Jack Garratt

Rangé dans la fameuse catégorie « Alternative » un peu fourre-tout, Jack Garratt n'y doit en réalité sa place qu'en raison d'un éclectisme affiché. Éclectisme qui tendrait d'ailleurs à le placer au milieu d'un amas d'influences aussi nombreuses que variées, comme l'indique d'ailleurs le nom Synesthesiac EP, autour duquel celles-ci sont réunies le temps de quatre morceaux.

Sous ses airs de hipster dépassé, Jack Garratt, sa longue barbe rousse et sa casquette, livrent ici un EP conceptuel bien plus approfondi qu'il n'y paraît, et dont le leitmotiv semble être l'intensité. Ainsi les titres de l'EP du jeune anglais s'enchaînent en forme de montagnes russes avec cette même rengaine : une introduction paisible, puis une montée en puissance progressive avant une nouvelle accalmie. Alors que l'on passe par autant de phases que d'émotions, il est en réalité bien difficile de trouver une unité à ce disque, tant il paraît être animé par une volonté de déconstruire les genres au sein d'une époque où l'étiquetage à outrance des artistes va bon train.

Électronique nerveuse, minimale presque psychédélique ou encore soul mélancolique, voici autant de mouvances dans lesquelles pourrait s'inscrire ce prodige en devenir. L'alchimie prend avec Chemical, titre qui rappelle d'ailleurs les débuts de Years & Years, l'autre groupe émergent de cette scène soul électronique. Une voix de crooner superposée sur des synthés qui alternent avec quelques notes de piano légères constituent cette chanson sur laquelle ces éléments se côtoient tout en euphonie, jusqu'à atteindre le point culminant à savoir l'explosion de ces sonorités dans une symbiose enivrante. A cet instar, The Love You're Given adopte la même progression : en s'ouvrant au piano sur des choeurs angéliques et une voix douce qui sombrent dans un écho lointain pour laisser place à un ouragan électrisant et presque groove par endroits.

L'éclectisme sonne ici comme une maladie incurable pour ce véritable génie et maître en harmonie. Jack Garratt démontre encore la richesse de son talent sur fond de basse lourde et de beats lascifs avec Lonesome Valley pour conclure en forme de ballade électronique langoureuse cet EP qui, il faut bien l'admettre, nous laisse sur notre faim. Gare à Jack le jour où il sortira un album et, surtout, lorsqu'il se produira sous les projecteurs de la Boule Noire à Paris, le 28 avril prochain.