logo SOV

TOY
Placebo

Paris, Bercy - 10 décembre 2013

Live-report par Olivier Kalousdian

Bookmark and Share
Bercy. Ses dix-huit mille spectateurs assis et debout, ses cinquante-cinq mille mètres carrés de plein-pied sur la Seine, son court de tennis, sa patinoire ou sa piscine, ses coulisses dignes d’un festival et son équipement technique hors pair. C’est peu dire que, depuis notre dernière rencontre à la Flèche d'Or en mai 2012, TOY ont changé de braquet ! Dès leurs débuts sur scène, en 2011, le groupe londonien est invité en première partie de The Horrors. Suivent The Vaccines et enfin, Placebo, depuis quelques semaines. Autant dire que TOY ont immédiatement mis le monde du rock d’accord sur leurs qualités et leurs compositions. Ayant marqué, de façon indélébile, l’année 2012 avec le titre, Left Myself Behind, leur second opus, Join The Dots est sorti dans les bacs un jour avant leur concert à Bercy. Immédiatement acclamé, ce disque est une valeur sûre de 2013 qui n'aura malheureusement pas eu le temps d’intégrer bien des classements de l'année écoulée.

SOV

Car ces cinq-là, avec leurs physiques et attitudes juvéniles, continuent de plus belle à marquer de leur empreinte le haut du panier du rock & roll circus anglais. Ils vont le prouver une fois de plus ce soir dans une salle pas du tout taillée pour eux. Ce qu’ils préfèrent, c’est voir, sentir et même toucher les premiers rangs quand, sur un Conductor tiré de Join The Dots, Tom Dougall, Dominic O'Dair et Maxim Barron font pleurer des guitares jusqu’à l’ivresse dans des envolées instrumentales de plusieurs minutes qui ne sont pas sans rappeler les digressions sonores des Stones Roses. Devant plus de quinze mille personnes venues, en premier lieu, écouter Placebo (un tout autre style, donc) ils vaporisent leur krautrock toxique sous des lumières uniformes portées par des titres hypnotiques dépassant parfois les six minutes. Premier titre cinématographique du set de ce soir et premier titre du nouvel album de Toy, Conductor pourrait vite devenir la private joke de l’année dans le monde du rock. Comment ne pas penser à une contraction littéraire et musicale entre le Confusion de New Order et le Reflektor d’Arcade Fire ? Il emprunte, avec brio l’électronique répétitive du groupe de Manchester et la disco techno du plus grand groupe Canadien de l’histoire. Suivi de titres comme Kopter ou Motoring et finissant sur un Join The Dots ayant immédiatement envouté la presse spécialisée, TOY offrent à Bercy un court voyage de quarante minutes ; mais quarante minutes d’un voyage sonore spatial ponctués de breaks et de sonorités torturées qui, par essence, ont pourtant horreur du vide.

Quand le clavier d'Alejandra Diez déclenche les moteurs sur des nappes synthétiques, Dominic O'Dair et Tom Dougall répondent en duo par de longues mélodies stridentes. Quand Maxim Barron transforme sa basse en boîte à rythme Roland par son agilité et sa rapidité, Charlie renchérit dans le tempo magnétique. Ces cinq-là se connaissent bien.
Les voix sont souvent effacées par ce collectif qui, par l’adéquation instrumentale tout en longs solos et cassures que ses membres ont réussi à imposer, se rapproche de la méthode de composition de leurs respectés aînés londoniens Archive.
Psychédélique, krautrock peut-être, mais ici pas de lignes rêveuses et planantes ; un son brut et lourd mais dont le déplacement dans l’espace semble constamment contrebalancé par l’absence de pesanteur que TOY savent créer autour d’eux.

C’est une soirée spéciale qui s’annonce alors pour Placebo et leur leader, Brian Molko, quarante et un an ce soir. Une soirée anniversaire de gala donc, mais également une soirée de captation vidéo par la chaîne Arte qui diffuse le concert sur son site. Dix ans après leur passage au Palais Omnisport de Bercy pour l’enregistrement du DVD Soulmates Never Die, Placebo choisissent à nouveau Paris pour immortaliser leur oeuvre.

SOV

21h15, l'introduction de B3 se fait entendre et nous retrouvons la voix inimitable de Brian et le son de la guitare de Stefan Olsdal, au niveau de ses genoux. Avec quarante centimètres de plus que son leader, il assume un physique antinomique.
Pas de doute, le public de Bercy a fait le voyage, depuis la Province parfois, pour entendre et voir Brian Molko sur scène. Malgré une coupe de cheveux approximative (belle longueur sur les épaules comme au plus fort des années quatre-vingt-dix), Brian Molko n’a pas perdu son aura auprès des personnes réunies ce soir. On peut toutefois s’interroger sur ce jeu de scène excessif, cette présence androgyne et ce romantisme torturé qui semblent avoir quitté le leader de Placebo. Ses cinq musiciens – on est loin du rock en trio des débuts – dont un clavier et une choriste, ont beau dérouler un set millimétré et des partitions appliquées, l’ennui guette.

SOV

On rêve alors que des titres qui ont également fait la légende de l’androgyne Brian comme Protect Me From What I Want ou le très sexuel Mars Landing Party soient interprétés en ce soir de captation manquant d’ambiguïté malsaine mais il n'en est rien. Les inoubliables hits du groupe comme Special K, Teenage Angst ou Bitter End résonneront bien en fin du concert, mais il est déjà trop tard... Si la fin de set est réussie avec pas moins de dix mille chœurs et autant de gens debout dans l’immense salle de Bercy, enfin rassasiés à leurs soifs, l’impression d’un groupe qui appartient au passé prédomine.

Un show trop bien rodé sans doute dont le meilleur passage restera sa toute fin durant laquelle retentira un air de joyeux anniversaire souhaité par la très nombreuse assistance à son idole. En réponse, Brian Molko offrira un rappel en forme de mini-concert avec une version ralentie de Teenage Angst puis une reprise de Kate Bush Running Up That Hill qui viendront précéder Post Blue avant le final Infra-red et son hymne fédérateur. Les applaudissements de la foule résonnent de longues minutes quand les lumières reviennent, mais on a quand même eu chaud !
setlist
    TOY
    Conductor
    As We Turn
    Kopter
    Endlessly
    Fall Out Of Love
    Motoring
    Join The Dots

    PLACEBO
    B3
    For What It's Worth
    Loud Like Love
    Twenty Years
    Every You Every Me
    Too Many Friends
    Scene Of The Crime
    A Million Little Pieces
    Speak In Tongues
    Rob the Bank
    Purify
    Space Monkey
    Blind
    Exit Wounds
    Meds
    Song To Say Goodbye
    Special K
    The Bitter End
    ---
    Teenage Angst
    Running Up That Hill (Kate Bush cover)
    Post Blue
    Infra-red
photos du concert
    Du même artiste