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SOAK

Interview publiée par Sarah Pitet le 27 mai 2015

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La jeune SOAK sort ce mois-ci un premier album tout simplement beau et fragile, Before We Forgot How To Dream. Nous l'avons rencontrée à l’occasion de sa promotion parisienne. Entre deux interviews, la petite irlandaise trouve le temps de nous expliquer sa fumeuse mais sincère psychologie existentialiste.

SOAK est un nom aux significations multiples, quelle est la tienne ?

Quand j'ai voulu l'utiliser comme une sorte de titre, j'ai juste combiné les mots soul et folk, ce qui formait SOAK. Cela n'a pas d'autre signification pour moi.

Pourquoi avoir intitulé ton album Before We Forgot How To Dream ? En vue de ton jeune âge, est-ce une vision pessimiste de l'avenir ou juste le désir de profiter de l'instant présent ?

Je dirais que c'est les deux. C'est à propos du moment qui précède celui où l'on doit se prendre en charge tout seul, ne compter plus que sur soi-même et avoir des responsabilités. Cela parle également de ces gens qui à cet instant n'ont ni espoir ni rêves. C'est tout cela en général.

A chaque fois que l'enregistrement d'une chanson touche à sa fin, je lui donne le premier titre qu'elle m'inspire.

L'introduction de ton album, la chanson "My Brain", est uniquement constituée à partir de sons joués à l'envers. Est-ce une façon de représenter la confusion de ton esprit ?

Je voulais en fait avoir sur l'album une chanson aux sons un peu récurrents. A chaque fois que l'enregistrement d'une chanson touche à sa fin, je lui donne le premier titre qu'elle m'inspire. C'est pour cela que la première se nomme ainsi car elle commence très calmement, puis grimpe en agressivité avant de s'arrêter complètement. Je pense que mon cerveau fait également cela.

J'ai vu que tu dessinais et ai noté que tu semblais avoir un réel univers entre ta musique et tes croquis. Comment pourrais-tu définir cet univers ?

C'est une question difficile (rires). Je n'ai en fait pas tout le temps besoin d'être créative finalement, j'ai du mal à rester calme et mes jambes fourmillent vite (rires). Je suppose que l'idée qui je me suis fixée de suivre est de vivre les choses d'une meilleure façon que tu les trouves.


Tu as l'air de te poser de nombreuses questions à propos du fait d'être un quelqu'un, notamment dans les chansons telles que B a NoBody et If Everyone is Someone, No One Is Everything...

C'est un concept assez étrange. Mes amis m'ont souvent parlé de ce qu'ils allaient essayer de faire de leur vie et j'ai donc voulu comprendre d'où ils venaient pour leur donner des conseils, car je mène une vie assez différente. Trop de personnes se sous-estiment, mais il faut qu'elles se disent qu'elles font ce qu'elles font, rien d'autre. C'est ça l'idée de principale de B a NoBody, c'est d'être juste quelqu'un, d'être qui tu es. C'est une réelle contradiction et c'est ce qui rend la chose intéressante en mon sens. J'adore l'idée d'aller complètement à l'opposé de là où l'on devrait. Je pense que c'est important pour tout le monde. Nous avons tous du passer par l'école et écouter tous les discours sur les différents clichés de la société. Quand on explique à ces gens le concept de n'être personne, de B a NoBody, ils ne comprennent pas la logique, alors qu'il ne s'agit finalement que de la même chose que d'être quelqu'un mais avec un mot différent.

Cet album est empreint de questionnements adolescents. Est-ce ce que tu ressens à son sujet ? Que signifie-t-il réellement pour toi ?

J'ai écrit cet album depuis mes quatorze ans, il est donc le reflet de différents moments de ma vie de cet âge à aujourd'hui.

J'y ai relevé quelques sonorités qui m'ont rappelé le groupe Beach House, dans Oh Brother et A Dream To Fly essentiellement. Font-ils partie de tes influences ?

