The Colours

Si la France connait un véritable renouveau musical, une période de disette sévit actuellement sur le royaume du rock britannique, en mal de nouvelles sensations. Pas grand-chose à se mettre sous la dent, en effet, si ce n'est quelques reformations par ci par là, ou quelques groupes trop vite affublés de l'étiquette « nouveaux espoirs » par le NME. Ou peut-être est-ce simplement dû au fait que les groupes exposés ne valent pas le coup, ou si peu...

Toujours est-il qu'une formation creuse depuis quelques années son trou au sein de la populaire et pluvieuse Blackpool, ville rongée par l'alcool, le chômage et les trafics de drogue. Là, quatre compères se sont réunis sous le patronyme de The Colours et, bercés par les ronrons de leurs skates, la brume des Cure ou les vagues guitaristiques de Foals, sortent un nouvel EP.
Church House, qui fait suite à Family, a ainsi été confectionné de A à Z par les membres du groupe, artwork compris. A peine l'EP se lance t-il que le style des Colours se reconnait immédiatement, la chanson Truth étant un parfait échantillon de celui-ci. Mi-dansante, mi-brumeuse, la chanson s'articule autour d'un refrain imparable. Que les nostalgiques de WU LYF se rassurent: la relève est là, l'orgue en moins. Rage incandescente, basculement rythmiques, basse saccadée et explosion finale composent cette chanson à l'intensité rare.

Tout au long de l'EP, nous retrouverons les mêmes ingrédients, portés par la voix de Powell qui, de titre en titre, semble gagner en assurance, parfois portée par les choeurs des autres musiciens. The Colours ont l'intelligence de ne pas, au contraire de beaucoup d'autres groupes, céder aux sirènes synthétiques. Les guitares sont ici maitresses; et se succèdent ainsi basses hachurées (Give In), dissonances (The New You) ou encore distorsions surgies de nulle part (la fin de Mobile, qui clôt l'EP dans une explosion de rage). Tous ces ingrédients, y compris l'interlude aux frontières de l'ambient et du drone, font de Church House un disque résolument moderne en dépit de l'utilisation d'instruments exclusivement acoustiques.

Si l'on reprochait au premier sa « production chancelante », force est de constater que les anglais ont grandement du travailler là-dessus pour cet EP. Tout est en effet en place, la voix, quelque peu en arrière, est soutenue par le combo classique basse / batterie / deux guitares; le tout étant savamment noyé dans la reverb, de manière néanmoins modérée.
Des influences sont donc ici bien identifiables, assumées, mais loin d'être copiées. Il y a en fait fort à parier que peu de choses manquent aux Colours pour se faire un peu plus connaitre : un véritable plan de communication, aujourd'hui essentiel, et un long format qui, on l'espère, confirmera leur talent.