logo SOV

NO CEREMONY///

Interview publiée par Fab le 21 octobre 2013

Bookmark and Share
Après avoir évolué pendant près de deux années dans l'anonymat le plus complet, NO CEREMONY/// s'affichent désormais aux yeux de tous avec la sortie de leur premier album éponyme. Entre rock et musique électronique, les trois musiciens originaires de Manchester nous en disent plus sur leur rencontre et la naissance du groupe.

Votre album n'est pas encore sorti en France et le public vous connaît donc encore assez peu, pouvez-vous revenir sur la création du groupe ? Comment vous êtes-vous rencontrés ?

Kelly : Nous nous sommes rencontrés via des amis communs. Nous avions tous les trois des envies et des ambitions communes et nous avons donc bâti notre relation sur cela.

Vous avez fait en sorte durant très longtemps de garder secrètes toutes les informations relatives aux membres du groupe, pourquoi ce choix ?

Kelly : Nous n'avons pas tout à fait décidé de garder secret toutes ces informations, nous avons plutôt préféré consacrer toute notre énergie au groupe et à notre musique. A nos débuts, nous n'avions pas encore trouvé de ligne directrice claire, nous nous contentions d'expérimenter et de voir où cela allait nous mener. Nous apprenions en parallèle à produire nous-mêmes notre musique, nous prenions beaucoup de plaisir à le faire et nous ne voyions alors pas d'intérêt à nous répandre sur les réseaux sociaux où à mettre en ligne notre biographie. Cela aurait été une distraction pour nous. A une époque où la plupart des gens choisissent d'exposer leur vie aux yeux de tous avec Internet, nous avons donc choisi une autre solution. Nos choix nous ont menés à ce fonctionnement.
James : Nous étions en pleine phase de développement, d'un point de vue artistique, et si nous avions choisi de donner des interviews et d'assurer de la promotion, nous aurions en quelque sorte été contraints de justifier et expliquer nos choix. Ce n'était pas possible car nous avons toujours cherché à créer quelque chose de différent et de spécial, nous ne voulions pas avoir à mettre en avant une logique de fonctionnement. Il était préférable pour nous de continuer à explorer sans nous poser de questions.

Nous voulions dès le départ nous détacher le plus possible de notre musique de manière à ce que celle-ci puisse exister sans nos personnalités à tous les trois.

Le nom du groupe et sa typographie sont pour le moins étranges, quelle en est la signification ?

Kelly : C'était une réflexion liée à notre mode de fonctionnement mais aussi au fait que d'une certaine manière nous étions « brutalistes » dans notre approche. Nous voulions dès le départ nous détacher le plus possible de notre musique de manière à ce que celle-ci puisse exister sans nos personnalités à tous les trois. Tout ce que nous avons fait, depuis le nom du groupe jusqu'aux artworks, a découlé de cette volonté. En dehors de la musique, tout est secondaire, et choisir NO CEREMONY/// comme nom allait de paire avec cela.

Les visuels que vous utilisez en concert ou pour vos vidéo clips sont omniprésents dans votre univers, sont-ils aussi importants que la musique que vous jouez ?

Kelly : Absolument ! En plus de la musique, nous avions aussi envie de jouer sur les atmosphères et de créer une « expérience » qui aille au-delà du son. Nous ne sommes pas des réalisateurs de vidéo clips ou des créateurs visuels mais nous avons une certaine capacité à utiliser les outils à notre disposition et apprendre. De la même façon que nous avons expérimenté pour notre musique, nous avons exploré ce qu'il était possible de faire visuellement avec nos moyens. En regardant le vidéo clip de HURLOVE, certaines personnes ont pensé que nous étions des artistes aguerris alors que nous nous sommes contentés d'aller acheter des lampes de couleurs différentes dans un magasin près de chez nous et de mettre en pratique nos idées. Tout ce que nous faisons est instinctif.

Vous êtes originaires de Manchester, une ville avec une culture musicale très importante. A-t-il été difficile de vous faire remarquer au milieu de tous les autres groupes locaux ?

