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Anna Calvi

Paris, Trianon - 22 avril 2011

Live-report par Olivier Kalousdian

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Soirée de gala en ce vendredi soir dans un Trianon qui a eu chaud à son arrière-salle le mois passé lors de l’incendie de l’Elysée Montmartre, une porte à côté. Chaud, Le Trianon l’est encore en ce début de soirée d'été avant l’heure ; une chaleur qui va aller en s’accentuant avec cette unique date parisienne d’Anna Calvi, précédée de Milkymee, alias Emilie Hanak, jeune et jolie Suédoise folk singer jouant solo à la guitare.

La foule amassée devant l’entrée est masquée par les imposants camions régie des prestataires de la captation prévue pour Arte Live Web ; c’est dire le statut et les galons gagnés par la belle Anna en quelques mois ! Interviewée en novembre dernier dans un café du Père-Lachaise, elle était arrivée à pied avec sa guitare et son sac de voyage en bandoulière, frigorifiée par un hiver précoce et aussi timide qu’une élève de conservatoire avant son examen de fin d’année ! Timide, elle l’est toujours ; à pied avec sa guitare en bandoulière, peu probable que cela arrive encore...
Elle avait déjà pour elle une réputation sans ambages, auréolée d’un parrainage qui allait de Nick Cave à Brian Eno, excusez du peu. Il ne lui restait plus qu’à consolider les espoirs placés en elle par Domino Records. Chose faite et même sensiblement dépassée si l’on en juge par la foule de ce soir, triée sur le volet du peu de places disponibles et des listes d’invitations dont tout le gratin de la presse a bénéficié pour venir juger sur pied celle dont la puissance de la voix est proportionnellement inverse à la taille !

 

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Sous les velours rouges et les trois balcons du théâtre du Trianon, nous sommes nombreux à nous tenir chaud derrière les caméras. Six caméras HD pour une captation web, peu d'artistes si jeunes peuvent se vanter de tant d’attention ! Fidèle à son trio de départ, Anna, accompagnée de Daniel Maiden-Wood à la batterie et de son amie et collaboratrice de longue date, une femme orchestre tantôt pianiste, tantôt guitariste, tantôt percussionniste, Mally Harpaz, entame son set par un Rider To The Sea dont la guitare Richard Hawlienne tire quasiment des larmes à mon voisin criant des « I love you Anna » depuis son entrée sur scène !
Blackout, dont le clip est mis en boite depuis peu, met les retardataires à l’heure et tout le monde d’accord ; Anna Calvi est bien le phénomène annoncé. Elle joue et bénéficie, il est vrai, d’un statut de petit bout de femme toujours apprêté, tiré à quatre épingles d’un tailleur noir emprunté au Flamenco et maquillée comme une égérie de Pedro Almodovar. Une artiste que les médias spécialisés et moins spécialisés n’ont pas oublié de mettre en avant dans leurs pages musique ou tendance ces derniers mois. Mes deux voisines de bar et de chronique sont d’ailleurs venues écouter et applaudir Anna pour le magazine féminin le plus connu de France.

Malgré un répertoire encore limité à un premier album de dix titres plus quelques reprises, Anna envoûte littéralement son public d’une voix dévoilant des cordes vocales couvrant un spectre aussi large que son corps semble frêle ; ceci questionne encore et enchante la gente masculine ! Sa timidité entre chaque titre où quelques mots à peine sont susurrés à un public beaucoup moins dans la retenue n’a d’égal que son engagement dans les vocalises qu’elle mène d’une main de maître de musique qu’elle est. Elle semble avoir hérité un je-ne-sais-quoi d’Elvis, notamment sur sa reprise de Surrender.
Daniel Maiden-Wood complète son jeu de percussions, tout en finesse, parfois jazzy, souvent plus lourd d’un chœur rajoutant à la profondeur des titres d’Anna dont la moitié semble sortir d’un film de David Lynch. Mally Harpaz, la magicienne des sons non conformistes, évolue dans un espace confiné mais d’une étendue musicale que l’on imagine sans limite, passant de l’harmonium aux cymbales jusqu’aux instruments à cordes, manipulant parfois deux ou trois objets à la suite sur le même titre et donnant à cette formation réduite des airs d’orchestre bien plus important.

 

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Anna nous transporte une heure durant, de la douceur à la furie (The Devil) au gré des gammes escaladées par une voix qui finira par entendre celle du public lui criant son amour et attendant, fébrilement, sa reprise devenue célèbre dans l’hexagone du Jezebel du grand Charles ; pas celui de la libération mais le celui de La Bohème.
Liée à ce public tombé sous son charme et l’ayant propulsée en quelques mois sur tous les supports médiatiques possibles, elle reviendra une deuxième fois pour interpréter, en solo, le Joan Of Arc de Leonard Cohen, nous rejouant, à l’envers, l’histoire d’une France qui, en cette soirée uniquement, accepte et applaudit son invasion, au Trianon.
setlist
    Rider To The Sea
    No More Words
    Blackout
    I'll Be Your Man
    First We Kiss
    Surrender (Elvis cover)
    Suzanne And I
    Morning Light
    Desire
    Love Won't Be Leaving
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    The Devil
    Jezebel (Charles Aznavour cover)
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    Joan Of Arc (Leonard Cohen cover)
photos du concert
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