Les Oliver Peel Sessions se jettent à l'eau, et passent de l'appartement au bateau. Une fois n'est pas coutume, les fameux concerts en appartements se retrouvent délocalisés sur la place publique et investissent la péniche du Petit Bain à l'occasion de leur centième et dernière édition.
Ce soir, Oliver Peel rend hommage à John Peel et débusque deux de ses groupes fétiches, The Wedding Present et Cinerama. John Peel, DJ anglais dénicheur de talents qui inspira les sessions d'Oliver Peel, leur avait en effet lui-même consacré un bon nombre de sessions à la radio anglaise dans les années 80 et 90.
Chanteur, guitariste et fondateur des deux groupes qui tiennent l'affiche ce soir, le maitre de cérémonie se prénomme David Gedge. Le premier groupe, The Wedding Present, est né en 1985 au crépuscule du post-punk sous l'influence de groupes comme The Fall, Gang Of Four et des Buzzcocks. Le deuxième, Cinerama, est un side-project né en 1998 pour s'ouvrir à d'autres influences. Dans un cas comme dans l'autre, David Gedge est le seul rescapé de la formation originale.
Paradoxalement, c'est la plus vieille et la plus renommée des deux formations qui ouvre le bal. L'ironie n'échappe pas à David Gedge qui ne cesse d'en plaisanter et de jouer les débutants un peu modestes. Il a beau être le leader et vétéran de tous les groupes présents ce soir, il n'en a certainement pas profité pour prendre la grosse tête. "Stick around for the main band, I heard they're very good" nous demande-t-il pince-sans-rire, arrachant ainsi quelques sourires à la foule.
Les Weddoes interprètent alors en intégralité et pour la première fois
Saturnalia, leur cinquième album paru en 1996. L'ordre des morceaux est respecté avec exactitude, et aucun titre étranger à cet album ne vient se greffer à la setlist, au risque de décevoir les fans venus écouter une sélection de classiques.
Petite impression de déjà vu à l'arrivée du groupe Cinerama qui affiche la même line-up que son faux jumeau The Wedding Present augmenté de trois nouveaux musiciens. De quoi devenir légèrement schizophrène.
L'atmosphère musicale, en revanche, a radicalement changé avec l'irruption de la trompette, de la flûte traversière, du triangle et d'un deuxième synthé. David Gedge nous explique qu'il a voulu explorer la musique de films en créant Cinerama. Le traditionnel quintet de rock se trouve métamorphosé devant nous en petit orchestre. Difficile à caser dans un appartement.
C'est la première fois ce soir que Cinerama se produit en France depuis le début du millénaire. Leur dernier passage remonte à 1999 alors qu'ils jouaient en première partie de The Beautiful South. Entre autres choses, Cinerama présentent aujourd'hui leur dernier album,
Valentina, lui-même un remodelage et une réécriture complète du huitième album des Wedding Present. Subtile manière d'étoffer le catalogue présenté en première partie. Et pourtant, les morceaux ainsi réinventés sont quasi méconnaissables. Soudain, c'est comme si le groupe avait troqué la bière pour les cocktails. Les morceaux se font plus pop, moins bruts et plus baroques, David Gedge joue les crooners, et notre petit bain prend des airs de croisière.
D'une pierre deux coups, David Gegde nous aura donc démontré ce soir tout à la fois ses talents de compositeur et de caméléon.