Kelly : Bizarrement, à cause du mystère nous entourant, nous avons suscité immédiatement un certain intérêt, notamment de la BBC Radio 1 qui a joué très vite une de nos chansons. La seule information connue nous concernant à l'époque était le fait que nous venions justement de Manchester. Notre premier concert a été donné en première partie de Alt-J, puis nous avons notamment joué avec MONEY, PINS et d'autres groupes locaux. Nous avons eu de la chance que tout s'enchaîne aussi bien à nos débuts.

Vous avez très récemment recruté un batteur pour vous accompagner sur scène lors de vos concerts, comment en êtes-vous arrivés à cette décision ?

Victoria : Je pense que nous étions arrivés à un point où il était nécessaire d'enrichir et de compléter nos prestations scéniques. Ajouter de la substance, rendre l'ensemble plus attrayant d'un point de vue visuel aussi.
James : Jusqu'alors, Kelly était en charge des percussions électroniques lors de nos concerts, mais le fait d'avoir un batteur supplémentaire nous permet de nouvelles possibilités avec deux personnes. La dynamique visuelle est elle aussi modifiée.
Kelly : Comme je le disais tout à l'heure, nous avons toujours aimé les expérimentations, et nous avions le sentiment d'être limités sur scène sans un véritable batteur. Je jouais moi-même certaines parties mais d'autres étaient pré-enregistrées et simplement déclenchées via un MPC, nous n'avions donc pas l'impression d'aller aussi loin que nous le pouvions lors des concerts.

Avec des boucles électroniques, il n'y a pas de risque d'erreur, mais ce n'est pas tout à fait humain.

Votre musique mélange des éléments électroniques à d'autres plus organiques, où vous situez-vous entre ces deux domaines ?

James : Je pense que nous nous sentons plus proches du domaine électronique. D'un autre côté, nous avons toujours voulu que notre musique porte une part d'humanité, que tout ne découle pas de machines. C'est aussi pour cela que les gens aiment voir des groupes en live, pour voir des humains jouer des instruments et que tout ne soit pas seulement mécanique. Avec des boucles électroniques, il n'y a pas de risque d'erreur, mais ce n'est pas tout à fait humain. Le fait d'utiliser des sons joués et d'autres enregistrés nous permet de trouver un équilibre, comme dans une sorte de relation entre deux personnes. Des artistes comme Burial ou Four Tet sont parfaits dans ce rôle, ils savent créer de la dance music organique. Ils savent créer une réponse émotionnelle.
Victoria : Jouer sur ces deux domaines nous permet aussi d'être plus authentiques en tant que groupe. Lorsque nous jouons en concert, nos chansons évoluent mais nous ne perdons pas cette identité qui fait l'essence de NO CEREMONY///.
Kelly : Nous ne nous posons pas de limitations ou de règles mais nous cherchons toujours une certaine cohérence. HURLOVE, la première chanson que nous avons dévoilée, était le premier exemple de ce qui allait découler de notre fonctionnement.

Vous avez évoqué Burial et Four Tet tout à l'heure, mais quels groupes considérez-vous comme vos principales influences ?

Kelly : Nous écoutons des choses très différentes, par exemple Aphex Twin, Michael Jackson ou The Beatles. Tout artiste, même s'il n'évolue pas dans ton genre musical de prédilection, peut être intéressant. Je trouve fascinant ce qu'un artiste ou un groupe peut dégager, j'essaye de comprendre pourquoi et comment, la magie derrière tout ça... et éventuellement m'en servir dans notre musique. La musique électronique en général est une source d'inspiration pour nous, je trouve par exemple extrêmement intéressant ce que Thom Yorke crée à l'heure actuelle avec Atoms For Peace. Certains d'entre nous aiment aussi le nouvel album de Kanye West. En tant que producteur, je trouve le travail sur ce genre de disque vraiment très intéressant. Il m'a toujours semblé difficile de définir précisément mes influences. Si tu aimes la musique en général, il suffit de tendre l'oreille tout au long de la journée pour découvrir quelque chose de nouveau. Certaines chansons de notre album sont inspirées par des artistes venant d'un milieu donné, et d'autres par des groupes venant d'univers complètement différents, c'est pour cela qu'il nous est difficile de parler d'influences d'une manière générale.

