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Sparrow And The Workshop

Paris, Bataclan - 27 avril 2010

Live-report par Julien Soullière

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Au Bataclan ce soir, point de chinoiserie musicale. N’en déplaise aux amateurs d’opérettes, c’est la face la plus sombre du rock indépendant américain qui, le temps d’un concert, sera sous le feu des projecteurs aux côtés de Sparrow And The Workshop. Un visage certes, mais surtout un nom : Brian Jonestown Massacre. Trois mots, lourds de références et de sens, pour désigner ce groupe maudit à la naissance et culte de son vivant. Joli pléonasme donc que de dire que le combo californien, précédé d’une réputation sulfureuse, est fermement attendu par le public parisien. Espérée haute en couleurs et en décibels, la prestation des américains est au centre de toutes les discussions, au bar comme ailleurs.

Pour autant, lorsque pour la première fois de la soirée les lumières se tamisent, la modeste foule ne se fait pas prier pour accueillir chaudement et au plus près de la scène les écossais de Sparrow And The Workshop. Compagnons de tournée de Brian Jonestown Massacre, le trio « made in Glasgow » rejoint ses instruments et débute alors un set bipolaire, empreint à la fois de la délicatesse et de la force du chant de Jill O’Sullivan. De Blame It On Me, en passant par Crystals et Medal Around Your Neck, les compositions de la formation se suivent, mais ne se ressemblent pour ainsi dire pas : à la croisée de multiples influences, leur musique, complexe, tient aussi bien du rock et du folk que de la country et du flamenco. Rien que ça.
Supportée tout du long par une instrumentation claire et puissante, la voix de Jill saura également trouver écho dans celle de son batteur. Plus qu’un simple effet, l’enchevêtrement vocal accentue un peu plus encore cet équilibre musical précaire, entre énergie et retenue. Dans le public, on hoche la tête, on encourage, on apprécie. Jamais la foule ne sera décontenancée par les nombreux, et parfois brutaux, changements de rythme, ces derniers n’entachant aucunement les qualités mélodiques des compositions. Et puis le groupe, qui joue pour la première fois à Paris, est éminemment sympathique. Leur dernier morceau joué, Sparrow & The Workshop quittent la scène. Les lumières se rallument, signe pour les roadies de s’activer. La foule devient plus conséquente et l’atmosphère plus lourde.

Commence alors une attente interminable pour les fans venus en masse. Pourtant, ça y est, la pénombre s’invite à nouveau dans la salle et les premières cigarettes s’allument. Le calvaire est sur le point de prendre fin. La foule s’excite, hurle, lève les bras au ciel et tente l’impossible pour se rapprocher de la scène. Difficile de savoir à quoi s’attendre ce soir. Le combo, qui a vécu au rythme de l’esprit de son démiurge fondateur, Anton Newcombe, a un passé scénique chaotique. Honnêtement, si leur prestation doit se conclure par les poings, personne n’osera s’avouer surpris. Il faut dire que si l’on vient voir Brian Jonestown Massacre, c’est pour la qualité de ses compositions, certes, mais également pour des raisons qui n’ont pas grand-chose à voir avec la musique. Dans la moiteur et le bruit ambiant, les américains font leur entrée, silencieux. Anton, Matt, Collin, Frankie, Ricky, Daniel, Joel, Rob. Ils sont tous là. Bières et autres bouteilles de whisky aussi.
Très vite, ils entament leur set par un Super-Sonic à l’introduction lancinante et entêtante, qui s’achèvera de manière bien plus vigoureuse. De là, de l’avis d’un connaisseur, c’est un véritable Best Of qui est proposé au public parisien. Si la musique des californiens flirte très généralement avec le garage-rock à tendance psychédélique (à vos souhaits), elle montre parfois des couleurs beaucoup plus pop, lorgnant ainsi tant du côté des Rolling Stones que de The Velvet Underground ou des Beatles. Pour autant, en dépit des ces nombreuses influences, difficile de dire que le concert ait été passionnant. Long certes, près de deux heures, mais pas passionnant. Point de charges sonores héroïques ou de règlements de comptes scéniques, tout juste quelques variations dans l’humeur de Newcombe. Et des titres trop proches musicalement parlant les uns des autres pour véritablement convaincre. Paradoxalement, la foule ne semble pas encline à relâcher la pression et se donne corps et âme jusqu’à la fin du show. Car ce soir, pas de doute, le public parisien a joué un rôle fondamental.

Anton Newcombe semblant devoir composer avec ses démons intérieurs, la formation américaine n’assurera aucun rappel. Dans la salle, c’est la déception. Le public semble en effet avoir passé une excellente soirée. Au final, en dépit de ce qui a pu être dit, c’est surement là le principal.