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Younghusband
Bill Ryder-Jones

Paris, Point Éphémère - 10 décembre 2015

Live-report par Cassandre Gouillaud

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Paris avait ce soir-là le choix entre au moins deux soirées orchestrées par l'équipe du Winter Camp Festival, entre une Maroquinerie perchée sur les hauteurs de Ménilmontant et un Point Ephémère en bord de canal. La promesse d'une soirée tout-droit venue d'outre-Manche, ou presque, aura finalement fait pencher la balance en faveur de la seconde option.

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Presque anglaise donc, si ce n'était pour la formation pour le moins éclectique propulsée en début de soirée afin de défendre son premier album, Sugar Now, sorti en octobre chez City Slang. Établi à Londres, Cristobal And The Sea est une synergie d'influences multiples, feu d'artifice né de la rencontre entre l'indie pop et des influences tout droit issues de la bossa nova. Quatre musiciens pour quatre pays d'origine, Espagne, Portugal, France et Royaume-Uni, quatre arrière-plans hauts en couleur et en mélodies. Le groupe véhicule un enthousiasme contagieux, un imaginaire festif et enjoué porté par des influences ibériques qui jaillissent au détour de chaque section rythmique. Usant d'une basse très rythmée, directement imputable aux références à la bossa nova, le groupe ne manque pas de stimuler les pulsions dansantes de quelques-uns, ou du moins de réveiller ceux assommés par une longue journée. Même s'il faut bien le dire, on regrettera une balance qui n'est pas exactement à l'avantage de la flûtiste du groupe et un chant qui s'égare de temps à autres.

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Changement de tableau avec l'arrivée de Younghusband, autre formation londonienne qui creuse cette fois dans une pop aux relents psychés, et dont le dernier album, Dissolver, avait laissé un souvenir plutôt mitigé. Force est, d'ailleurs, de constater que le bilan live est à peu près similaire. Le groupe tombe dans cette catégorie, franchement pernicieuse, des bonnes formations qui ne parviennent pas à dépasser des formules déjà trop entendues. Efficaces, sans parvenir à transcender. Une oreille pourtant attentive au possible n'y fera rien. A l'arrivée, il ne reste qu'un set quelques peu monotone et sans franche passion.

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Mais, dans un même temps, le Point Éphémère peut se préparer pour son instant de grâce, à demi plongé dans l'obscurité, une bière à la main et l'air enjoué des soirées pleines de promesses. Ultime changement de plateau avant l'arrivée d'un personnage que l'on attend avec trop d'impatience, faute d'imaginer les contrées sublimes dans lesquelles il était sur le point de nous entraîner. Bill Ryder-Jones défend ce soir son dernier album solo, West Kirby County Primary, une certaine histoire d'une vie sinueuse au bord de la mer anglaise. Que ses airs juvéniles ne trompent personne, l'émérite guitariste des Coral sait poser des mots troublants de maturité sur des accords qui englobent la salle d'une douce nostalgie, pour laquelle on ne saurait tarder à succomber. A Bad Wind Blows In My Heart est accueillie dans un silence religieux, seulement rompu par la voix grave et prenante d'un Ryder-Jones qui n'est pas là pour succomber à l'écueil tragique du pathos, mais nous emporter dans une intimité nouvellement révélée. Entretenant toujours, au détour de Catharine and Huskisson ou Daniel cette mélancolie sous-jacente des temps révolus, hymne à la vie telle qu'elle était.
Que ne tienne cette forme de nonchalance que l'artiste peut renvoyer, il tient et enserre nos cœurs bouleversés, alors que son groupe quitte temporairement la scène, le laissant seul, guitare en main. Le temps d'un interlude en solitaire, éblouissant de grâce, ouvert sur Tell Me You Don't Love Me Watching, et qui aurait mérité de ne jamais se refermer.

La soirée s'achève trop tôt, trop vite sur un Satellites inhumain de puissance, mettant fin à cette belle histoire d'une soirée, courte, mais qui aura effleuré le magnifique.