La plupart des titres de vos chansons semblent se référer à l'amour et aux relations personnelles. Est-ce une source d'inspiration pour vos textes ?

James : Nous vivons tous les trois des relations plus ou moins longues et la distance ne facilite souvent pas les choses vis-à-vis des personnes que nous aimons. Les paroles de nos chansons nous permettent d'explorer l'aspect moins romantique de l'amour et de nous focaliser sur les difficultés que l'on peut rencontrer. Être tellement immergé dans quelque chose que tu finis par perdre de vue la personne que tu es.

Au cours des douze derniers mois vous avez publié à intervalle régulier des vidéos des chansons de l'album sur Youtube. Était-ce pour vous faire connaître ou tester les réactions des personnes écoutant votre musique ?

Kelly : Nous ne cherchions pas à récolter les avis des gens sur notre musique, ces vidéos nous permettaient de poursuivre une progression naturelle de la même façon que nous l'avons fait depuis nos débuts. Lorsque nous avons enregistré HURTLOVE, nous avons à peine attendu vingt-quatre heures avant de mettre la chanson en ligne sur notre site officiel, et tout est parti de là. Ce fonctionnement a été le nôtre pendant des mois : dès lors qu'une chanson était achevée, nous la mettions en ligne afin que les gens puissent l'entendre. Chaque chanson représentait en quelque sorte une « capture » de ce que nous étions à un moment donné, puis nous passions à autre chose.
James : Lorsque nous avons mis HURLOVE en ligne, il n'a pas fallu une journée avant que Zane Lowe de Radio 1 ne décide de la diffuser. C'était une expérience très étrange que de se trouver exposé ainsi sans s'y attendre. Voir nos chansons diffuser par des radios britanniques était plus un objectif à long terme, pas aussi rapidement avec une simple démo.

Ce choix correspondait à notre fonctionnement, à savoir tout faire par nous-mêmes, que ce soit enregistrer de la musique, produire nos chansons ou créer des visuels.

Le fait d'avoir toujours publié vos disques via votre propre maison de disques vous a-t-il offert une plus grande liberté dans votre fonctionnement ?

Kelly : Ce choix correspondait à notre fonctionnement, à savoir tout faire par nous-mêmes, que ce soit enregistrer de la musique, produire nos chansons ou créer des visuels. Il était donc logique de poursuivre notre réflexion en sortant notre album sur notre propre label. C'est une chance de pouvoir procéder ainsi.

Votre album est sorti au Royaume-Uni au début du mois de septembre, avez-vous été satisfaits des réactions des personnes l'ayant écouté ?

Kelly : Tout a été très positif jusque-là. Nous gardons un peu de distance par rapport à cela, nous ne cherchons donc pas à tout prix à lire tout ce qui a été dit à ce sujet. Nous avons malgré tout été surpris de lire que le disque était trop « propre », ce que nous avons pris pour un compliment car nous n'avions jamais produit de musique avant ce disque. C'était vraiment la dernière chose que nous pensions entendre.

Cet album est-il au final conforme à l'image que vous vous en faisiez lorsque vous avez commencé à enregistrer de la musique tous les trois ?

James : Il n'y a pas de règle. Certaines chansons ont beaucoup évolué alors que d'autres sont restées très proches de l'image que nous nous en faisions lors de leur écriture. L'apport de Joey Santiago sur une chanson comme HEARTBREAKER a été considérable, l'atmosphère a été complètement transformée suite à sa participation.
Kelly : Le fait de ne pas suivre un processus établi lors de l'écriture ou l'enregistrement des chansons fait que certaines ont plus évolué que d'autres. Sur l'album, DELIVERUS est par exemple identique ou presque à sa version initiale, contrairement à HEARTBREAKER qui a été complètement repensée.