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The Wave Pictures

Paris, Petit Bain - 13 novembre 2012

Live-report par Julien Soullière

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Bateau ivre au teint jaune, le Petit Bain accueille ce soir The Wave Pictures, pour ce qui constitue la seconde date française assurée par le groupe en 2012, et la seule et unique proposée dans le cadre d’une courte tournée hitalo-hispanique débutée le 2 novembre dernier, à La Coruna. Et cette étape parisienne, c’est avant tout l’histoire d’une très mignonne première fois : jamais l’occasion n’avait été donnée à nos anglais de se produire dans pareil lieu. Une embarcation, un rafiot. Une grosse barque stationnée en plein Paris, jouissant d’une acoustique plus qu’honorable, et qui ne viendra donc pas entacher la prestation que le groupe s’apprête à nous livrer.

Arrivé sur les lieux, je descends deux à deux les marches qui mènent jusqu’à la salle, et n’ai besoin que de peu de temps pour réaliser à quel point l’endroit est riche de monde. Sur scène, c’est avec une infime délicatesse que The Wave Pictures installent leur matériel, accordent leurs instruments, échangent quelques mots et sourires. Arrivé au devant de l’estrade, je les observe, et me dis que s’ils s’étaient mis en tête de ne gêner personne, de ne pas se faire remarquer, ils ne s’y seraient sûrement pas pris autrement.
Leur aplomb d’adolescents complexés, il se ressent d’ailleurs jusqu’à dans leur manière de se fringuer. Des sneakers à scratchs pour l’un, des mocassins du début du siècle pour l’autre, un peu de pantalons bouffants, et un vieux jean blanchi par le temps, on croirait notre trio sorti de chez lui dans le seul but de chercher son courrier. Nos gaillards, en tout cas, se moquent bien de leur apparence et du qu’en-dira-t-on, allant même jusqu’à rire de ces groupes piégés, car trop à l’étroit dans leur costume de scène.

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A bien y regarder, c’est sûr, David Tatterstall et ses comparses ne respirent pas la joie de vivre. A mieux y regarder encore, cette remarque ne s’appliquent en fait qu’au frontman et à son batteur, puisque Franic Rozycki, le bassiste, tue de par sa seule personne rondelette toute considération de ce type : il y a cette chose, dans son visage, dans son regard, dans son improbable coupe de cheveux et dans sa barbe, qui inspire l’être venu d’un autre monde. David et Jonny, eux, regardent plus leurs instruments que leur public, mais c’est passé le premier titre que l’on prend conscience que leur attitude n’est en fait que le reflet que d’une intense concentration, et sûrement d’un petit zest de timidité malgré tout. Car entre chaque titre, leurs visages s’illuminent sans crier gare, et c’est sans trop de mal, mais sans trop d’expressivité non plus, que David nous compte leur récent périple en Espagne, ou tente de nous expliquer pourquoi un titre comme Stay Here & Take Care Of The Chickens s’appelle ainsi. Une histoire de pouilles mouillées délicieuse, appréciée à sa juste valeur par une assistance qui, s’il mitraille le groupe d’applaudissements dès que l’occasion se présente, reste particulièrement sage.

Musicalement, et c’est tout aussi sûr, nos anglais sont impressionnants. Et je ne parle pas là que de la seule dextérité de Tatterstall, petite bonhomme attendrissant, habité par ses accords, et à la voix de canard, puisque Jonny « Hudderfield » Helm n’est pas en reste, martelant avec force et précision ses fûts, et s’autorisant lui aussi quelques solos pour le plus grand bonheur du public. Mieux encore, il va jusqu’à pousser la chansonnette, que ce soit en restant « sagement » à son poste (Eskimo Kiss), ou en le quittant pour mieux s’avancer jusqu’à l’extrême limite de la scène, mains dans le dos, pied battant la mesure, avec la seule guitare de Tattersall comme bouée de sauvetage.
Jamais trop longs, toujours sincères et simples de compréhension, les morceaux de The Wave Pictures sont coincés entre le rockabilly, la folk et le rock garage. Mais finalement, peut importe de savoir quelle couleur domine sur l'autre au gré des titres proposés, car tous savent faire jaillir l'émotion, l'envie. De danser, par exemple, ce que certains s'autoriseront d'ailleurs, aux abords de la scène, à faire de temps à autre.

La musique, c'est parfois l'histoire d'émotions simples, d'une relation franche, et à leur façon toute particulière, The Waves Pictures personnifient à la perfection cette vision des choses. Un groupe définitivement coup de coeur.