logo SOV

Band Of Skulls

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 13 février 2012

Bookmark and Share
Originaires de Southampton, Emma Richardson (basse et chant), Russel Marsden (guitare et chant) et Matt Hayward (batterie) se sont rencontrés au collège pour fonder en 2004 Fleeing New York, avant de choisir le nom de Band Of Skulls en 2008. C’est au bien nommé Mama Shelter que je rencontre les trois anglais pour la sortie de leur deuxième album, Sweet Sour. Band Of Skulls, ce sont des amis de longue date dont la jeunesse, le charme et le naturel vont transformer cette interview en un moment de rires et d’ironie, surligné par la grâce, les yeux acier et le mètre quatre-vingt d’Emma, ex championne de natation en Angleterre devenue « bass hero » dans un groupe qui sent la testostérone !

Votre premier album possède un vrai titre à rallonge, Baby Darling Doll Face Honey, d’où vient ce choix ? Un sens caché en anglais peut être ?

Matt : Tout a commencé avec le SMS d’un pote qui me disait « Baby Darling Doll Face Honey, quand est-ce que tu viens nous voir ? ». Il habite Londres et nous étions à Southampton. Il aurait pu faire plus simple ! Russel était en train de composer un titre appelé Fires et nous avons décidé d’utiliser cette phrase dans ce titre. A cette époque notre premier album attendait un nom également, nous avons donc choisi cette phrase très originale. Ça nous amuse de penser à des fans prononçant le titre de cet album ! Pas facile (rires) !

Aucun sens caché donc ?

Emma : C’est comme une phrase très affective qui en ferait trop pour dire « Tu me manques » ou quelque chose comme ça.

Fleeing New York était le nom de votre premier groupe. Quand avez-vous décidé de muter pour Band Of Skulls et pourquoi ?

Russel : Avant d’écrire le premier album de Band Of Skulls, nous sentions le besoin de prendre un nouveau départ, avec une nouvelle empreinte, l’occasion de redevenir des débutants. Nous avions déjà beaucoup joué ensemble avant Band Of Skulls et nous voulions faire autre chose. Ce groupe, pour nous, est une sorte d’hommage à des musiciens comme Jimmy Hendrix et son Band Of Gypsys ou Robert Plant et John Bonham qui avaient formé, avec de jouer avec Led Zeppelin, The Band Of Joy. « La Bande De Crânes », c’est aussi la réunion de nos esprits...

Pour apprendre à mieux vous connaître, voici une question pour chacun d'entre vous... Matt, il paraît que tu as joué au tennis avec John McEnroe ?

Matt : J’ai beaucoup joué au tennis. J’étais tellement doué que l’école m’a envoyé en Sports Etudes. Un jour, John McEnroe est venu nous voir et j’ai pu jouer avec lui. Bizarrement, quand il est arrivé il portait ce long manteau noir en cuir et il avait l’air d’une Rock Star ! C’est peut-être lui qui m’a donné envie d’abandonner le tennis et me mettre à la musique (rires) !

Russel, on dit qu'un membre de ta famille a péri dans le naufrage du Titanic, qu’as-tu pensé du film ?

Russel : Je pense que c’est un film terrible, fait pour les touristes (rires) ! Depuis l’école, étant donné que nous avons grandi dans la ville d’où est parti le Titanic, nous jouons tous des pièces sur ce sujet et même jusqu’au lycée. Donc, bien avant le film – et c’est un scoop ! – j’ai moi-même joué le vendeur de journaux, le fils d’une pauvre famille Irlandaise dont tous les membres vont mourir et même le fils du directeur de la White Star Line dans des pièces sur le naufrage ! Je suis donc un acteur frustré maintenant (rires). Mais, je déments, je n’ai pas d’ancêtre mort dans ce naufrage. Par contre, j’ai rencontré une survivante après une remise de prix, elle était en fauteuil roulant et est venue à ma rencontre en me disant qu’elle se souvenait de moi dans une des pièces du lycée à Southampton. Incroyable, non ?

Quant à toi Emma, nages-tu toujours aussi vite que lorsque tu participais aux compétitions d’étudiantes en Angleterre ? Tu as gagné pas mal de médailles je crois ?

Emma : Je ne nage plus autant que je le voudrais. J’étais assez rapide mais jamais première. J’aimais bien la compétition, je revoyais toutes mes ennemies à chaque rendez vous et c’était la guerre !

Je crois que votre titre I Know What I Am a fait partie d'une version du jeu Guitar Hero. Des milliers de joueurs pouvant se prendre pour Russel à la guitare devant leurs écrans, ça vous fait quoi ?

