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Paul Weller

Paris, Bataclan - 19 mai 2010

Live-report par Anne-Line

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Après Ian Brown au Trabendo en début d'année, encore un coup d'éclat de la part d'Alias avec la programmation de Paul Weller au Bataclan. Il avait prévenu, en 2002, à la fin de sa prestation dans la même salle : « Je ne reviendrai pas avant un bon bout de temps ! ». Huit ans plus tard, le Bataclan est plein comme un œuf. On se fraye un chemin parmi la nuée de polos Fred Perry, il s'agit d'être aux premières loges pour admirer le travail du Modfather et de son bras droit préféré, Steve Cradock. L'absence du groupe de ce dernier, Ocean Colour Scene, du territoire français pendant dix ans a beau avoir été réparée il y a quelques semaines, on ne va pas bouder notre plaisir. Lorsqu'il fait son apparition aux côtés de Weller sur la scène du Bataclan, leur indéniable complicité musicale saute aux yeux, ou plutôt aux oreilles. L'un est ici pour servir la musique de l'autre, mais personne ne tente de tirer la couverture à soi. Ils se mettent en valeur l'un et l'autre.

Weller choisit de risquer des morceaux récents et peu connus pour démarrer son set, choix courageux surtout après une absence aussi longue. Par conséquent, le public français tarde quelque peu à se plonger dans le concert, mais ce n'est pas faute d'une interprétation immaculée de la part du groupe. En plus de Steve Cradock, le backing band comprend également Steve Pilgrim à la batterie et Andy Croft aux claviers, deux musiciens à l'expérience solide malgré leur jeune âge et leur relatif anonymat. Pilgrim a fait partie des regrettés The Stands (aux deux albums jouissifs) avant d'entamer une carrière solo en 2007, tandis que Croft vient de sortir un premier album avec son groupe The Moons, Life On Earth, recommandé aux Wellerophiles.
L'ambiance se réchauffe un peu pendant From The Floorboards Up ou encore Come On/Let's Go, issus de l'album de 2005, As Is Now, et l'on peut constater que Weller a la cinquantaine vigoureuse, car il est loin d'avoir perdu de son énergie et de sa prestance naturelle. Pendant tout ce temps, d'aucuns se demandent avec anxiété quelles seront les chansons des Jam qu'il daignera jouer ce soir. C’est donc Art School, auquel il ne manque que les sauts de cabri de trois mètres que Weller effectuait à l'époque en moulinant sur sa Rickenbacker; Pretty Green et Scrape Away, preuve s'il en faut que Weller porte toujours dans son cœur les morceaux de l'époque la plus tardive des Jam; et Start! que l'on ne présente plus.
Bien sûr, la période Style Council est aussi représentée et le public autant que le groupe se trémousse sur Shout To The Top!. Tout au long du concert, le plaisir de jouer se ressent chez les musiciens, et pour se faire pardonner sa trop longue absence, Weller s'installe au piano pour jouer un Let It Be Me (ndlr : Je t'appartiens de Gilbert Bécaud) touchant, en précisant que c'est là sa chanson française préférée. Le concert se termine non pas sur un, non pas sur deux, mais sur trois rappels. Le premier est consacré à des chansons acoustiques que Weller joue accompagné de Steve Pilgrim, qui démontre là ses talents de multi-instrumentiste, et Andy Croft. Pendant ce temps, Cradock officie à la guitare slide au fond de la scène, et laisse la vedette aux petits jeunes.

À la fin de la soirée, si l'on devait regretter une seule chose, ce serait l'absence de la somptueuse ballade You Do Something To Me de la setlist, mais la version de Wild Wood offerte ce soir est d'une telle intensité que l'oubli est bien vite pardonné. Il ne reste plus qu'à espérer que, désormais, le Modfather ne nous laissera plus aussi longtemps sans nous rendre visite de ce côté-ci de la Manche.