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King Charles

Paris, Divan Du Monde - 27 avril 2016

Live-report par Olivier Kalousdian

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Il y a un gouffre, une monde entre le King Charles de LoveBlood, son premier album sorti en 2012 et pour lequel il était venu jouer en 2012 à la Maroquinerie ou aux Combustibles (devenu le Pop-Up du Label, depuis) accompagné d'un groupe festif et d'un look ultra glam et le King Charles de retour ce soir au Divan du Monde. Tout a changé. Sa musique : passée du glam pop joyeux aux folk songs mélancoliques. Son look : débarrassé de ses dread locks et devenu un brin austère ; ses textes : toujours remarquables, mais empreints d'un sentimentalisme pesant.

Quand Norma, la première folk singer de la soirée du Divan du Monde termine son set, seule en scène accompagnée de son unique guitare électrique, on se dit que la mise en bouche offerte par cette très jeune française n'était qu'un léger hors d'oeuvre, parfois électrisé mais souvent alangui et que le plat de résistance sera bien plus copieux...

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Pour celles et ceux qui n'ont pas vu ou entendu King Charles depuis LoveBlood, la surprise est totale ! Les souvenirs sont encore forts de son Mississippi Isabel et son clip surréaliste digne, ou presque d'un Syd Barret du 21ème siècle. Mais, c'est un King Charles dépourvu de tout badinage et de toutes facéties, auxquelles il nous avait pourtant habitués qui investit la scène du Divan du Monde, seul, lui aussi avec ses deux guitares...
Le protégé de Mumford And Sons a muté à l'envers ; il est passé de l'artiste trublion, chanteur à la forte personnalité puisant dans le meilleur du répertoire glam et pop pour se transformer en pur folk singer, le cheveu presque sage et la mine presque grave. Comme l'annonçait déjà l'affiche du concert du soir... reprenant la pochette de son nouvel album : Gamble For A Rose. A l'origine de ce changement radical, il expliqua à son ami Marcus Mumford : « Je veux faire l'album que j'aurais dû faire il y a cinq ans. » Dont acte.

Marcus et Charles Costa (de son vrai nom) sont partis dans une ferme près d'Exeter pour commencer à travailler sur les chansons, avec des matelas posés contre les murs en guise de cabines de voix, et des vieux potes avec qui jammer comme Charlie Fink et Tom Hobden (Noah And The Whale) ou Winston Marshall (Mumford & Sons). Le résultat est là : un nouvel album Gamble For A Rose dont les titres joués ce soir, comme Loose Change For The Boatman (chanson d'amour passionnée) prouvent, si besoin était, qu'il n'a pas été le lauréat du Grand Prix du Concours International d'Ecriture de Chanson avec le titre Love Lust pour des nèfles. Il lui aura fallu quitter son label et son management pour découvrir quelles étaient ces racines, selon ses propres termes.

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Mais, si Gamble For A Rose ou St Peter's Gate sont des titres poétiques écrits à fleur de peau et interprétés avec une sincérité émouvante, le jeu du folk singer qu'est devenu King Charles semble parfois tristement identique à celui de ses coreligionnaires de la folk song d'où d'autres artistes ont su tirer une quintessence plus acerbe et un brin plus inspirée en terme musical.
On apprécie la fragilité de ses nouveaux titres composés avec la finesse d'un artiste qui n'a pas à démontrer son talent d'auteur ou de compositeur, mais King Charles en fait souvent trop pour compenser tout ce qu'il a laissé au bord de la route. Il en est tellement conscient qu'il annonce, en fin de set, fièrement, mais avec cette lassitude qu'expriment parfois les groupes dont certains singles ont marqué de trop les mémoires, ses titres les plus anciens comme, Mississippi Isabel ou Love Lust, revus et arrangés pour l'occasion...

Un folk singer doit-il être obligatoirement dépressif ? A cette question posée ouvertement par un confrère au récent Printemps de Bourges d'où King Charles revient, la réponse semble être, oui !