Russel : Ah ? Je ne savais pas. C’est cool ! Néanmoins, je pense que mon solo est un solo de niveau 1, mode Facile, donc ils ne devraient pas avoir trop de problèmes (rires). Je trouve ça bien que des gamins découvrent le rock grâce aux jeux vidéos.
Matt : Un soir nous avons passé du temps sur Guitar Hero avec des potes et j’ai découvert des artistes grâce à ce jeu ! J’ai découvert un groupe comme The Sword et, depuis, je suis fan...
Russel : Je me suis essayé à jouer ce jeu un soir aussi avec Matt, sur du Johnny Cash. J’ai été aussi nul qu’un débutant en solfège ! C’est même gênant de te dire à quel point j’ai été nul à rejouer les lignes de guitares de Johnny Cash. Mon esprit ne fonctionne pas de la sorte. Il semble qu’il soit très différent de jouer à Guitar Hero ou de la guitare ! »

Un second album est souvent considéré comme plus difficile à réaliser que le premier, avez-vous ressenti cela pour Sweet Sour ?

Russel : Un peu oui... mais que ce soit pour le premier ou le deuxième, il est difficile d'enregistrer un disque. Le premier est dur parce que tu n’as pas d’argent, pas de recul sur toi. Le deuxième est encore plus dur parce que tu as un public qu’il ne faut pas décevoir tout en essayant de gagner d’autres auditeurs.
Matt : Ce n’est jamais facile, ni pour le premier, ni pour le deuxième mais il est vrai qu’après deux ans de tournée et n’ayant jamais pu aller jusqu’à un deuxième album par le passé, nous n’étions même pas surs de pouvoir écrire d’autres titres...
Russel : Matt est le pessimiste de la bande (rires) ! Nous voulions absolument trouver un son plus mûr, mais garder un style tout en se renouvelant, c’est vrai que ce n’est pas facile. Mais nous avons travaillé dur et nous sommes heureux du résultat. Le premier album est un acte de survie, le deuxième, un choix de direction.

Vous ressentez une pression plus importante maintenant que vous avez un public important à séduire ?

Matt : La pression, nous l’avons de toute façon constamment sur nous car nous avons une exigence élevée dans notre travail. Si tu te sens faible par rapport à ton travail, ça transpire sur ton public et il le sent.

Le son de Band Of Skulls a toujours été un mélange de la fin des années 60s et de la fin des années 80s. Quels sont les artistes qui vous ont le plus influencés ?

Matt : Je pense que notre plus grosse influence vient surtout des groupes bien plus connus que nous suivons parfois en tournée. Nous les observons et essayons de comprendre comment ces formations fonctionnent, que ce soit sur scène ou entre eux. C’est très formateur. Ce n’est pas nécessairement matérialiste, ça peut être très utile quand tu écris car tu projettes ta chanson sur scène et comment elle arrivera au public en live ou en studio.
Russel : La musique que tu joues influences ta vie, de plus en plus avec le temps. Tu n’achètes pas le disque d’un autre groupe pour prendre ta guitare et essayer de copier les titres que tu as aimés.

Que pensez vous des médias qui pensent que votre musique est plus Américaine qu’Anglaise ?

Matt : Je pense que nous sonnons très Anglais !
Russel : Tu devrais venir voir nos concerts aux Etats-Unis. Tu te rendrais compte à quel point nous avons un son très Anglais ! Nous jouons du rock, et en un sens le Rock vient des Etats-Unis, mais nous ne sommes que le reflet de la musique qui se joue là-bas. L’Angleterre a toujours été ce reflet, et cela marche dans les deux sens.
Matt : Le blues vient des Etats-Unis mais il a été rendu populaire en Angleterre puis est reparti outre-Atlantique. C’est une boucle qui ne s’est jamais arrêtée de tourner.

De nos jours, de plus en plus de formations sont tentées de mixer différents univers musicaux, mais Band Of Skulls semblent vouloir rester fidèles à un certain son au cours des années...

Russel : Je pense que nous mixons plusieurs influences ! Mais nous ne voulons surtout pas que notre musique sonne datée dans un futur proche, or, un jour ou l’autre, quand tu t’appuies sur une mode ou un style du moment, ta musique le sera, inévitablement. En réalité, nous mixons nos influences respectives sur un son qui est toujours le nôtre. Cela ne nous empêche pas d’écouter un tas d’autres groupes par ailleurs...
Matt : Si tu écoutes Radiohead, malgré leur évolution durant toutes ces années, tu sais que tu écoutes Radiohead, quel que soit l’album qui tourne. C’est ce vers quoi nous essayons de tendre.

Vous avez collaboré avec le producteur Ian Davenport (Supergrass) et Nick Launey (Yeah Yeah Yeahs, Arcade Fire) pour ce nouvel album. Comment les avez-vous rencontrés ?

Russel : J’ai rencontré Ian à nos débuts. Il avait entendu une démo de Band Of Skulls et nous avons eu une sorte d’audition en aveugle avec une maquette de trois titres pour nous tester. Cela lui a beaucoup plu. Nous avons finalement tiré Fires et Pattern, présentes sur le premier album, de cette maquette. C’est à partir de là que nous avons construit une belle collaboration qui dure toujours. Pour Nick, nous étions à la recherche d’un producteur qui puisse pousser un peu plus le côté agressif de notre musique et proposer des titres frais pour ce nouveau disque. Il a apporté un nouvel angle d’attaque au groupe. Il nous a mis en confiance pour essayer de nouvelles choses...

