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Matt Elliott

Paris, Café de la Danse - 27 mai 2009

Live-report par Emeline

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Dans le cadre des ses sessions printanières organisées par la Route du Rock, Belone Quartet, Centenaire et Matt Elliott se produisaient au Café de la danse, à Paris. Trois formations aux univers différents mais qui ont toutes relativement eu bon écho auprès de l'assistance.

Belone Quartet a la lourde tâche de chauffer la salle quelque peu distante et silencieuse. Mission accomplie : les synthés électro et les beats entraînants des deux Nantais réussissent à capter l'attention juste avant que Centenaire ne prenne le relais sur les coups de 20h30.
Ces quatre multi-instrumentistes ont l'audace de s'aventurer dans des contrées à mille lieues de faire dans la musique consensuelle ou le simple couplet-refrain. Chez ces Parisiens, l'on décèle une inventivité musicale rare, puisée autant dans le post-rock de Mogwai que dans le krautrock de Battles ou le rock noisy de Sonic Youth, le tout auréolé d'un chant souvent pop de bonne augure. Rien n'est foncièrement effarant sur scène – chacun des musiciens semble totalement concentré sur son jeu – mais il suffit de tendre une oreille plus attentive à la structure alambiquée des morceaux et, notamment, à la force de frappe du batteur pour se rendre compte que le groupe joue dans la cour des grands. Il n'y a qu' à écouter le joli morceau d'ouverture, Take Me Home et ses sonorités de clarinette ou Strong pour voir que le combo est bien en place. Dommage qu'il soit un peu timide sur scène.

Quand Matt Elliott investit la scène, touchant de modestie, il inaugure un voyage fantasmagorique et épique dont on n'aura du mal à sortir une heure plus tard. Assis sur une chaise avec pour seule compagnie ses deux guitares (une classique, une électrique) et son attirail de pédales d'effets (réverbes, samplers, reverse, pitch, etc.), le musicien de Bristol ne fait pas, a priori, dans la surenchère spectaculaire. Mais, tel un orchestre à lui tout seul, l'homme est capable de nous foutre le frisson dés qu'il chante quelques mots de sa voix caverneuse et pure ou de nous faire vibrer le corps lorsqu'il part dans des expérimentations vocales tout simplement grandioses. Chez ce bonhomme, c'est la transversalité qui prime : s'il demeure calme et intime sur la plupart de ses morceaux (dont La Mort de la France, jouée en introduction et chantée en français), ailleurs, il est aussi capable de pousser sa voix au maximum au point de faire ressortir ses veines sur ses titres incandescents tels que The Kursk ou The Howling Song qui prennent toute leur dimension mystique sur scène.

Ovni artistique qui invente son propre langage, Matt Elliott traverse les époques en musique, immergeant tour à tour les spectateurs dans un décor d'Espagne ou d'Europe de l'Est (Whats Wrong, Something about Ghosts). Mais complaire sa musique dans un simple créneau folklorique serait bien mal connaître l'artiste. Car, à l'évidence, Matt Elliott ne s'est pas vraiment affranchi de son passé au sein de son projet Third Eye Foundation. Et pour cause, si ses chansons débutent toujours en acoustique avant d'être construites au fur et à mesure que le musicien sample ses parties instrumentales, elles se clôturent parfois en d'énormes nappes aériennes et électroniques apocalyptiques.

Au final: Matt Elliott incarne la liberté de ceux qui n'ont pas choisi de faire de la musique mais de la ressentir. Son pari est gagné : l'émotion qu'il procure en live se vit intensément. Dommage qu'elle se doit de retomber vers 22h30 pour ne pas indisposer des voisins de pallier qu'on aurait aimé savoir simplement sourds ce soir là.