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Black Affair
Aidan Moffat

Paris, Palais de Tokyo - 25 avril 2008

Live-report par Arth

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Claustrophobe, grenouille, parpaing. Non, ces trois mots n'ont rien à voir avec cette soirée du 25 avril passée au Palais de Tokyo, mais c'est le concept en vogue voyez-vous : sortir trois mots sans liens, sans sens, et donc remplis d'une matrice invisible qui fait chavirer les uns et vomir les autres. Donc une soirée hum hum, où chaque invité portait un smic sur lui, la plus grosse part du salaire allant dans les lunettes et dans les chaussures. Cette petite communauté sélectionnée vient assister, dans un des bâtiments culturels les plus agréables de Paris, à la résurrection de deux seigneurs de la pop atmosphérique anglaise de ce début de siècle, Steve Mason et Aidan Moffat, respectivement ex-leaders du Beta Band et d'Arab Strap. Bien dans leurs chaussons avec leurs projets de retraite, Aidan Moffat s'amuse à lire ses poèmes originaux qui tournent en musique autour des fesses, et Steve Mason, après l'aventure King Biscuit Time peu convaincante, qui expérimente son écriture électronique pour un revival à la Hot Chip.

Invité de dernière minute, Nelson étaient là pour chauffer un peu la salle mais il faisait encore bon sur la terrasse, alors ça va merci.
La musique, ou plutôt les scènes, d'Aidan Moffat imposent la position assise au public. Est-ce qu'on se lève pour écouter dans un café littéraire ? Non. Aidan nous la joue introverti, clavier sur les genoux, sonorités de jouets McDo, et textes. Des textes prononcés dans la langue d'Highlander, tournés sur le sexe, semblent apparemment fasciner le bonhomme. Malheureusement c'est bien le genre de projet qu'on ne s'amuse à sortir que sur DVD d'intellectuel arty (dont la librairie du Palais est remplie) comme oeuvre intime et littéraire, plutôt que d'en faire un concert en tant que tel, car force est de constater que son délire nous ennuie. Le résultat ressemble à ces oeuvres, films, que tu ne peux pas critiquer, parce que tu as peur de te faire brûler vif par l'opinion générale, mais qui t'ennuie mortellement. Comme certains films chinois par exemple...
Alors oui, Stage of the Art a eu raison de l'inviter, car il représente l'artiste dans sa tradition, l'écrivain avant le musicien, l'auteur, le penseur... l'image que les soirées veulent montrer, celle de la réunion des arts.

A cet instant je réalise que je ne figure pas sur la liste VIP. Il y a une exposition privée plus loin dans le Palais, et tout ceux qui portent un peu plus d'un smic filent à l'anglaise à la pause. Heureusement, j'ai confiance, je sais que Steve Mason c'est quand même le Beta Band, c'est quand même une des voix les plus charismatiques de ces dix dernières années, et qu'un nouveau projet, avec de nouveaux musiciens, ça devrait aller.
Et pourtant non, encore raté. J'aurais du m'en douter avec son King Biscuit Time qui était déjà très en dessous de mes attentes. Le ton est clairement annoncé, il veut qu'on bouge sur un son de dancefloor, mais les pauvres ne nous aident pas. Bouillie inefficace, samples ratés. C'est compliqué de réussir un son electro pesant avec pour objectif de faire bouger les gens. Ca peut marcher dans un clip vidéo ou dans un club assez sombre de Kiev à 5h du matin où il y aura probablement une fille qui ira danser sensuellement une dernière fois avant d'aller vomir (imaginez la scène en écoutant Application), mais là, à froid ,dans un musée rempli de fans du Beta Band, ça ne prend pas du tout. Seul la voix de Mason sauve la barque, mais c'est vraiment tout ce qu'on retient au final, et du coup on ne l'excuse plus. C'est bien d'avoir un don, mais c'est mieux d'avoir du goût.

Une deuxième soirée Stage of the Art qu'on ne peut vraiment critiquer pour ses intentions. Il est vrai que l'affiche était classe, pleine de distinctions, de raffinement. Mais musicalement la réalité était bien moins enchantée pour les fans de pop. La soirée ressemblait davantage à une exposition vivante qu'à un concert, et en ça, malgré l'immédiate déception engendré par les faits, le concept Stage of the Art a de belles années devant lui en proposant une alternative artistique efficace dans un lieu anodin, comme si les Concerts à Emporter devenaient publics. On peut imaginer et souhaiter pour la suite des collaborations entre musiciens et plasticiens en contact avec le musée pour la création de spectacles uniques mensuels afin de créer une nouvelle approche de l'art et de démocratiser le concept adulé déjà existant mais à très faible fréquence. Art, Art, Art...