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Fanfarlo

Interview publiée par Kris le 14 décembre 2009

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Passé du statut de groupe espoir à valeur confirmée de la scène londonienne, grâce à leur formidable premier album Reservoir, Fanfarlo s'attaque désormais au reste du monde. En escale à Paris pour une soirée sold out au Festival des Inrocks, Simon et Amos viennent répondre à nos questions dans un sympathique bar de Pigalle.

Pourriez-vous vous présenter pour ceux qui ne vous connaissent pas encore ?

Amos : Simon est le chanteur et guitariste, quant à moi, je suis le batteur du groupe. Fanfarlo provient de Londres via d’autres villes européennes : Bruxelles et Göteborg. Nous jouons une sorte d’indie-pop-dance comme type de musique.

Le nom du groupe, Fanfarlo, vient d’une nouvelle de Baudelaire, personnage qui est décrit comme « une danseuse aussi bête que belle ». Est-ce un message que vous tentez de faire passer ?

Simon : Nous sommes très bêtes et très beaux (rires).

Et pour danser ?

Simon : Nous revenons justement de New York, où nous avons tourné une vidéo, après avoir joué quelques concerts, et nous avons conduit jusque dans les bois pour les besoins du clip. Nous avons passé la journée entière à apprendre la chorégraphie, puis les deux nuits suivantes d’affilée, nous avons tourné toute la soirée dans les bois, sous la neige et la pluie, à danser. Nous avons finalement passé ces derniers jours à danser.

L’engouement autour de Fanfarlo s’est accru ces derniers mois ; pour exemple, la soirée de ce soir où vous jouez en tête d’affiche [ndlr : Festival des Inrockuptibles à la Boule Noire] est annoncée complète depuis des semaines...

Simon : Justement, nous nous posions la question. La soirée est-elle sold out car le festival est lui-même sold out ?

Non, une des soirées du festival a par ailleurs été annulée par manque d’affluence. Votre présence a en tout cas eu son effet…

Amos : Pas Amanda Blank ?
Simon : Ou Josh Weller ?

Peut-être…

Simon : Mais nous acceptons volontiers de prendre tout le mérite.
Amos : Parfois, nous ne sommes pas si bêtes. On peut prendre cela comme une partie de notre vanité.

Comment vivez-vous cette attention à votre égard ? Car le groupe était encore confidentiel l’année passée, et depuis la sortie de l’album, vous voici sous les projecteurs, régulièrement en tournée…

Simon : Cela aide beaucoup d’avoir un album. Nous existons depuis quelques années, et c’était bizarre, déjà auparavant, nous faisions déjà quelques tournées en Europe. Mais il y a une nette différence dans le fait d'avoir un album à montrer, que les gens peuvent écouter.
Amos : Nous avons déjà joué à Paris une fois dans le passé, à la Flèche d’Or. C’était un bon concert, mais pas exceptionnel, notamment parce qu’il y avait un match de football en même temps, France-Pays-Bas lors de l’Euro 2008 où ils ont perdu 4-1, et peu de monde s’était déplacé pour venir nous voir.

Les premiers titres de Reservoir sont parus il y a de cela deux ans et demi...

Amos : Nous n’avions pas encore d’album et c’étaient des singles à l’époque, comme Fire Escape ou Harold T. Wilkins.
Simon : C’étaient en quelque sorte des versions préliminaires de ces chansons, nous les avons quelque peu réécrites dans le cadre de l’album.

N’est-il pas compliqué de s’investir sur une si longue période de plusieurs années sur un tel projet, tant au niveau de la cohérence que de l’inspiration ?

Simon : Oui, c’est une longue période, mais c’est quelque chose qui arrive à de nombreux groupes, pour qui le premier album est généralement un mix de vieilles et nouvelles chansons. Bien sûr, notre prochain disque sera différent, car nous devrons recommencer du début. Mais c’est excitant.

Avez-vous déjà commencé à travailler sur le successeur de Reservoir ?

Simon : Oui, nous avons déjà commencé. Mais il faudra un certain temps avant que nous ne puissions enregistrer quoique ce soit, car notamment, dès demain, nous partons pour une tournée jusqu’à Noël aux Etats-Unis. Puis en janvier, nous reviendrons en Europe, qui sera suivi par, de nouveau, une tournée aux Etats-Unis. Nous n’aurons pas beaucoup de temps à passer en studio. Mais nous jouerons de nouvelles chansons ce soir.

Reservoir est sorti en début d’année, puis réédité il y a quelques mois. Pourquoi ?

Amos : La raison est que nous avions initialement auto-produit notre album, puis six mois plus tard, nous avons signé un contrat, qui est la raison pour laquelle il est sorti à nouveau, et cette fois-ci physiquement dans les magasins. Auparavant, il n’était disponible que via notre site internet, ou bien si vous l’achetiez à nos concerts. C’est complètement différent de pouvoir le distribuer directement chez les disquaires, plutôt que d’avoir les gens venant te l’acheter directement.

Toute la phase de sortie-promotion-tournée pour Reservoir s’était déjà effectuée une première fois en quelque sorte, n’est-ce pas quelque peu rébarbatif d’avoir à refaire tout ce procédé une seconde fois ?

Simon : Ce n’est pas vraiment une seconde fois. C’est plutôt quelque chose de continu. Avant, nous jouions, et désormais nous avons un album.

Quelles sont vos principales influences ? Vous semblez puiser vos inspirations plus du côté de la culture nord-américaine que de l’Angleterre...

