Future Of The Left

Le quintuple rejeton supersonique de Future Of The Left ne pourra vous faire oublier la déflagration sonore habituelle de la formation originaire de Cardiff. Financé par un système de dons des fans, c'est totalement grâce au public que la création du disque fut possible sous le label indépendant Prescriptions Music. Alors que faire pour retourner tout ce qui vous fout en rogne ? Appuyer sur « Play ».

Treize titres qui envoient trente-huit minutes d'un défouloir rock, c'est redécouvrir que les baffes virulentes existent, même sur disque. L'album qui commence par le titre à rallonge If AT&T Drank Tea What Would BP Do fait d'emblée rentrer une guitare criante et un accompagnement rêche et tendu, qui plus est, très représentatif du disque à l'exception de quelques morceaux. Passant de l'entêtant In A Former Life au rythme saccadé à la ligne de basse de Running All Over The Wicket semblable au char Leclerc, ce début d'album est une apocalypse de sons dégoulinants mais totalement maîtrisés qui chatouillent avec les frontières du math-rock. L'originalité est le petit plus apporté par la voix tantôt saturée, tantôt mi-parlée/chantée dans des titres comme Miner's Gruel ou Reference Point Zero.

On vous le dit d'avance, pas le temps pour des moments plus « légers » que l'on pouvait trouver dans leurs anciennes œuvres ; ici c'est du brut, mais géré par une bonne production qui restitue l'esthétique du groupe. Moins violent ? Oui, mais moins lourd ? À peine ! Back When I Was Brilliant signe une chanson très lancinante avec des guitares malsaines. Dans un registre un peu différent, Eating For No One use d'une introduction funky à la testostérone, mais vire (très) vite sur des ambiances similaires à ce que l'on a pu déjà écouter auparavant.
L'ironique titre 50 Days Before The Hun bâti sur un seul riff de guitare qui cimente les lieux, le côté décalé vient de ce semblant de refrain où la mélodie vocale se moque de ne pas avoir de mots à dire, plus ces petites notes de synthétiseur qui viendront accumuler cette harmonie tournoyante. Le dernier titre de l'album, No Son Will Ease Their Solitude, est le plus nuancé : rythme plus lent sur les couplets avec une instrumentation plus dépouillée, la schizophrénie maladive fait que le groupe n'a pas de juste milieu à donner. En effet, plus on avance et plus le crescendo se fait sentir, mais devient vite brisé par ce moment plus tranquille. Ici, on ne sait jamais où est-ce qu'ils sont capables de nous emmener !

Future Of The Left ont été capables de se renouveler dans un style beaucoup plus sauvage, une évolution audacieuse dans la carrière du groupe qui s'était frotté à pas mal de styles, du lo-fi à l'énergie punk. Actuellement assez noise et underground, le disque rappellera la rage insufflée par des groupes comme Cloud Nothings, les bruits et dissonances de Sonic Youth. Le tout avec une voix tout à fait originale, partagée entre une violence adéquate aux instruments dans la première partie de l'album, et qui tend vers le rappé et le parlé sur certains titres dans la seconde moitié du LP. En clair, c'est une bombe à retardement que vous aurez entre les mains. Et nul ne doute que tout ceci paraît très taillé pour le live.