Magistrates
Delphic
Chew Lips

Tradition oblige, le célèbre label français de musique électronique Kitsuné accueillait cette semaine à la Maroquinerie l'une de ses soirées en l'honneur du dernier volume de sa compilation Maison. Au programme, trois jeunes pousses anglaises déjà aperçues ces derniers mois dans diverses salles de la capitale, Magistrates, Chew Lips et Delphic., ainsi que Crystal Fighters en clôture de soirée.

C'est ainsi devant une très maigre affluence que Magistrates se jettent dans le grand bain et les deux premiers titres joués ne donnent pas réellement tort aux absents. Son approximatif, effets superflus, chansons bancales et encore peu maîtrisées... la première impression est, de manière surprenante, plutôt négative et la réaction du public peu chaleureuse. Après quelques minutes de rodage, le groupe semble enfin trouver ses marques et paraît transfiguré. Goldlover et le single Heartbreak sont immédiatement reconnus et adoptés par un public réactif, les cinq anglais trouvant par la même occasion un écho favorable à leurs tentatives de communication et de communion. Bien accompagné par une basse funky et une guitare toute en retenue mettant en valeur les mélodies imparables de titres à l'image de Colour Co-Ordination ou Make This Work, Paul Usher peut se concentrer sur ses pas de danse tout en faisant admirer une voix haut perchée dans les aigus. Une prestation au final très positive et réjouissante, confirmant le potentiel de Magistrates pour se faire remarquer à très court terme.

L'accueil réservé une petite demi-heure plus tard à Chew Lips, dans une salle copieusement remplie, pousse d'emblée le trio londonien à donner le meilleur de lui-même. Deux musiciens prennent ainsi place derrières leurs claviers et sampleurs tandis que la pétillante Tigs arpente la scène de long en large, micro à la main, pour mieux haranguer la foule. Très dansante et rythmée, tout en étant assez peu subtile et redondante par instants, la musique du trio laisse une place prépondérante à un chant proche de celui de Karen O (Yeah Yeah Yeahs) alors que la basse, et plus occasionnellement la guitare, font des incursions remarquées et apportent une diversité bienvenue à des compositions qui en manquent trop souvent. Les temps fort du set de Chew Lips sont au final le single très entraînant qu'est Solo mais aussi et surtout le titre Gold Key, plus posé et lancinant, durant lequel la vocaliste escalade une enceinte afin d'y prendre place tout en continuant son chant.

Après quinze minutes d'attente, place à Delphic., avec une nouvelle fois une entame de set brouillonne et peu convaincante. Adeptes des machines, claviers, samples et autres percussions électroniques, les trois bidouilleurs sont aussi accompagnés par un batteur puissant et omniprésent, la mise en route de leur show étant toutefois mise à mal par un Clarion Call laborieux durant lequel l'interaction entre les différents instruments semble peu évidente. Tout rentre dans l'odre dès le second morceau, Doubt, et plus encore par la suite, alors que James Cook, vocaliste préposé à la basse, semble prendre ses marques.
Les cinq compositions jouées sont presque fusionnées avec une certaine habileté, les enchaînements et transitions étant parfaitement réalisées alors que le set évolue d'un son froid vers des rythmes électroniques plus entraînants auxquels le public ne reste pas insensible. Si l'on comprend vite que le groupe ne cherche pas à proposer des titres simples d'accès, la richesse des arrangements, la maîtrise technique des musiciens et le choix des effets sont des arguments de poids lorsque l’excellent Counterpoint s'achève et que l'heure du bilan arrive.

Si l'on ne peut s'empêcher de considérer Delphic. comme les grands gagnants du soir, les qualités démontrées par Chew Lips mais aussi et surtout par des Magistrates en pleine progression font de cette soirée Kitsuné une belle réussite.