Simon : Nous écoutons tous beaucoup de musique de groupes américains. La plupart des choses que nous écoutons proviennent en effet d’Amérique du Nord. En ce moment, j’apprécie beaucoup Roy Smeck et Herb Alpert. Je ne sais pas comment eux en particulier ont pu influencer notre musique, mais nous sommes très éclectiques comme groupe.
Amos : Nous écoutons beaucoup de choses, qui n’inspirent pas forcément directement le groupe, mais qui nous font réfléchir à notre musique, à notre son.
Simon : J’ai écouté beaucoup de Philip Glass récemment. Je ne suis pas sûr qu’il ait été une influence concrète sur notre musique, mais cela m’a fait réaliser à quel point Sufjan Stevens a plagié Philip Glass (rires) !

Quelles autres formes d’arts sont importantes pour vous ?

Amos : En dehors de la musique, il y a les films, les documentaires, la photographie… Il n’y a pas vraiment de manque à ce niveau-là. Rien qu’au niveau graphique, les idées nous viennent, par exemple lorsque l’on tourne un clip dans une forêt : « tiens on dirait du Tchaïkovski ! ». En tournée, nous nous posons et regardons des films tous ensemble, et nous nous imprégnons de cette même ambiance.
Simon : Je pense que la plupart des choses que nous lisons et dont nous discutons, nous essayons de les incorporer dans nos chansons. Des histoires à propos de choses dont nous avons entendu parler, ou des personnages dont nous avons lu les vies... J’ai eu une période où j’ai été intéressé par Harry Houdini. Nous avons ensuite travaillé avec un réalisateur de clips, qui aimait également Houdini ; et nous avons tourné une vidéo figurant Houdini s’échappant.

Donnez-vous vos idées et opinions sur les vidéos-clips de vos chansons ?

Simon : Bien sûr. Nous n’avons pas fait de nombreuses vidéos, seulement une poignée, réalisés étroitement avec des réalisateurs que nous apprécions, et que nous avons contactés personnellement. Tous ces réalisateurs avec qui nous avons travaillé sont devenus des amis.

Quel est votre procédé pour écrire de nouvelles chansons, composer un album ?

Simon : Nous passons beaucoup de temps à discuter de nouvelles idées, de concepts et d’histoires. J’écris les chansons, et j’ai tendance à avoir une sorte de piscine d’idées, qui flottent alentour, et de temps à autre, certaines éclatent au même moment, puis je dois me dépêcher de trouver un dictaphone. C’est un peu cliché, mais c’est vrai. Je pense que beaucoup de songwriters font cela.
Amos : Beaucoup de groupes fonctionnent de cette manière, où il y a une personne qui agit comme catalyseur des mélodies et des sujets des chansons. Une fois cela sorti, un nuage d’idées provenant des autres membres du groupe vient s’ajouter. Dans notre groupe, il y a un trompettiste, un violoniste, un batteur, un bassiste, un guitariste, etc... En mixant tout cela ensemble et on obtient globalement le son de Fanfarlo.

C’est assez fluide !

Simon : Oui, exactement. Enfin, pas toujours. J’essaie d’enregistrer toutes mes idées, parfois ce n’est qu’un arrangement ; puis je l’apporte aux autres qui me font « euh… non » et l’on passe à autre chose. Mais parfois, cela fonctionne du premier coup. Il y a certaines chansons où l’on passe des mois à essayer différents arrangements, des versions complètements différentes. C’est dommage que l’on n’ait pas le temps d’enregistrer toutes ces versions. J’aimerais pouvoir faire un EP de toutes ces versions.

De la même chanson ?

Amos : Oui, même chanson, différentes versions.
Simon : Version lounge.
Amos : Version trompette.
Simon : Version bossa.
Amos : Ok, faisons-le (rires).

Ça pourrait être intéressant, exactement le même titre, décliné en des versions totalement variées...

Amos : C’est comme sur l’album des Pixies, Bossanova. Le titre provient d’une ligne de la chanson Hangwire je crois. Les paroles sont « I’ll bossa nova with you », le beat change à « bossa nova » qui passe ensuite à un 4/4 ou quelque chose comme ça. Un assez bon concept.

Qu’avez-vous appris auprès d’un producteur comme Peter Katis ?

Simon : C’est un très bon producteur. Nous avons appris deux ou trois choses sur la manière d’enregistrer la musique. C’est un homme très impatient. En tant que groupe, nous aimons composer nos chansons de diverses couches, de nombreux arrangements. Et lui aime bien que les choses se fassent, tout le temps.
Amos : Le problème qui se posait est que n’avions qu’un temps limité pour enregistrer cet album. Il est arrivé un point où il a fallu se dire « stop, on arrête d’empiler les couches ; il faut continuer et enregistrer le plus de chansons possible ». C’est la manière dont il fonctionne. Également, il travaille beaucoup sur des équipements analogiques, dans un studio possédant du très beau matériel, difficile à trouver et à acquérir, qui sont très chers.
Simon : Le fait que l’on travaille sur différents matériels rendait le tout un peu imprévisible parfois. Une fois, nous avions eu des interférences avec une radio locale, qui s’étaient glissés sur l’enregistrement car nous utilisions des vieux micros.

A quoi vont ressembler les six prochains mois de Fanfarlo ?

Simon : Tournée. Nous allons passer beaucoup de temps dans le bus. Avions, trains et automobiles.
Amos : Exactement. Comme dans le film [ndlr : Un ticket pour deux, de John Hughes]. Mais sans John Kennedy. Nous allons faire beaucoup comme ce que fait Steve Martin dans le film.
Simon : Nous allons personnifier l’esprit de John Kennedy au sein du groupe.
Amos : Nous serons comme John Kennedy après notre tournée aux Etats-Unis (rires) !