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YAK
The Last Shadow Puppets

Lyon, Nuits de Fourvière - 7 juillet 2016

Live-report par Olivier Kalousdian

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L'été – tant attendu qu'il en était fantasmé depuis des semaines par des millions de français – s'est enfin imposé et alourdit de ses hautes pressions barométriques l'ascension de la colline de Fourvière, doublement policée et fermée à la circulation pour cause de festival et de match de l'équipe de France de football. Nous sommes le 7 juillet et le pilote de l'Acro Sport II (ou peut être est ce un Cap222 ?) qui défie les lois de l'attraction terrestre sous des regards ébahis pour tracer dans un ciel bleu azuréen un « FRANCE » de circonstance en ce jour de demie finale de l'Euro 2016 va s'imposer comme le héros sans nom de l'affrontement du soir. Et, même si le F est déjà effacé lorsque le E se dessine d'un long chemtrail blanc fait, dit-on, de vapeur d'eau, une grande partie du public qui pénètre sur le site des Nuits de Fourvière les yeux levés au ciel prend des airs de badauds en extase devant un lancement spatial à Kourou ou à Cap Canaveral !

Le bar éphémère, situé en haut de l'allée principale et en contrebas des escaliers menant aux gradins a subi une rénovation éco-friendly cette année et se voit maintenant totalement habillé de bois brut. Preuve que la soirée est bien placée sous le signe du football européen malgré une affiche musicale 100% Brexit, les menus du soir ont également subi une légère rénovation et à la place des traditionnels sandwichs mixte ou poulet-crudités on retrouve un « Michel Panini » ou encore une salade « Riz Cantona », de goûts plus ou moins surs, selon la barman elle-même...qui refusera de lâcher les noms des créatifs impliqués. Petit à petit, les files d'attente s'allongent devant les tireuses à bières et la température, flirtant avec les 35 degrés toute la journée retombera, si l'on peut dire, à des niveaux plus acceptables ; il fera jusqu'à 27 degrés à 1h du matin !

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Pieds nus et lunettes de soleil sur le nez, Oliver Burslem affiche une nonchalance dictée à part égale par une chaleur très inhabituelle pour un sujet de sa Majesté et par une attitude scénique très contrôlée. Avec Andy Jones et Elliot Rawson, les YAK déboulent sur la scène du théâtre antique avec le titre Harbour The Feeling tel un bicylindre en rupture d'une Triumph Thruxton de style moderne classique lancée à très vive allure, à l'image du rock lo-fi survolté proposé par le trio anglais depuis leur avènement en 2015. Tignasse hirsute en avant et cigarette au bec, Oli Burslem avale les titres comme d'autres les kilomètres d'asphalte et Hungry Heart ou Smile s'enchaînent sous un ciel maintenant crépusculaire laissant entrevoir les premières étoiles du ciel lyonnais. Quelques bières plus tard, le titre Alas Salvation rappelle, si besoin était, que YAK viennent de sortir un premier album, du même nom. Neuf titres en tout, déroulés à la vitesse de l'éclair dont le très noisy Victorious (National Anthem) joué sur un rythme soutenu, mais dans des colorations sonores un peu brouillonnes. Problème de balances ou volonté de sonner crade et en constante saturation le constat semble être le même au fil des concerts de YAK (cf leur venue au Point Éphémère à Paris le 26 mai 2016) : taper comme des sourds ne rend pas plus audible.

