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RHODES

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 8 octobre 2015

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David Rhodes est un jeune Anglais, auteur et compositeur talentueux et mystérieux originaire d'un petit village du Hertfordshire. Comme sa musique (mystérieuse et atmosphérique), celui qui se fait appeler Rhodes est un artiste aux postures sérieuses qui joue, depuis quelques temps dans la cour des grands. Récemment vu en ouverture de George Ezra à l'Olympia de Paris, il a sorti, le 18 septembre dernier, son premier album, Whishes. Sérieux et solennels, les titres de Rhodes n'en revêtent pas moins des sonorités « larges » et aériennes qui transportent ses fans dans des voyages imaginaires où les sentiments sont exposés, à fleur de peau. Signé en France chez Columbia Records, Rhodes nous reçoit pour parler de lui et de sa musique ; un exercice encore un peu nouveau pour lui.

D'où viens-tu ? Est-ce que Rhodes est ton vrai nom ?

Oui, mon nom est David Rhodes et je suis originaire d'une petite ville à une heure de Londres qui se nomme Hitchin.

Comment a démarré ta carrière de musicien ?

Toute ma vie, j'ai gravité autour de la musique et des instruments, mais je n'ai jamais vraiment chanté. Je me sentais très peu en confiance, il y a encore peu à ce niveau. Avant d'écrire mes propres titres, j'ai joué de la basse pendant deux ans dans un groupe. Un groupe plutôt tendance eighties, presque new wave... Un jour, je me suis dit qu'il fallait que j'aie le courage d'écrire et de chanter mes propres chansons. Les groupes dans lesquels j'ai joué avant ça étaient plus axés blues et différaient pas mal de mon style actuel.

As-tu appris à jouer d'un instrument ou es-tu autodidacte ?

Je n'ai jamais appris. Mon père joue un peu de guitare à la maison et il m'a appris quelques accords, quand j'étais enfant. Mais, ensuite j'ai appris par moi-même à jouer du piano ou d'autres instruments. J'aime bien me faire ma propre idée et me débrouiller seul...

Tu as souvent hésité entre jouer en solo et monter ton propre groupe ?

Je savais que je voulais d'une instrumentation importante. J'aime bien créer des calques et des textures et les ajouter, petit à petit. J'aime qu'il y ait beaucoup d'harmonies et d'orchestration. J'ai un groupe derrière moi, maintenant, et j'ai beaucoup de chance de les avoir car ils sont très intuitifs et à l'écoute de mes attentes. Ce sont eux qui m'accompagnaient à l'Olympia (ndlr : le 10 juin 2015, en ouverture de Georges Ezra). Ce sont des musiciens de Londres que j'ai auditionnés, il y a quelques temps. Le batteur, James Kenosha (Dry The River, Pulled Apart By Horses), est mon producteur, il a participé à l'enregistrement de mon album et nous sommes des proches.

Whishes est une sorte de concentré de ce que j'ai appris ces années passées.

Jusqu'à la sortie de ton premier album, Wishes, tu étais un habitué des EPs mais pas des singles. C'était un choix de ta part ?

Oui. Cela fait deux ans et demi que j'écris ma propre musique et il se trouve que j'arrive à le faire assez rapidement. Je m'y obligeais un peu pour être en mesure d'apprendre rapidement qui j'étais vraiment, musicalement parlant. Et au travers des EPs, je peux raconter un début d'histoire. Un single, cela peut être une bonne chose, mais c'est plus difficile pour démontrer aux auditeurs qui tu es. Et cet album, Whishes, est une sorte de concentré de ce que j'ai appris ces années passées et de tous ces EPs que j'ai sortis.

Wishes sort le 18 septembre et c'est ton premier album. Y retrouvera-t-on les titres de tes EPs ?

Oui, il y aura quatre titres tirés de mes EPs, mais le reste du tracklisting est inédit. Cela fait deux ans que j'écris des chansons maintenant avec l'aide de James Kenosha, mais la plupart des chansons de Whishes sont très récentes. Et pendant les six mois qu'a duré l'enregistrement, j'ai encore écrit quelques chansons de plus... et quelques-unes seront disponibles uniquement sur la version Deluxe de l'album.

