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Anna B Savage
The Divine Comedy

Paris, La Gaîté Lyrique - 15 avril 2016

Live-report par Cassandre Gouillaud

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Parmi les indispensables rendez-vous du mois d'avril, il y avait ce festival parisien, fraîchement débarqué, porteur des promesses les plus élevées. Co-produit par ARTE Concert, La Blogothèque et la Gaîté Lyrique, l'ARTE Concert Festival se tenait le week-end dernier dans la bien connue institution de la rue Papin. Il réunissait non loin d'une vingtaine d'artistes pour trois soirées de concerts thématiques, le tout se déroulant sous les caméras expertes de La Blogothèque. C'est avec la soirée pop-rock que nous avons ouvert le bal vendredi soir, pour une affiche particulièrement soignée, qui devait, entre autres réjouissances, voir le retour de la formation nord-irlandaise The Divine Comedy. Au vu de la rapidité avec laquelle celle-ci avait affiché complet, il n'était pas bien compliqué de deviner que nous n'étions pas les seuls à trépigner d'impatience en attendant l'arrivée de la mi-avril.

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Retour d'un Neil Hannon en grande forme certes, mais sans oublier que l'intégralité de l'affiche de cette soirée était particulièrement prometteuse. L'affirmation se vérifie d'emblée avec l'irruption sur scène des canadiens de Ought, auxquels revient la tâche de lancer les hostilités dans une fosse malheureusement un peu trop clairsemée en début de set. Le quatuor, maintenant habitué de la capitale, avait, rappelons-le, remporté les suffrages de la critique avec ses deux premiers albums, More Than Any Other Day et Sun Coming Down. Avec eux vient la promesse d'un set survolté, véritable concentré de post-punk anxiogène, ouvert sur l'enchaînement aux guitares nerveuses Sun's Coming Down et The Combo. Toute la qualité de cette formation réside dans cet rupture soignée entre lignes agressives et longues introductions languissantes, comme celle de Today More Than Any Other Day, seule rescapée de leur premier effort. Elle est aussi dans le charisme évident de Tim Darcy, chanteur à la voix grave et glaciale, qui se fait harcelante sur Beautiful Blue Sky, martelant des « I feel alright » emportés. Alors qu'ils entament un rappel un peu pris par le temps sur Never Better, la salle aura eu le temps de se remplir et de leur accorder des applaudissements mérités. Les premières promesses ont été tenues.

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Le temps de se frayer un chemin vers le bar et de se mettre en quête d'un sandwich aussi cher qu'une pinte de bière, il est déjà l'heure de reprendre place pour un second quatuor qui a cette fois fait du pop-rock son terrain de référence. Nada Surf font ce soir un de leurs premiers crochets par Paris en quatre ans pour présenter leur huitième album, You Know Who You Are, sorti en mars dernier. Nouveaux titres et anciens classiques se mêlent ainsi dans cet set qui respire quelque part la nostalgie du début des années 2000, entre deux ballades pop amoureuses et riffs de guitares venus d'outre-Atlantique. Force est tout de même de constater qu'en vingt ans d'activité, la formule pop-rock aura eu le temps de vieillir, et de se faire sans doute un peu trop banale. Les premières notes des mythiques Popular et Always Love suscitent évidemment des réactions enjouées et s'empressent de ramener la majorité du public aux bons souvenirs de l'adolescence, mais ces pop songs peinent à vraiment captiver l'attention et à faire décoller un set bien trop monotone, qui restera d'ailleurs la déception de la soirée.

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Heureusement, alors que la musique s'éteint et que les lumières se rallument à peine, on murmure déjà qu'il doit se passer quelque chose dans l'entre-foyer. Jouant des coudes pour se frayer rapidement un chemin hors de la boîte noire de la Gaîté Lyrique, on note qu'un micro et une guitare sont bien installés à mi-chemin entre la salle et le foyer. Cette scène-ci est minuscule, ne tient que sur une poignée de mètres, et pourtant c'est peut-être ici qu'il se passe le plus de choses. C'est l'espace exigu qui accueille la londonienne Anna B Savage, figure discrète, quasi-inconnue qui nous a tout juste gratifié d'un EP l'année passée - mais quel EP.
La jeune femme prend possession de son espace sans à peine plus qu'un coup d'oeil pour les curieux qui ont pris la peine de s'amasser autour, se saisissant d'une guitare qu'elle empoigne tantôt comme seule arme, tantôt comme une délicate compagne. Doucement, parmi un regrettable brouhaha, s'élève une voix, profonde, et aux accents si sublimement brisés. Comme celles qui ont le pouvoir de réduire au silence lorsqu'elles flirtent avec les hauteurs, leur justesse ne tenant qu'à un fil parfois rompu. Anna B Savage s'exprime seule au milieu d'un torrent de spectateurs avec grâce et honnêteté, les yeux souvent rivés sur le sol. On émet le souhait, furtif, que jamais cela ne s'arrête, alors que déjà, sa petite demi-heure de set touche à sa fin. Après une apothéose qui prend la forme d'un II passionné, elle nous quitte aussi discrètement qu'elle était arrivée. Puissent les retrouvailles avec cette londonienne ne pas trop se faire attendre.

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Mouvement de foule, retour à la scène. Aussi charmés que l'on a pu être par le set précédent, impossible de rater ne serait-ce que quelques précieuses secondes de ce qui arrive. Neil Hannon se fait bien trop rare pour que l'on puisse se l'autoriser. The Divine Comedy est une autre de ces formations qui ont parcouru les vingt dernières années comme l'on traverse une nuit festive, promenant leur pop baroque de scène en scène. Lunettes de soleil vissées sur le nez, noeud papillon de travers, le voilà d'ailleurs qui débarque sous les applaudissements d'une salle comble. La fête peut débuter sous le clavier chanteur et jovial d'A Drinking Song, issue de leur grand classique Promenade. La Gaîté Lyrique revêt alors des airs de manège enchanté sous l'effet de cette magie nord-irlandaise.

Quoi qu'il puisse en dire, il faut bien chercher les traces d'une quelconque vieillesse chez un Neil Hannon dont la légendaire ironie est toujours aussi vivace. Entre deux apartés espiègles et gorgées de Guinness, il introduit des chansons issues du futur onzième album de The Divine Comedy, dont la douce ballade To The Rescue. De ces tendres moments de calme aux multiples invitations à danser bière en main, il est déjà plus de minuit lorsque le groupe quitte une première fois la scène sur la divine envolée de Tonight, We Fly. Ce qui ne l'empêchera pas de revenir une première fois nous faire chanter en choeur les « ba, ba, ba, da » de National Express, ni une seconde fois pour que Neil nous entonne un dernier Lucy, seul à la guitare.

Il est l'heure de courir pour attraper les derniers métros, mais c'est la tête pleine des échos de cette pop orchestrale qu'on redescend les escaliers vers les souterrains parisiens. Il n'y a pas à dire, la vie est quand même bien plus belle lorsqu'elle ressemble à un grand concert de The Divine Comedy.
setlist
    ANNA B SAVAGE
    Non disponible

    THE DIVINE COMEDY
    A Drinking Song
    Assume the Perpendicular
    At the Indie Disco
    To The Rescue
    Funny Peculiar
    Something for the Weekend
    Sweden
    Generation Sex
    Catherine The Great
    Mastermind
    A Lady of a Certain Age
    Songs of Love
    Bang Goes the Knighthood
    Down in the Street Below
    Other People
    Our Mutual Friend
    Tonight We Fly
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    National Express
    Charmed Life
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    Lucy
photos du concert
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