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Jake Bugg

Paris, Flèche d'Or - 28 novembre 2012

Live-report par Anne-Line

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En 1994, les frères Gallagher et leur groupe Oasis sortirent un album qui leur permit d’échapper au destin communément promis aux habitants de leur quartier de Manchester, fait de petits boulots, de galères, et d’allocations chômage. La même année, à Clifton, dans la banlieue de Nottingham, naissait un certain Jacob Kennedy. Celui-ci, à dix-huit ans d’intervalle et malgré un climat plus que délétère dans l’industrie du disque, va accomplir le même exploit en sortant un premier album qui atteint la première place des charts anglais en octobre 2012, sous le nom de Jake Bugg.

En seulement une année, le jeune homme s’est trouvé une maison de disques, un public, et surtout un métier. S’il n’avait pas sa guitare, il serait sans aucun doute encore sur les trottoirs de Clifton, avec ses amis, à fumer des pétards en attendant que le temps passe. Au lieu de ça, il part en tournée à travers le monde. À peine revenu d’une série de concerts en Amérique du Nord en compagnie de Noel Gallagher et Snow Patrol, Jake Bugg repart en Europe présenter son album.

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De fait, lorsqu’il apparait sur la scène de la Flèche d’Or, avec ses deux musiciens, il porte sur le visage l’expression des grands adeptes de la fumette. Sans signe apparent d’appréhension ni de nervosité, il entame son set en interprétant deux b-sides sur sa guitare acoustique, Kentucky et Love Me The Way You Do. Si l’on considère que le jeune garçon n’a commencé à jouer qu’à partir de douze ans, son jeu est assez sidérant. Mais surtout, ce qui frappe de prime abord, c’est sa voix. Une de ces voix immédiatement reconnaissables, nasale, puissante et gouailleuse, toujours juste malgré l’évidence de son auto-didactisme. Présentant ses morceaux de la manière la plus spartiate qui soit, le jeune Jake impressionne par sa maîtrise des codes du songwriting. Pas besoin d’en faire des tonnes quand on a des morceaux aussi puissants que Trouble Town ou Seen It All. Bien que l’album soit à peine sorti officiellement en France, c’est avec des cris de joie que le public parisien les accueille.

Pendant quarante-cinq minutes, Jake Bugg va se balader avec insouciance entre la folk à la mode 70's (Note To Self), la country (Kentucky), les grandes ballades sentimentales (Ballad Of Mr Jones) ; faisant défiler des influences toutes plus magnifiques les unes que les autres, entre Simon & Garfunkel (Simple As This), The Verve (Slide), ou encore les La's (Trouble Town).

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Les titres s'enchaînent sans que l'on sache trop ce qui nous impressionne le plus : l'évidence des mélodies, la clarté du jeu en picking, le panache du jeu à la guitare électrique... On applaudit à tout rompre, ici une intro, ici un solo, ici un refrain; chaque seconde de ce set est une performance. Le tout délivré avec une nonchalance presque insolente. Cela arrive tellement rarement, de tomber sur un diamant brut de cette ampleur. De quoi rappeler à la fois des souvenirs nostalgiques, de l'époque où l'on découvrait soi-même la musique, avec toute la naïveté de la jeunesse, et également de quoi reprendre espoir et imaginer un futur où les jeunes ne rêveront plus de X Factor ou de Nouvelle Star, mais voudront changer le monde avec une guitare sèche.

La fin du concert arrive bien trop tôt, et l'on quitte la salle avec la ferme conviction que l'on vient d'assister à la naissance d'un très grand. Quel soulagement de voir que oui, le véritable talent existe encore, et il suffit d'une jeune homme de dix-huit ans pour remettre à zéro les compteurs de toute une génération que l'on croyait perdue. Jake Bugg : MERCI.
setlist
    Kentucky
    Love Me The Way You Do
    Trouble Town
    Seen It All
    Ballad Of Mr Jones
    Someone Told Me
    Note To Self
    Simple As This
    Slide
    Two Fingers
    Taste It
    Lightning Bolt
    ---
    Country Song
    Green Man
photos du concert
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