Où as-tu enregistré Wishes ?

Dans un endroit nommé Fraisthorpe, un tout petit village situé dans le Yorkshire. C'est un endroit tranquille, tout près de la mer, très romantique, dans un sens. C'est James Kenosha qui a trouvé ce studio-là bas. Par le passé, j'avais travaillé avec d'autres producteurs, parfois très connus et notamment sur mes EPs, mais je n'ai jamais trouvé quelqu'un avec qui je m'entendais, comme James qui, lui, n'est pas encore très connu. Mais, je ne voulais pas d'un producteur renommé pour mon premier album. Je ne voulais qu'un nom me serve à vendre mon disque... Avant cela, j'avais l'habitude de tout enregistrer tout seul, dans ma propre chambre.


Qu'est ce qui te vient en premier, généralement ; la musique ou les textes ?

Parfois, c'est un concept global qui me vient avant même d'écrire des textes ou de la musique. Mais, neuf fois sur dix, je compose d'abord la musique. Ou bien, j'arrive avec une structure musicale que j'ai en tête ou une boucle que je trouve hypnotique et je l'écoute pour voir si cela m'évoque des idées.

Ton premier album sort en France sur le prestigieux label Columbia. Comment s'est passé votre rencontre ?

En Angleterre, mon album sort sur un label différent (Rhodes Music/Ministry Of Sound). Je pense que Columbia France a dû entendre parler de moi et de mon album et quand j'ai su qu'ils voulaient sortir mon premier disque en France j'ai été très honoré. Ils ont un catalogue d'artistes incroyables. Mais, je dois dire que je n'entretiens pas vraiment de rapport étroit avec tout ce qui concerne le business autour de ma musique. Je laisse cela à mon manager avec qui j'ai une relation de toute confiance. C'est lui s'occupe de ce genre de réunions (rires)...

On a pu te voir et t'écouter mercredi dernier à l'Olympia, en ouverture de Georges Ezra. Comment s'est passé le concert ?

C'était très agréable de jouer dans cette salle. Bizarrement, je trouve plus facile pour moi de jouer dans des salles importantes que dans de petites salles. Il y a un niveau d'anonymat plus important que dans des salles intimistes. Aujourd'hui, par exemple j'ai joué un showcase pour Spotify avec des gens devant moi que je voyais analyser ma musique, c'était assez terrifiant ! Mais jouer dans des salles plus grandes me donne l'occasion de me réfugier plus aisément dans mon univers musical. Quant au public français, il semble très réceptif et très excité à l'écoute de mes titres. De ce que j'en ai vu jusque-là, il y a de très bonnes vibrations pour moi, en France.

J'ai toujours écouté de nombreux styles musicaux. Modernes et anciens.

D'où viennent tes influences musicales ? Qu'écoutais-tu quand tu étais plus jeune ?

J'ai toujours écouté de nombreux styles musicaux. Modernes et anciens. Mais, c'est vrai que j'ai beaucoup écouté de blues des origines, étant jeune. Sûrement parce que mon père écoutait ce genre de musique... Ma mère écoutait des groupes comme, Crowded House ou Simon & Garfunkel et Bob Dylan. Un de mes groupes favoris, étant jeune, était Love. J'ai écouté ce groupe, qui me semblait si étrange, si psychédélique à cette époque pendant des années. J'ai également pas mal écouté The Who, The Kinks, The Rolling Stones... Ensuite, j'ai été fan des Cocteau Twins pour l'espace et l'atmosphère se dégageant de leur musique. C'était quelque chose que je n'avais jamais entendu, auparavant. J'ai ensuite eu ma période de musique classique. Pas en tant qu'expert, mais pour avoir une idée d'autres arrangements et d'autres textures. Je pense que cela m'a aidé à recréer certaines atmosphères, notamment avec des cordes dans ma musique. Mais, je ne pense pas être directement influencé par d'autres musiques, c'est plus de manière inconsciente qu'autre chose.

Les racines de ta musique semblent venir du folk et du blues, mais les sonorités que tu utilises sont bien plus complexes. Comment décrirais-tu ta musique ?

