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Benjamin Clementine

Paris, Days Off Festival - 30 juin 2016

Live-report par Déborah Galopin

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Benjamin Clementine a ouvert le festival Days Off le 30 juin à la Philharmonie de Paris pour la septième édition, dans une formation particulière puisqu'il y était accompagné sur scène par The Heritage Orchestra, habitué à collaborer avec des groupes et artistes grand public. L'objectif de ce festival est de faire de chaque concert un moment unique et on peut dire que Benjamin Clementine a été à la hauteur.

The Heritage Orchestra se met en place. Pendant quelques minutes, les musiciens sont assis derrière leurs instruments sans que rien ne se passe. Le public encourage l'arrivée du chanteur par des « come on », mais c'est le chef d'orchestre qui le précède et donne la mesure. Alors que violons, violoncelles, contrebasses et altos se lancent, nous plongeons progressivement dans un univers à la fois aérien et obscur. Malgré la profusion de cordes, les instruments se font doux en contradiction à la voix du chanteur. Un seul mot suffit pour qu'il nous témoigne la force et l'ampleur de ses cordes vocales. Alors qu'il abuse de son vibrato en se demandant où est le soleil, nous sommes happés et électrisés par sa musique, sa voix chaleureuse et grave.

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Après deux titres, il nous dit « bonsoir », et chaque fois qu'il nous parle, il s'efforce d'employer notre langue plutôt que la sienne. Le chanteur a vécu quelques années à Paris, lieu où il a à la fois connu les galères avant de trouver le succès sur la scène des Francopholies. C'est après quatre ans à chanter dans le métro et les bars, qu'il croise la route de son manager qui aidera son talent à se propulser. Une personnalité généreuse, qui se ressent dans sa musique et dans le plaisir qu'il a de chanter devant nous. Il a le souci de transmettre sa musique, de la communiquer pour qu'elle soit comprise par toutes les personnes venues le voir et n'hésite pas à nous remercier copieusement.

Ses chansons s'inspirent de son histoire. Il évoque la solitude et la perte avec une justesse touchante. Bien sûr que sa musique est triste, mais il l'accompagne toujours d'une lueur d'espoir grâce à son piano. C'est surtout la solitude et la perte qu'il évoque comme avec Cornestone et Adios. Les paroles de Condolescence résument en peu de mot l'artiste qu'il est : « I, Benjamin, I was born / So that when I become someone one day / I'll always remember I came from nothing » (ndlr : « Moi, Benjamin, je suis né / Pour que le jour où je deviens quelqu'un / Je me rappelle à jamais que je suis parti de rien »).

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Il a conscience de l'effet qu'il produit sur son public et en joue. Il fait durer une pause pour reprendre de plus belle, parce qu'après un silence, une musique a un impact d'autant plus fort. Il le matérialise sur Adios, lorsqu'il nous dit « l'ange passe ». La salle se suspend, elle est dans l'attente, puis il improvise un « listen to me like this », faisant monter sa voix de Ténor au plus haut. Tout ce qu'il fait, il semble le faire avec une facilité déconcertante comme lorsqu'il joue l'un de ses titres au piano d'une main, tendant l'autre vers son public.

Benjamin Clementine fait durer son concert pendant 1h30 sans nous ennuyer malgré un ton mélancolique. On doit bien avouer que l'orchestre n'y est pas tout à fait pour rien. Les cordes ne se révèlent pas trop imposantes, elles sont présentes pour appuyer l'émotion de sa musique, sans la dénaturer. Benjamin n'hésite pas à jouer quelques morceaux en formation réduite en piano, batterie et voix, ce qui apporte aussi de la diversité.

Si sur master Benjamin Clementine témoigne déjà de son talent, ce n'est qu'un avant-goût de ses capacités. Il a quelque chose de fort dans les tripes et c'est sur scène qu'il peut réellement l'exprimer et que nous pouvons recevoir l'étendue de sa sensibilité. Un chanteur brillant et une prestation incroyable.