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Coldplay

Paris, Salle Wagram - 9 décembre 2015

Live-report par Clémentine Barraban

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Non content de sortir un album bien en-dessous de ce à quoi ils avaient habitué leur auditoire, voilà que Coldplay ajoute une contrariété supplémentaire à leur fanbase de la Capitale, en ne daignant pas compléter leur tournée européenne par un passage au Stade de France. Comme si les temps n'étaient pas suffisamment obscurs pour les Parisiens...

Aux dires des membres du groupe, certains évènements récents, provoquant une vague de compassion et de prières internationales dirigées vers Paris, les ont poussés à organiser une venue aussi impromptue que prestigieuse. Le lieu adopté ? Rien de moins qu'une historique salle de réception, au pied de l'Arc de Triomphe, contenant un petit millier de places uniquement remises sur invitation et concours. Un concert intimiste inespéré (le deuxième d'affilé depuis le Casino de Paris en 2014) pour des privilégiés sélectionnés au hasard en somme. Pilule amère pour les autres, restés fixés à actualiser en vain leur boite de réception d'e-mail, songeant à la salle toute neuve du Palais Omnisport de B... pardon, à l'AccorHotels Arena et à sa capacité de vingt milles places, qui aurait été rempli en moins de temps qu'il n'en faut pour prononcer « mise en vente d'un évènement à forte demande, merci de ne pas réactualiser la page ».

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Partant d'un réel désir des artistes d'un moment de communion au cœur de la capitale française ou d'un prétexte commode pour un coup de promotion express de l'album fraichement sorti de l'œuf, la grosse machine fait bien (trop) souvent figure cruelle face aux passionnés, dont seuls les plus acharnés sont récompensés pour leur patience et obtiennent finalement un ticket d'or (qui est plutôt habituellement rose pâlichon, mais ça colle moins avec l'image).
Qui dit organisation de dernière minute dit hôte au pied levé : en Monsieur Loyal de circonstance, recruté une poignée d'heures auparavant sur le plateau du Grand Journal de Canal+, l'humoriste Mathieu Madenian ouvre la soirée, étonné lui-même d'en être là, mais profitant de l'opportunité d'avoir un public pour dérouler ses chroniques sur fond de Front National et d'élections. Il semblerait que les Français aient vraiment besoin de rire un bon coup...

C'est ainsi dans ce qui fut tenu pour l'un des plus hauts lieux des mondanités parisiennes, au milieu des dorures ajourées, que Coldplay a choisi de donner ce concert exceptionnel. Sur scène, l'habituel piano bariolé, cette fois recouvert de couronnes de fleurs, la cloche qui les accompagne depuis la tournée de l'album Viva la Vida et, en fond, une bâche arborant l'artwork du nouvel opus A Head Full Of Dreams, le tout coloré façon shoot d'arc-en-ciel saveur joie de vivre.

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Sans surprise, le quatuor accompagne son entrée avec A Head Full Of Dreams, introduction éponyme du sus-cité album, méticuleusement étudiée pour réjouir, et d'une efficacité signée de leur patte. Il n'en est pas moins de Paradise et son thème grisant sous forme de tourbillon symphonique. Au piano, le chanteur, Chris Martin chine plus loin dans le passé et y rapporte la mélodie surpuissante et à fleur de peau de Clocks, révélant Coldplay tels qu'ils savent être : bouleversants.

Succès reconnu de l'album Ghost Stories, Magic semble vouloir apporter un semblant de réponse à quiconque chercherait à mettre des mots sur la nature de la soirée, tandis que l'impérissable Yellow donne une teinte chaleureuse et bien personnelle à une définition, parmi tant d'autres, de l'amour. Le titre sera justement suivi par la doucereuse ballade Everglow, écrite à quatre mains avec Gwyneth Paltrow, sorte de fantôme surgi du passé de Chris Martin.
Celui-ci s'ajoute une facette inédite sur le morceau hybride Hymn For The Weekend en faisant cohabiter ses prunelles de chaton espiègle sur le point de s'attaquer à un pull en cachemire et une dynamique r'nb plutôt séduisante. Étonnante et subtile, la transition des premières notes de Fix You sonne comme un tremplin vers ce morceau de cathédrale et son riff de guitare, battant comme un pouls qui s'emballe, jusqu'à ce que le batteur Will Champion sonne l'heure de Viva La Vida et déchaine les tambours de leur premier hymne de stade (peut-être d'ailleurs le seul qui compte), déclenchant les oh-oh-oooh dans le public bien après le dernier accord.

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Débarque finalement la rythmique exotique du nouveau single, Adventure Of A Lifetime dont le thème entêtant (et juste un rien casse-pied) conquiert son intérêt en live et se manifeste propice aux inspirations chorégraphiques. De même pour la touche Avicii sur A Sky Full Of Stars, apogée de rappel spectaculaire, surtout lorsqu'il s'agit de faire s'abattre une pluie d'étoiles sur le public, même en papier, l'allégorie est là. Après une (trop courte) heure et quart, les Anglais sortent sur un Up&Up, au pire fade, au mieux imperceptible.

Comme l'ont fait des dizaines d'artistes à travers le monde durant ce mois passé, Chris Martin prend un moment entre deux morceaux pour se faire porte-parole du groupe et partager quelques mots bien choisis de soutien envers Paris et ce que ses habitants ont traversé ces dernières semaines. Sincérité, coup de pub de plus, un peu des deux ? Question sans importance au fond. Un soupçon de naïveté est parfois salvateur, Coldplay le sait bien.

Aussi imprévisibles que le concert, les anciens titres qui ont fait leur succès originel ont eu la part belle ce soir, éclipsant les quelques relents de platitude des productions récentes du groupe. Que ce soit en petit comité ou en stade, Coldplay a sa manière bien particulière de faire régner l'euphorie au cœur d'une prestation immaculée, emplie d'énergie et d'une joie pandémique.

Crédit photos : Robin
setlist
    A Head Full Of Dreams
    Paradise
    Clocks
    Magic
    Yellow
    Everglow
    Charlie Brown
    Hymn For The Weekend
    Fix You
    Viva La Vida
    Adventure Of A Lifetime
    Kaleidoscope
    ---
    A Sky Full Of Stars
    Up&Up
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