Pas vraiment. Mes amis me recommandent souvent de la musique et il n'y a pas longtemps ils m'ont parlé de Beach House. Une de leurs chansons est dans un spot publicitaire au Royaume-Uni, je n'avais pas réalisé que c'était eux d'ailleurs. C'est un très bon groupe.

Lorsque quelque chose m'énerve, je vais écrire à son sujet.

Quelles sont donc tes principales sources d'influence ?

Ça dépend de mon humeur. En général, lorsque quelque chose m'énerve, je vais écrire à son sujet. Lire de la poésie m'inspire également. Je ne sais pas si tu connais Billy Childish, c'est le genre d'artiste qui me donne envie d'écrire, car ce qu'il fait est vraiment intéressant. Généralement quand j'entends une très bonne chanson, un riff intéressant ou de belles paroles cela me donne envie d'écrire à mon tour.

Quels sont les poètes qui t'inspirent alors ?

J'aime beaucoup les poèmes de Leonard Cohen, sa musique également bien sûr, mais ses recueils de poésie sont incroyables.

Est-ce que le fait que tu viens de Derry, qui est une ville avec une histoire assez lourde, a pu t'influencer d'une quelconque façon ?

Pas vraiment non. Le jour où tous les conflits ont été annoncés comme finis était le jour de la naissance de mon grand frère. Il est arrivé qu'il y ait encore quelques personnes tuées ou quelques altercations mais d'un niveau bien moindre que ce qu'il a pu se produire dans le passé. Cela ne m'a jamais affecté dans ma musique, je n'irai par exemple pas écrire une chanson engagée à ce sujet.

As-tu enregistré tes chansons toute seule ou avec l'aide d'un groupe ?

J'ai été dans un groupe lorsque j'avais environ treize ans, on ne faisait que des reprises, des Pixies par exemple. Je n'ai plus rejoué en groupe depuis. Pour cet album, mon producteur m'a un peu aidé à la guitare et un batteur et un pianiste se sont joints à nous.


Et sur scène ?

Ces dernières années je jouais toujours seule sur scène mais pour mes prochaines dates il y aura un groupe avec moi. Cela va être intéressant.

Que penses-tu du fait d'être une jeune artiste dans une période de « jungle » musicale ?

Je suppose que c'est un moment intéressant pour faire ce que je fais car les artistes solo, comme Hozier par exemple, tout seul à sa guitare, trouvent étrangement vite le succès.

Quel sentiment a-t-on lorsque l'on voyage autour du monde à un si jeune âge ?

Je le fais depuis mes seize ans. C'est assez dingue d'avoir une vocation qui me permet de voyager dans le monde entier, c'est incroyable et je passe de très bons moments mais il m'arrive d'être vraiment fatiguée. Parfois je ne sais même plus où il faut que je sois à quel moment, car tout s'enchaîne tellement vite sans pause. J'étais en Amérique récemment et je suis rentrée chez moi pour une semaine avant de repartir pour l'Australie. J'ai fait tout cela en un mois et suis rentrée chez moi un jour avant de repartir à nouveau. C'est assez troublant car tu as le décalage horaire et tu ne sais jamais vraiment ce qu'il se passe à quel moment. Cependant ça reste quand même incroyable de vivre toutes ces expériences dans tous ces pays, rencontrer toutes ces personnes. C'est un métier incroyable.

As-tu des projets pour le futur ?

J'ai déjà écrit quelques chansons pour le second album. C'est assez intéressant car le premier a été écrit pendant plusieurs années, ce qui rendra l'autre différent car écrit sur une plus courte durée. Je compose mieux désormais grâce à tous les concerts et les voyages que j'ai faits, je sens que j'ai plus de choses à raconter. Je suis une meilleure compositrice (rires).

Vas-tu bientôt jouer à Paris ?

J'ai joué à Paris il y a quelques mois. J'ai également fait la première partie de CHVRCHES donc je serai probablement de retour bientôt (rires).