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Gruff Rhys

Paris, Point Éphémère - 29 novembre 2010

Live-report par Amandine

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C'est dans un coin de la salle d'exposition du Point Éphémère, sur une scène faite de bric et de broc mise en place pour l'occasion, que Gruff Rhys, tête pensante des Super Furry Animals et de Neon Neon, a installé son matériel d'un soir.

 

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On a vite l'impression qu'il est allé fouiller dans le grenier de Mamie pour trouver des instruments que les enfants auraient reçus pour Noël il y a quelques années : un petit clavier Bontempi, un vieux tourne-disque, quelques vinyles, des baguettes électroniques, un micro avec lequel on peut faire des bruitages. La guitare est une guitare de gaucher : qu'à cela ne tienne ! Gruff a l'habitude et fabrique une pièce de contreplaqué qu'il fait tenir avec un morceau de Velcro et le tour est joué. C'est donc dans une ambiance atypique que nous reçoit le Gallois, débarquant sur scène avec un pull des plus kitschs et une bonhomie non dissimulée.
Même si l'ambiance est dépouillée et l'installation réduite à son plus strict minimum, il ne faut pas s'y méprendre : Gruff Rhys fait partie de ces génies injustement sous-estimés et chacune de ses prestations est une petite bombe, un condensé de folie et de talent. Pour preuve, les nombreux artistes ayant fait appel à lui pour des collaborations : Sparklehorse, Simian Mobile Disco, Mogwai ou, plus récemment, Gorillaz. Il faut dire que l'homme à tout faire est sur tous les fronts, ce que les critiques lui ont d'ailleurs parfois reproché : projet avec Super Furry Animals, avec Neon Neon, réalisation d'un film de science-fiction en Patagonie... Après un premier effort solo bâclé, il sortit Candylion pour nous prouver que même seul, il est capable de nous pondre, dans un écrin de velours, des titres bouleversants.

 

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Alors que Shark Ridden Waters est en téléchargement gratuit depuis peu, Gruff Rhys est venu ce soir pour nous révéler l'esprit dans lequel sera plongé son futur Hotel Shampoo. Dès les premières minutes, il nous prévient qu'il commencera par jouer les titres les plus lents et ennuyeux pour aller crescendo. Il ironise sur le fait que le premier morceau qu'il a décidé de jouer est tiré de la scène de génocide de son film Separado ! Des chants d'oiseaux en fond sonore pour donner un air plus champêtre, un métronome en guise de batteur et voilà qu'il nous balance ses mélopées ahurissantes. La voix est fragile, parfois chevrotante, mais pleine d'une émotion brute. Ses compositions folk sont à faire pâlir les plus grands et il emmène le tout dans une bonne humeur et un humour qui n'est pas pour déplaire à l'auditoire attentif.
Il déclame la nature, l'archéologie, les voyages et incite le public à « hurler aux premières notes d'un titre comme cela se fait chez les superstars où les premiers rangs acclament le moindre mouvement de leur idole adorée ». Parce que Gruff Rhys est d'une humilité rarement égalée, il semble se demander pourquoi on l'ovationne à ce point et préfère rebondir par une pirouette qui, pour lui, passe par l'humour.

Après une première partie acoustique, le Gallois, comme il l'avait annoncé en début de soirée, augmente en intensité. Aidé de ses vieux vinyles et de ses instruments de fortune, il nous laisse entrevoir sa folie douce. Il construit des morceaux en samplant des sons, des voix, des lignes de guitare... on réalise alors un peu plus le talent que l'on a en face de nous. Certains se demandent sous quels produits il peut œuvrer, mais quant à moi, je crois plutôt qu'à l'instar d'un Troy Von Balthazar, avec (ou sans) Chokebore, une fois que l'artiste est plongé dans son univers artistique, sa folie géniale l'envahit et il ne dresse aucune limite. Pour son dernier morceau, il choisit de nous faire écouter un solo de saxophone sur un de ses vieux disques pour dédier son I Vomited Through Your Solo Saxo à l'auteur du chef-d'œuvre.

 

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Il brandit alors un panneau portant les mots « The End, Thank You ». Les spectateurs l'acclament... des moments pareils devraient se répéter plus souvent.