Sweet Sour sonne plus intime et moins abrupt, malgré un son toujours agressif, dans le bon sens du terme. Qu'avez-vous changé dans le processus d’écriture ou de composition depuis le premier album ?

Russel : Quelques titres de l’album sont plus coulants que sur le précédent mais, globalement, il est vrai que nous avons recherché un son plus brut de décoffrage, en quelque sorte. Je pense qu’il y a une différence notable entre faire un disque et préparer une tournée. Étrangement, les titres les plus calmes ou intimes en studio peuvent devenir des titres très gras en live ! Nous avons testé cela lors de cette tournée.
Emma : Nous avons évolué depuis le premier album, au moins par rapport à notre collaboration et notre processus d’enregistrement. Les moyens mis à notre disposition également !
Matt : Pour notre premier album, nous avons tout fait dans un studio minuscule et très minimaliste. Cette fois-ci, nous avons eu la chance d’avoir un peu plus de moyens et de temps pour répéter. Pour moi, par exemple, j’avais la possibilité de positionner la batterie dans plusieurs endroits différents du studio, dédiés à cela, dans l’optique d’obtenir des sons plus variés.
Russel : C’était notre première expérience dans un studio vraiment bien équipé. Cela nous a ouvert beaucoup de portes que nous continuerons à explorer dans le futur proche.
Emma : En général, nous n’avons pas de préférences en ce qui concerne l’écriture ou la composition, tout nous vient en même temps dans un chaos total !

En tournée, lorsque vous quittez vos foyers, emmenez-vous des objets personnels, des disques, des porte-bonheur ?

Emma : De bons écouteurs pour écouter de la bonne musique !
Russel : J’emmène beaucoup de guitares. Plus j’en ai avec moi, le mieux je me sens. Je pourrais me contenter d’une seule guitare, mais en avoir plusieurs me met en sécurité.
Matt : Je fais quelque chose qui est l’ordre du porte-bonheur en concert : j’appelle toujours les mêmes personnes, avant le set, celles qui sont censées avoir un œil critique sur ma musique. Des gens qui font partie de mon passé personnel.
Russel : D'accord, Matt parle aux esprits maintenant (rires) !
Matt : Nous avons un stock de MP3 sur un support qui nous suit partout et nous jouons pas mal de trucs, en tant chacun notre tour le rôle de DJ dans le Van.
Russel : Mais, hier soir, sur la route, c’était surtout un DJ set rock. Avec Queens Of The Stone Age, Led Zeppelin et Snoop Doggy Dog !

Vous allez assurer la première partie des Black Keys en Angleterre durant le mois de février, comment appréhendez-vous ces concerts ?

Russel : Sans pression, ça va être plutôt excitant ! C’est plus stressant quand il s’agit d’un concert des Band Of Skulls parce que c’est uniquement notre public qu’il faut contenter. Là, c’est comme offrir un verre de plus durant la soirée. Nous sommes le bonus, un amuse-bouche (rires) !

En tant que groupe, quelle est votre position au sujet de la fermeture du site MegaUpload et toutes les lois ou actions contre le téléchargement illégal et notamment celui de la musique sur Internet ?

Emma : Il devrait exister des règles d’utilisation pour Internet et le téléchargement. Tous les sites, comme iTunes ou Amazon, ont leurs règles et leurs conditions d’utilisation, c’est confus pour les internautes et ils ont l’impression qu’il n’y a pas de règles au final. Pourquoi s’embêteraient-ils du coup ?
Russel : Sur le long terme, c’est une attitude négative que de télécharger illégalement trop et trop souvent. Si tu es un groupe reconnu qui ne court pas après l'argent, c’est plutôt positif car cela t’apporte encore plus de visibilité. Si tu débutes, tu te fais découvrir grâce à Internet et pas mal d’internautes viendront te voir en concert finalement. Cependant, sur le long terme, il existe un besoin de vendre des disques sinon plus personne n'en enregistrera. C’est difficile à trancher comme sujet...
Matt : Imagine une galerie d’Art où tu viens et décroches les peintures gratuitement pour les emmener chez toi ! Ça peut sembler séduisant (rires) ! Avant, on enregistrait les chansons qui nous plaisaient à la radio sur une cassette. Aujourd’hui, le problème est que la qualité des fichiers proposée est très haute. Personnellement, je ne veux pas empiler les listes de lecture MP3 sur mon ordinateur, sans savoir quelle pochette, quel graphisme ou quel livret le CD contient...
Russel : Si tu aimes un groupe, tu dois le supporter, d’une façon ou d’une autre !

Si vous pouviez réaliser tout de suite un rêve de musicien, quel serait-il ?

Russel : Il y en a beaucoup ! Un de mes rêves, devenu parfois réalité, est de recevoir des coups de téléphone qui nous annoncent que nous sommes programmés à tel ou tel festival ou dans telle ou telle salle de concert...
Emma : Jouer Glastonbury pour la première fois en 2010 fut un rêve pour nous ! »