé par la longueur des titres et les fins improvisées. Isabel a la voix douce et haut perchée, mais devient une machine purement rock lorsqu'il s'agit de jouer de la guitare avec une baguette de batterie en fin de set. Dernier titre qui marque : Priestess, apogée live du groupe dans une ritournelle flamboyante et sexy, sans qu'il ne manque les déhanchés chorégraphiques de la chanteuse. On peut donc dire que le festival démarre très bien grâce à cette bonne chauffe qui précède les trois jours de musique.

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Plus tard, la grande scène accueille l'une des têtes d'affiches des plus attendues, les sympathiques The Last Shadow Puppets ! Ils offrent alors un concert exceptionnel, enchaînant les tubes qui ont fait leur réputation. Pour les plus sceptiques concernant leur dernier album, sachez que sur scène, l'énergie employée n'a rien à voir avec le disque. Il est 20h15, Alex Turner est encore sur son nuage et répète régulièrement dans le micro : « Comment ça s'écrit ? »... Quand à Miles Kane, le décontracté en veste Adidas, il tient la baraque avec sa Gibson ES-335 avec plus de réalisme que son compagnon : c'est une rock star, et il le fait savoir en hurlant dans le microphone durant Bad Habits. Mieux encore, la reprise de Totally Wired (du groupe The Fall) correspond tout à fait à sa personnalité débridée tandis que les cordes de guitares souffrent; ce n'est pas nouveau chez eux. D'Aviation à Standing Next To Me, le public venu nombreux est ravi et ultra mené à la baguette par les bras d'Alex, le chef d'orchestre burlesque qui sait se mettre à genoux sur le devant de la scène dans l'épopée pop orchestrale. Difficile de les décrire, car les deux amis sont d'immenses blagueurs. Instant crooner pour le trentenaire de Sheffield, la superbe reprise de Moonage Daydream de Bowie fait fureur puisque cet hommage à la touche TLSP (les cordes en plus, mais sans saxophone) ajoute de la niaque au set déjà bien embelli. Et quoi de mieux que de les voir lorsque le soleil se couche ? Le final In My Room dépote et chaque membre du groupe joue comme un cinglé en cette ritournelle d'accords qui flirte avec le psyché. Ils partent en nous envoyant mille bisous de la main. Petit hic : les anglais n'ont pas joué Everything You've Come To Expect, bien dommage pour ceux qui les découvraient pour la première fois... Une setlist de festival bien calibrée mais par manque de temps, des chansons ont dû être abandonnées. Cependant, on quitte la grande scène le sourire aux lèvres, avec la ferme conviction que vivre un de leurs gigs est une expérience à faire sans plus attendre.

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Par la suite, Vald le rappeur français attire autant de monde sur la plage que ceux qui s'amassent sur les stands de nourriture. À cette heure-là, l'alcool coule à flots. On attend patiemment le prochain groupe qui régnera sur la grande scène : le public est composé de fans quinquagénaires, avides de retrouver les ex-Téléphone rebaptisés Les Insus.
Le groupe a simplement changé de bassiste pour se reformer, ce qui ne les empêche pas de jouer à la perfection leurs meilleurs singles. D'ailleurs, nous comprenons vite que Les Insus donnent aux gens ce qu'ils veulent entendre, à savoir l'Âge d'or de Téléphone sous la forme d'un Best Of live ultra millimétré : pas de place pour d'éventuelles chansons composées actuellement (s'il y en a). En bref, Les Insus donnent un show et non un concert banal : tout le monde danse sans se bousculer (merci à l'ambiance de Belfort !) mis à part les multiples circle pits qui déménagent le devant de la scène. C'est blindé de monde, et les gens chantent aussi fort que le groupe qui interprète les standards Argent Trop Cher, New York Avec Toi, Cendrillon... Une osmose s'est créée à ce moment, là où tout le monde est connecté par la musique : même derrière la régie, les nuages de poussières créés par des semelles de Converses trouées sont impressionnants : tout le monde s'amuse et c'est bien là le plus important. Quant à la « pseudo rivalité Aubert/Bertignac », chacun prend le micro tour à tour même si Jean-Louis en impose un peu plus par son côté multi-instrumentiste, montrant une aisance déconcertante qui respire la facilité. Un concert aussi réussi que leur reformation, qui a bel et bien lieu d'être. Des compositions originales pour une prochaine fois, peut-être ? On ne sait pas.

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Il est minuit, Cendrillon est partie se coucher avant de rentrer sur le dos d'une citrouille, et on va de suite changer de registre sur la scène voisine pour un groupe outre-Atlantique beaucoup moins sage. La scène du Club Loggia à minuit, c'est sauvage ! Le groupe Destruction Unit dévaste les tympans et les neurones. Le mur du son est comparable à des baffes que donnerait Sébastien Chabal. Ce concert est agressif, de par les guitares fuzz baveuses et criardes sont brouillonnent mais c'est ce qui apporte l'esthétique du groupe qui aurait pu tout casser à n'importe quel moment. Surréalistes, avec des penchants math-rock, les Destruction Unit n'ont pas eu besoin de demander de pogos, cela s'est fait naturellement avec une dynamique pareille. Un concert risqué pour les plus jeunes et les femmes enceintes, on vous aura prévenus ! Les lumières aveuglent et en rendent fou plus d'un : en fait, on apprend vite en les voyant sur scène qu'il n'y aura pas de dentelle et de sons clairs ce soir-là. En somme, un concert ultra-violent qui ajoute des horizons à cette édition 2016, bien garnie de styles différents.

En parlant de styles, outre le rock et la pop, la clôture de cette première journée fut absolument mémorable. Les habitués du festival racontent souvent que « les Eurocks sans pluie, ce n'est pas les Eurocks ». On les croit sur parole. Mr Oizo (ou Quentin Dupieux) arrive sur la grande scène à partir de 1h30 du matin en tant que DJ, avec sa barbe et sa fidèle casquette pourave. Non seulement ça réveille, mais la pluie s'est mise à tomber à grosses goutes à partir de 2h. Mr Oizo s'éclate et éclate le public de ses sons bizarroïdes trifouillés par ordinateur, donnant ainsi une ampleur loufoque d'électronique drogué aux stéroïdes. Ce set n'a aucune fausse note, basé sur des titres de l'album Stade 2 ultra répétitifs, en passant par le grand tube Flat Beat modifié encore une fois avec des sonorités étranges dont lui seul a le secret. Mieux encore, il fait tourner des remixes de ses potes de la french touch : SebastiAn, Daft Punk...

Ainsi, le public a tenu jusqu'au bout alors que les gouttes tombent avec force sur les parapluies et autres capuches rapiécées. La fin de soirée du premier jour des Eurocks ? De la violence à l'état pur dans chaque style musical, et une communion sans pareille de milliers de personnes venues pour s'amuser au maximum. Tout commence bien !
artistes
    Les Insus
    The Last Shadow Puppets
    Mr. Oizo
    Le Woop
    MHD
    Vald
    Ty Segall & The Muggers
    Pumarosa
    Darius
    Nathaniel Rateliff & The Night Sweats
    Le Balani Show Bizness de Bamako
    Chocolat
    Destruction Unit
    Bagarre
photos du festival