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Allo Darlin'

Paris, L'International - 27 juillet 2010

Live-report par Julien Soullière

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Another Sunny Night. Si le soleil est aux abonnés absents, la rue Moret, elle, sent pourtant l’été à pleines narines. En témoigne le ballet de t-shirts, jupes et autres chemisiers à fleurs qui se joue devant moi lorsque, en retard, j’arrive devant les portes de l’International. Une clope à la bouche, j’observe alors l’endroi t: si je n’y ai jamais mis le moindre pied, son allure délicieusement grunge ne tarde pas à me séduire. Rien de mieux, ou presque, que les revêtements finis à la bière et une poignée de semelles qui collent au sol. Quelques discussions et bouffées de cigarettes plus tard, je me décide enfin à rentrer. Les hostilités n’ayant pas encore été lancées, j’ai du temps devant moi pour profiter d’un happy hour d’autant plus sympathique que la chaleur se montre réellement oppressante. J’ose d’ailleurs à peine imaginer quel niveau atteindra mon taux de sudation une fois que les concerts auront commencé.

L’agitation tant attendue pointe finalement le bout de son nez. Les Signifier/Signified viennent de monter sur scène, et chacun y va alors de sa dernière gorgée, avant de rejoindre d’un pas pressé l’escalier menant au niveau inférieur. Ça bouscule un temps, puis ça finit par coincer, certains faisant le choix de s’installer sur les marches, sans savoir précisément sur laquelle d’entre elles ils vont bien pouvoir s’asseoir. Je profite alors de mon immobilité forcée pour jeter un œil en direction de la scène, au devant de laquelle s’est amassée une foule somme toute conséquente. Je décide d’ailleurs dans un premier temps de me joindre à elle, avant de me raviser et d’opter pour le fond de la salle, un climatiseur y étant aménagé. Pas folle la guêpe.
Signifer/Signified, c’est ce qu’on appelle communément un « supergroupe »; comprendre par là un truc hybride, résultant de l’association entre musiciens de plus ou moins grande notoriété. En l’occurrence ici, le combo parisien est composé de trois membres de Go Go Charlton et d’un échappé de Dorian Pimpernel. Un mélange aussi alléchant sur le papier que sympathique dans la réalité, la « faute » à des morceaux, certes peu originaux, mais suffisamment chargées en crachin anglais et en soleil californien pour séduire le public. Ceci d’autant plus que les français ont l’intelligence de proposer un set relativement court : mieux vaut laisser l’assistance sur sa faim que de la lasser. Et puis, soyons honnêtes, ça permet aussi de retrouver plus rapidement les joies de la température extérieure.

Les conversations se multiplient au rythme des verres de bières descendus. Et puis voilà qu’arrivent Max, Dana, Colin, Holly et David, aka The Smittens. Un groupe originaire du Vermont, fort de trois chanteurs et d’autant d’albums au compteur. Tout sourire, ils nous saluent et entament dans la foulée leur prestation, soit un parfait concentré de sable chaud, de candeur adolescente et d’innocence exacerbée. De la twee pop qu’ils appellent ça. Peu importe, au final c’est surtout sacrément charmant : parfois touchantes (au hasard, Gumdrops), souvent entrainantes (on pense notamment à 11:11), mais aussi parfaitement dans l’esprit de cette Another Sunny Night, les compositions des américains, toujours très courtes, évitent les fautes de goût et laisse s’entremêler sans fin les voix des différents chanteurs. Cerise sur le gâteau, les bougres se montrent bavards et j’en profite pour me dire que, décidément, les américains s’étonneront toujours de ce manque de pudeur typiquement français (« j’en vois beaucoup s’embrasser, on voit très peu ça aux Etats-Unis... je veux dire, ici c’est fantastique! »).

A peine le temps de prendre notre dose de fraicheur syndicale que l’on redescend dans la cave pour accueillir les copains d’Allo Darlin', un groupe que je me rappelle avoir découvert via leur titre Dreaming, sur une énième compilation de début d’année. Un morceau qui me renvoie, chaque fois que je l’écoute, à mon époque Belle And Sebastian, de part ce côté si désuet et bougrement mélancolique; un morceau également révélateur de ce à quoi ressemblent les autres, même si la formation anglaise va nous réserver quelques surprises, à l’image d’un My Heart Is A Drummer au final tout en roue libre rock. Toujours se méfier de l’eau qui dort, toujours.
Dans la salle, l’assistance ne désemplie pas. La motivation, elle, reste des plus inflexibles. Renvoyant au groupe son généreux sourire, le public se trémousse au gré des chansons, visiblement conquis par cette pop à tendance tubesque. Comment, cela dit, ne pas être sous le charme de cette formation ? Et puis Elizabeth est aussi craquante avec son ukulélé, que Bill est hilarant avec sa touche de boucher teuton. Bref, on oublie la chaleur, on hoche la tête, et on passe un beau moment que l’on ne voit pourtant pas passer.

Dans la droite lignée des Customs et autres Inrocks Indie Club, l’International a désormais sa propre soirée « avec un nom trop bien et tout, et tout », et au vu de l’affluence de ce soir et des retours enjoués, la prochaine risque de trouver son public. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.