Changement total de décor et d'atmosphère quand le quatuor à cordes, exclusivement féminin, de noir et court vêtu, s'installe en fond de scène. Alors que l'équipe de France joue déjà depuis trente minutes sur la pelouse du Stade Vélodrome de Marseille et que la 4G ne semble pas vouloir saturer, les deux poids lourds de la soirée déclenchent les consentements lyonnais les plus appuyés, tous ages confondus. A ma gauche, Miles Kane : crane rasé et chemise hawaïenne ouverte sur un débardeur ; trente ans ; ex-chanteur de The Rascals à la carrière solo talentueuse. A ma droite, Alex Turner. trente ans également ; superstar anglaise, leader des Arctic Monkeys, cheveux mi-longs en raie centrale, négligemment gras et pantalon taille haute sur veste en soie rose (aussi appairés qu'un rosbif et sa sauce à la menthe du dimanche). Les deux protagonistes, aux physiques et aux attitudes antagonistes portent sur leurs épaules le super groupe The Last Shadow Puppets depuis 2008. Deux albums au compteur et autant de singles connus du grand public, The Last Shadow Puppets fait partie des groupes dont l'iconographie et les viseusl (clips vidéo léchés ; photographies de haute volée...) sont aussi connus que la musique et l'aura multipliée, de fait par un facteur deux.

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Un facteur qui tendra encore à s'amplifier dans l'hexagone lorsque pour introduire leur set lyonnais, The Last Shadow Puppets interprètent une reprise des Cactus de Jacques Dutronc (en français dans le texte) ! On aurait tout aussi bien pu imaginer une cover de Serge Gainsbourg étant donné l'omniprésence des harmonies à cordes teintées de sixties qui ont fait la réputation du duo signé sur Domino Records... mais, va pour Jacques Dutronc en cette soirée de tintamarre tricolore délicatement patriotique.
Le titre Aviation emboîte le pas à la cover du chanteur Corse et, tels deux grimpeurs de la même équipe, les deux sparring partners ne vont cesser de se marquer, puis de se démarquer au fil des dix-huit titres de la setlist de ce soir. Rockeur teigneux au sein d'Arctic Monkeys, Alex Turner joue les crooners provoquant et les poseurs blasés, main dans la poche quand il s'agit d'interpréter le classique The Age Of Understatement (prenant place après une autre reprise, Totally Wired de The Fall). Mais, si Alex Turner attire à lui les regards féminins les plus torrides, veste pastel légère négligemment jetée sur les épaules malgré une chaleur caribéenne, c'est bien Miles Kane qui porte la culotte de cuir dans ce couple illégitime. Impliqué et intenable, il bondit sur la scène du théâtre antique sur les accords de Meeting Place et le très attendu Standing Next To Me que stratosphérisent, sur la deuxième partie notamment, les longues harmoniques d'instruments à cordes placés en arrière-plan de la scène. Ne seraient-ce les deux chants partisans lancés par le public de Fourvière en plein récital et laissant pantois, quelques secondes, Alex Turner et Miles Kane (« Allez les Bleus. Allez les Bleus... ») et qui viendront nous renseigner en temps réel sur les deux buts de l'équipe de France inscrits à Marseille (une aubaine pour celles et ceux pour qui le football compte autant que les soixante-dix ans du parti unique nord coréen un jour mai 2016...), la chaude soirée du 7 juillet fut quasi parfaite et le public, très hétéroclite, finalement connaisseur d'un groupe qu'on aurait pu penser trop intimiste pour être si populaire.

On déplore, néanmoins, un lancé de coussins verts trop précipité et avant même le rappel. Une faute de goût inexcusable dans une enceinte dont le satisfecit – une fois n'est pas coutume – est inversement proportionnel aux jets de projectiles sur les groupes qui se produisent devant elle.
setlist
    YAK
    Non disponible

    THE LAST SHADOW PUPPETS
    Les Cactus (Jacques Dutronc cover)
    Aviation
    Used To Be My Girl
    Miracle Aligner
    Only The Truth
    The Dream Synopsis
    Dracula Teeth
    Pattern
    Totally Wired (The Fall cover)
    The Age Of The Understatement
    The Bourne Identity
    Everything You've Come To Expect
    Meeting Place
    Bad Habits
    My Mistakes Were Made For You
    ---
    Sweet Dreams, TN
    Standing Next To Me
    In My Room
photos du concert
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