On me pose souvent cette question et c'est légitime. Mais, personnellement je considère ma musique assez pop, en fait. Parfois, cinématique, même. « Cinématique pop » me semble une bonne définition.

Tu aimes bien tout faire toi même ; est-ce que tu t'impliques dans la création de tes artworks et vidéo clips ?

Au départ, je faisais tout moi-même. Sur mon premier EP, Raise Your Love, la photo d'illustration, je l'ai faite avec mon iPhone en photographiant mon plafond. C'est une image de mon lustre, au-dessus de mon lit... Aujourd'hui, je manque un peu de temps, surtout depuis une année et si je ne fais plus les photos moi-même, les concepts viennent tous de moi. Que ce soit pour mes pochettes ou mes vidéos. Sur Breathe, par exemple, qui parle de laisser aller et de relâchement, j'ai demandé à un danseur de venir dans un club et de faire à peu près ce qu'il voulait, pourvu qu'il se laisse aller.

Tu t'es produit en première partie de London Grammar, George Ezra ou Nick Mulvey. Te sens tu proche de ces artistes ? As-tu appris sur ton métier, à leur contact ?

Être au contact de professionnels comme eux t'apprend tous les soirs sur ton métier. Quand tu commences à jouer à ce niveau-là, avant des artistes comme eux, tu réalises qu'il faut en faire beaucoup plus que tu n'en as l'habitude. Que ce soit au niveau de la voix, avec Hannah Reid, ou même des promos et des interviews avec un professionnel comme l'est devenu George Ezra. Et pour revenir sur Hannah Reid, si elle chante si bien, malgré une insécurité qu'elle m'a dit ressentir constamment, c'est qu'elle la travaille plus que n'importe qui. Tous ces gens me font grandir et m'inspirent beaucoup.


Ce soir, tu vas jouer au Point Ephémère, deux jours après avoir joué à l'Olympia. Deux scènes parisiennes en quelques jours, c'est assez rare...

C'est ce que je me suis dit, également. Jouer en ouverture de George Ezra c'était assez inattendu et ce fut, comme je te le disais peut-être le meilleur live que je n'ai jamais joué. Le Point Éphémère, lui, était programmé depuis plus longtemps et heureusement car quelque part ce sera plus intimiste qu'à l'Olympia. Je ne suis pas encore au niveau de pouvoir jouer deux fois de suite dans des salles comme celle-là !

Je crois que tu as une partie de ta famille qui vient de France. C'est un pays où tu gardes des attaches ?

Ma grande-mère est effectivement française. Elle a déménagé en Angleterre quand elle avait dix-huit ans, je crois. Et mon arrière grand-père était chef pâtissier au Crillon ! Par la suite, il a travaillé au Ritz de Londres. Donc, oui, la France est un pays que j'aime et qui revêt une importance particulière à mes yeux. J'aime manger en France, mais je dois être prudent pour ma santé car à chaque fois que je commande quelque chose de léger, au restaurant, arrivent le pain et le vin et là, je ne peux jamais me retenir. Et je ne comprends pas comment les Parisiennes font pour être aussi minces ! Une chose me chagrine, par contre ; à chaque fois que je viens à Paris je n'en crois pas mes yeux quand je vois les embouteillages et la circulation folle que vous subissez.

Quel groupe écoutes-tu en ce moment ?

J'ai tellement passé de temps à écouter des musiques un peu anciennes que je m'efforce d'écouter de nouveaux groupes en ce moment. J'aime beaucoup The National. Ou Radiohead, bien sûr, que j'écoute depuis des années...

Je vois que tu portes un artefact particulier sur toi. Est-ce que tu es de ces artistes qui emportent toujours un souvenir ou un porte-bonheur avec eux, en tournée ?

Oui, c'est une pierre de cristal que ma mère m'a donnée et je la garde toujours avec moi. En fait, j'ai pas mal de choses que j'apporte avec moi en tournée, données par ma mère qui est une personne très spirituelle, au sens ésotérique. Cela me rend plus confiant et, de la sorte, je garde un contact avec les miens.